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Eglise Protestante Unie de Narbonne

"Lève-toi; ta foi t'a sauvé!" - Prédication du dimanche 09 octobre 2016.

9 Octobre 2016, 18:43pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Texte biblique : Luc 17: 11-19

 

 

« Lève-toi, va ; ta foi t'a sauvé. »

 

Frères et sœurs, voici une belle histoire de guérison mais surtout une belle histoire de rencontre que l’évangéliste Luc est le seul à rapporter : les dix lépreux.

Tout cela se passe sur le chemin vers Jérusalem et c’est sur ce parcours que va se produire la rencontre entre Jésus et les dix lépreux.

 

Il ne serait pas peut-être inutile de rappeler qu’il y a une diversité de récits de miracles, et notamment de guérisons dans les Évangiles. Ils ne nous sont pas  racontés seulement pour dire que Jésus était formidable et qu'il pouvait faire des choses extraordinaires ! Jésus lui-même se méfiait de ceux qui le suivaient juste pour ses signes. Ces récits sont toujours l'occasion d'une rencontre, avec des gens qui souffrent, qui sont en détresse, et qui trouvent en Jésus une libération. En général, ces rencontres se transforment en leçon de vie, en leçon de foi.

 

Dans le présent récit, les dix lépreux se tiennent à distance de Jésus et lui crient : « Jésus, maître, aie pitié de nous » (verset 13). En le nommant, les dix lépreux semblent avoir attendu parlé de Jésus et de ses actions.

Et ils l’appellent « maître » : en fait, le mot utilisé ici dans le texte grec signifie uniquement « responsable » et non pas enseignant, savant, prêtre, rabbi ou seigneur. Les dix lépreux discernent donc Jésus seulement comme un responsable dans la société. Mais leur cri « aie pitié de nous » est celui du désespoir et du dernier recours ; c'est le cri à la fois du malade, de l'exclu et du maudit.

 

Jésus réagit, de façon curieuse, à ce cri de désespoir. Il ne bouge pas, il ne s'approche pas d'eux, il ne leur tend pas la main, il ne les touche pas, il ne pratique pas de geste d'imposition des mains. Il leur répond littéralement dans le texte « allez vous montrer vous-mêmes aux prêtres » (verset 14).

Les dix lépreux obéissent à cette parole surprenante de Jésus, ils se mettent en route. Et c'est sur le chemin qu'ils se trouvent guéris et purifiés. Cette fois-ci, la guérison s'accomplit à distance de Jésus, sans aucun contact avec lui.

Ainsi, la façon dont s'est réalisée cette guérison montre que la parole de Jésus est non seulement une parole d'envoi sous le regard de Dieu, mais aussi une parole agissante sur ceux qui place leur confiance en Dieu. Voilà une nouvelle façon de guérir !

 

D'ordinaire Jésus invitait les malades à venir auprès de lui, les prenait par la main et les conduisait à l'écart, les touchait, leur imposait les mains et prononçait quelque parole qui avait le pouvoir de les guérir. Ici, rien de tout cela. Pas même une promesse de guérison, mais simplement l'ordre d'aller trouver les sacrificateurs dans le temple de Jérusalem.

 

Certaines guérisons ne laissent pas d’ambiguïté : les paroles et les gestes de Jésus sont explicites. Pas ici... et c'est en chemin qu'ils sont guéris. Et il n'y a pas de doute : c'est bien Jésus qui les a guéris. Il ne leur dit pas « Allez voir les prêtres ! » mais « Allez vous montrer aux prêtres ! » Ce n'est pas la même chose.

 

Dans la Bible, on ne distinguait pas vraiment la lèpre d'autres maladies de peau plus ou moins graves. Deux chapitres entiers du livre du Lévitique sont consacrés au sujet, avec la description des maladies (Lévitique chapitre 13) et les rites de purification à accomplir une fois guéri (Lévitique chapitre 14).

La lèpre était considérée non seulement comme une maladie mais aussi comme une malédiction, un signe d'impureté, une image du péché. Ce qui faisait des lépreux des parias. Obligés de vivre en marge de la société, ils ne devaient avoir aucun contact avec les gens, sous risque de les rendre impurs à leur contact. On le voit dans notre récit : les lépreux se tiennent à distance de Jésus, ce qui les oblige à crier : « Aie pitié de nous ! »

 

Selon la tradition dans le Premier Testament et au temps de Jésus donc, un lépreux allait se montrer aux prêtres au début de sa maladie, pour être déclaré impur, mais aussi lorsqu'il était guéri, pour que les prêtres constatent la guérison. L'authentification de leur guérison leur permettait de retrouver une vie sociale. C'est évidemment le deuxième cas qui concernait les lépreux de notre récit. A l'exception près qu'ils n'étaient pas encore guéris !

 

En fait, Jésus fait appel à leur foi. En leur disant d'aller se montrer aux prêtres, Jésus les envoie avec une promesse de guérison. Il met leur foi à l'épreuve. Et ils le font ! Tous les dix ! En cela, les dix lépreux font preuve de foi. Et ils y vont, sans demander d'autre explication, car ils ont compris qu'à cet ordre était liée une promesse inexprimée, celle que les sacrificateurs constateraient leur guérison. Et ils sont bel et bien guéris en chemin. La guérison était indéniable, les prêtres n'avaient plus qu'à la constater.

 

Frères et sœurs, les dix lépreux illustrent de façon impressionnante ce qu'est fondamentalement la foi : une confiance placée dans la parole du Christ. Une confiance qui s'exprime alors même qu'on ne possède pas encore ce qu'on espère, qu'on ne voit pas encore ce qui nous est promis. La foi ne se démontre pas, elle n'est fondée ni sur la perception ni sur la raison. Elle est, fondamentalement, un choix, une décision de placer sa confiance en Dieu.

La foi met en marche, et c'est cette mise en marche qui nous permet d'entrer dans les promesses de Dieu.

 

Mais le récit ne s'arrête pas là... il y a quelque chose qui cloche. Les dix lépreux ont eu confiance dans la parole du Christ, et les dix ont été guéris... Chose imprévue, l'un des dix lépreux, guéri et purifié, désobéit et ne suit pas l'ordre de Jésus. Il ne va pas immédiatement se montrer aux prêtres pour faire reconnaître sa guérison et faire attester sa pureté retrouvée. Au contraire, ce samaritain fait demi-tour en glorifiant Dieu, en lui rendant gloire. Il retourne vers Jésus pour le remercier, lui rendre grâce.

Jésus s'indigne que les neuf autres lépreux, qui ont eux-aussi été guéris et purifiés, n'aient pas fait de même. Le Samaritain fait un retour sur lui-même : " se voyant guéri " nous dit le texte.

En fait, il constate l'œuvre du Christ dans son existence, ce qu'il était avant et ce qu'il est maintenant grâce à l'intervention de Jésus ; il considère le moment décisif de cette rencontre avec Jésus, l'efficacité de sa parole, l'extraordinaire de son amour et c'est le début de sa conversion.

Oui, frères et sœurs, c'est bien cela, une conversion : il fait demi-tour, change de direction, s'extrait du mouvement de vie qui éloigne ses compagnons loin de Jésus et il retourne là où les choses ont changé pour lui, là où se tient celui qui les a changées ; il revient et glorifie Dieu à haute voix.

En effet, le demi-tour accompli par ce samaritain guéri et purifié est primordial, car c'est le signe d'un retournement qui s'opère en lui et d'une conversion dans sa croyance religieuse.

Cette conversion est même le point central de ce récit.

Certes, la guérison est importante car c'est l'accomplissement d'un signe, la manifestation visible d'un signe divin. Mais aux yeux de Jésus, la conversion est plus importante encore, elle constitue le vrai miracle, car elle touche à l'intériorité de la personne et à sa relation à Dieu. En effet, cette rencontre avec Jésus a bouleversé la vie de ce samaritain :

- Il était malade, Jésus lui a adressé une parole de guérison.

- Il était exclu, Jésus lui a adressé une parole d'envoi.

- Il était maudit, Jésus lui a adressé une parole de libération.

A présent, ce samaritain n'est plus malade, ni exclu, ni maudit. Il est guéri, il peut profiter de sa famille et de ses amis, il peut de nouveau vivre sa foi dans une communauté, il est libre et peut retrouver sa place dans la société, et il est sauvé au regard de Dieu. C'est ce que résume parfaitement Jésus à travers son ultime parole : «  ta foi t’a sauvé ».

 

Est-ce de l'ingratitude de la part des neuf autres qui ne sont pas revenus vers Jésus?

Peut-être...Peut-être pas ! Cependant, ils ont, sans aucun doute, privilégié l'obéissance aux rites à la rencontre personnelle de celui qui les a guéris. En tout cas, Jésus s'en étonne : « Les neufs autres, où sont-ils ? ».

Celui qui est revenu n'est pas allé voir les prêtres... On ne sait pas s'il est allé les voir après être revenu auprès de Jésus. Mais il a considéré comme une priorité d'interrompre cet acte rituel pour une vraie rencontre avec le Christ.

Les dix lépreux ont fait preuve de foi. Mais un seul a fait preuve d'attachement au Christ. C'est cette foi-là que Jésus montre en exemple : « Lève-toi, va, ta foi t'a sauvé ! ».

Frères te sœurs, la différence est là, dans l'attachement au Christ. La foi ne peut pas se contenter d'une mise en marche dans la confiance, elle doit s'enraciner dans un attachement au Christ. Un attachement au-delà de la religion ou du rite.

Il y a une spontanéité chez le lépreux de notre récit qui est l'expression même d'une foi vivante et authentique ! Il ne respecte pas scrupuleusement ce qui était commandé par la loi de Moïse, ni même ce que Jésus avait dit... et c'est pourtant bien ce qui plaît à Jésus. Parce qu'il témoigne d'une foi authentique et vraie.

Il ne s'agit pas de mettre en cause la réalité de la foi des neufs autres lépreux guéris mais de souligner l'exemple de foi vivante du dixième.

Frères et sœurs, la foi vivante que le Christ attend de nous n'est pas un attachement à un rite ou une doctrine mais un attachement à sa personne. Mieux vaut une foi spontanée et vivante, quitte à sortir un peu du cadre prévu, qu'une foi réduite à une stricte observance de rites et de croyances.

 

 « Lève-toi, va ; ta foi t'a sauvé. »

Frères et sœurs, ce face à face avec Jésus dans l'élan de la reconnaissance et le don de la foi, vient ôter l'ambiguïté d'une foi bien temporelle en un Dieu bien impersonnel. Ici, au contraire, s'établit avec le Seigneur une relation vraiment authentique, éclairant à la fois la condition de l’être humain  faible et la personne de Jésus-Christ.

En revenant sur ses pas, en glorifiant Dieu à haute voix, en se jetant aux pieds de Jésus et en lui rendant grâce, le samaritain a honoré Dieu et est devenu un enfant de Dieu. Il entre dans une relation de la grâce, de la gratuité et c’est cela la vraie guérison, la vraie libération.

 

Un détail mérite d'être mis en évidence dans notre récit. Jésus le fait lui-même et cela lui tient à cœur. L'homme qui est donné en exemple par sa foi était Samaritain !

 

Jésus précise bien ‘un étranger !’ : « Parmi eux tous, personne n'est revenu pour dire 'Gloire à Dieu'. Il n'y a que cet étranger ! » (v.18). Le mot « étranger » souligne ici la piètre opinion que les Juifs du temps de Jésus avaient des Samaritains. Véritables frères ennemis, les Samaritains et les Juifs ne s'appréciaient guère. Pourtant, devant ses disciples, Jésus donne en exemple cet « étranger » ! D'ailleurs, quand on considère les Evangiles surtout chez Luc, il faut bien reconnaître que ceux que Jésus donne en exemple quant à leur foi sont rarement de bons Juifs pieux.  Ici, un Samaritain. Ailleurs, un collecteur d'impôts. Ou une femme païenne. Jésus dira même aux Pharisiens que les collecteurs d'impôts et les prostituées les devanceront dans le Royaume de Dieu ! On lui a d'ailleurs suffisamment reproché de fréquenter des gens de mauvaise vie !

Jésus est du côté des plus faibles et des rejetés, non pas parce qu'il exalterait la faiblesse ou le fait d'être marginal en tant que tels. Mais parce qu'il est auprès de ceux qui savent reconnaître leur fragilité et leur besoin de Dieu.

Il n'y a rien de pire, frères et sœurs que le confort pour croire qu'on n'a pas vraiment besoin de Dieu...

Ce sont là des verrous que Jésus fait sauter, des barrières qu'il renverse. Etre hériter ou se prendre pour héritier de la ‘pure foi’, de la ‘pure tradition’ et le revendiquer de façon exclusive, peuvent nous conduire à l’enfermement, frères et sœurs. C'est pour cela que chaque jour, Jésus-Christ nous adresse cette même parole de guérison, d'envoi, de libération, de salut: « Lève-toi ; va ; ta foi t'a sauvé » (verset 19). Nous la recevons comme une véritable parole de vie et d'espérance, qui nous accompagne à tout moment de notre existence : -

Lève-toi, car tu es guéri ! Va et avances dans ta vie, car tu es libre !  Sois sauvé, car tu as la foi qui passe par la rencontre! Amen.

 

Charles KLAGBA

 

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