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Eglise Protestante Unie de Narbonne

Culte du dimanche 14 mars 2021

17 Mars 2021, 11:13am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

Église protestante unie de Narbonne​​

 

 

Dimanche 14 mars 2021

Prédication d’André Bonnery

 

 

Lectures : Ephésiens 2, 4-10 ; Jean 3, 14-21

Chants : (Spontanés 405) ; 81 ; 401 ; 428

 

Textes bibliques :

Ephésiens 2, 4-10 :

4 Mais Dieu est riche en compassion. A cause du grand amour dont il nous a aimés,
5 nous qui étions morts en raison de nos fautes, il nous a rendus à la vie avec Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés –,
6 il nous a ressuscités et fait asseoir avec lui dans les lieux célestes, en Jésus-Christ.
7 Il a fait cela afin de montrer dans les temps à venir l'infinie richesse de sa grâce par la bonté qu’il a manifestée envers nous en Jésus-Christ.
8 En effet, c'est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu.
9 Ce n'est pas par les œuvres, afin que personne ne puisse se vanter.
10 En réalité, c’est lui qui nous a faits ; nous avons été créés en Jésus-Christ pour des œuvres bonnes que Dieu a préparées d'avance afin que nous les pratiquions.
 
Jean 3, 14-21 :

14 » Et tout comme Moïse a élevé le serpent dans le désert, il faut aussi que le Fils de l'homme soit élevé
15 afin que quiconque croit en lui [ne périsse pas mais qu'il] ait la vie éternelle.
16 En effet, Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle.
17 Dieu, en effet, n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui.
18 Celui qui croit en lui n'est pas jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
19 Et voici quel est ce jugement : la lumière est venue dans le monde et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière parce que leur manière d’agir était mauvaise.
20 En effet, toute personne qui fait le mal déteste la lumière, et elle ne vient pas à la lumière pour éviter que ses actes soient dévoilés.
Jésus et Jean
21 Mais celui qui agit conformément à la vérité vient à la lumière afin qu'il soit évident que ce qu’il a fait, il l’a fait en Dieu. »

 

Prédication

 

Dans l’entretien avec Nicodème, Jean n’y va pas par quatre chemins, il présente Jésus comme la lumière du monde : « la lumière est venue dans le monde » (v.19), affirmation qui est un écho au Prologue de ce même Evangile : « Le Verbe était la vraie lumière qui, en venant en ce monde, illumine tout homme » (1, 9). Alors que les Evangiles synoptiques adoptent une pédagogie progressive pour révéler le caractère messianique et divin de Jésus, et que Marc est encore plus réticent que les autres, Jean déclare d’emblée que Jésus est Fils et Verbe de Dieu. Il fait cette déclaration à Jérusalem au cœur du judaïsme, dès le début du ministère de Jésus (nous sommes ici au chapitre 3 des 21 chapitres de Jean). Non, le Jésus que présente Jean n’y va pas par quatre chemins : en montant à Jérusalem pour Pâques, (chapitre 2) il prend un fouet, renverse les tables des changeurs et chasse les marchands de la « maison de son Père ».

 

Ne pas en rester à une lecture superficielle

C’est à la suite de ce coup d’éclat que se situe la rencontre avec Nicodème.  Ce n’était pas n’importe qui « un des notables Juifs », précise Jean, un membre de l’aristocratie religieuse de Jérusalem. Intrigué par ce jeune rabbi fougueux, qui détonne et qui étonne, Voulant mieux apprécier sa doctrine, il va à sa rencontre, « de nuit ». Vue sa réputation de notable, Nicodème ne tenait pas à se faire remarquer de ses collègues et accuser de pactiser avec un excité. Jésus accepte le rendez-vous, ce qui donne lieu à cet entretien si riche d’enseignements dont nous venons de lire la finale.

Si l’on veut bien comprendre cet entretien avec Nicodème, il faut considérer qu’en l’écrivant, bien des années plus tard, Jean procédait à une lecture à postériori de la mission de Jésus. On peut la résumer ainsi : Afin de sauver les hommes pervertis par le mal, Dieu a envoyé son propre Fils sur terre afin d’apporter la lumière en leur indiquant la route à suivre. Mais la majorité des Juifs, contemporains de Jésus n’ont pas reçu le Messie de Dieu alors qu’ils avaient les moyens pour le reconnaître : l’enseignement des prophètes. Ils sont donc coupables et sans excuses. Décidément Jean n’y va pas par quatre chemins !

Ceux qui ont une vision manichéenne du monde peuvent se trouver à l’aise dans le vocabulaire de Jean. Ce n’est pas pour rien que les cathares privilégiaient le quatrième Evangile dans leur enseignement. D’un côté il y a les bons, ceux qui acceptent les paroles de Jésus, de l’autre les méchants qui les refusent. C’est aussi simple que la division en ténèbres et lumière. Mais est-ce exactement ce que nous dit le Jésus de Jean ? Pas sûr, si on ne s’en tient pas à une lecture superficielle des Ecritures. Les Juifs du temps de Jésus et Nicodème en particulier, maître en Israël, possédaient les codes de lecture et d’interprétation de la Bible, ce qui n’est pas le cas pour la plupart des chrétiens de nos jours.

 

Le serpent d’airain figure du Christ en croix

Prenez par exemple cette histoire de serpent d’airain fiché sur un bâton par Moïse et placé à la vue des Hébreux. Jean établit un parallèle entre le serpent érigé sur son support en bois et Jésus qui bientôt sera attaché à la croix : « comme Moïse a élevé le serpent dans le désert, il faut que le Fils de l’homme soit élevé afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu’il lui a donné son Fils » (v. 14-16). Pourquoi cette comparaison ? Naturellement, nous pensons : serpent égale tentateur, égale mal personnifié. S’il en est ainsi le rapprochement entre le serpent sur son pieu de bois et le Christ suspendu au bois du supplice est incompréhensible et aberrant. Pour nous, peut-être mais pas pour Nicodème ni pour les disciples de Jean qui connaissaient la Bible et savaient la décrypter. Il est fait allusion ici à un épisode de la marche du peuple dans le désert après être sortis d’Egypte. Le Hébreux sont agressés par des serpents venimeux qui mordent et tuent beaucoup d’entre eux (Nb 21, 9). Ces reptiles dangereux sont perçus comme un châtiment divin pour punir l’infidélité et l’ingratitude du peuple. A la demande des Hébreux qui se repentent, Moïse, sur ordre de Dieu, fait alors dresser un serpent de bronze sur un pieu fiché en terre : ceux qui étaient mordus par un reptile le regardaient et ils ne mourraient pas. Il ne s’agit pas dans le contexte de la Bible d’un acte magique mais d’un acte de foi au Dieu d’Israël à la suite d’un repentir du peuple après son infidélité (il doutait de Dieu). On comprend mieux ainsi la comparaison avec le Jésus dressé sur la croix, source de salut pour ceux qui mettent en lui leur espérance. On comprend aussi l’amour infini du Dieu de Jésus pour les hommes « qui les a tant aimés qu’il a donné son Fils, son unique pour que celui qui croit en lui ne périsse pas » (v. 16)

Vue sous cet angle, la division du monde entre lumière et ténèbres, bons qui suivent Jésus et méchants qui le rejettent, n’est certainement pas dans l’esprit de ce que Jean a voulu dire ; il faut dépasser cette vue simpliste des choses et ne pas confondre la Lumière dont il parle avec la Vérité antithèse de l’Erreur. La Lumière qui prétend à l’absolue vérité, c’est ce que recherchent tous les fanatiques. Au nom de la Vérité avec un grand V, ils n’hésitent pas à pourfendre l’Erreur avec un grand E. Normal selon eux : puisque seule la vérité à droit de cité, l’erreur doit être éradiquée. Il y a les sauvés et les réprouvés. L’histoire de l’Eglise a fourni de multiples exemples de cette vision fanatique et des conséquences dramatiques qu’elle a entrainées. On en sait quelque chose dans l’Aude avec le drame cathare et les guerres de religion.

 

La lumière est l’illumination qui conduit à la Foi

Voir les choses ainsi c’est se tromper sur le sens des propos de Jean, ou s’arrêter avant une lecture complète de son propos. La lumière dont il est question chez Jean n’est pas cet absolu dont rêvent les fanatiques, mais plutôt une illumination du cœur qui conduit à la foi. La Foi, c'est-à-dire la confiance en Jésus-Christ qui est, lui seul, la Vérité. La Vérité n’est pas une notion dont on peut s’accaparer pour pourfendre l’erreur : c’est une personne vivante.

Pour en être convaincu, il suffit de poursuivre la lecture de Jean. « Car Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour le juger, mais pour qu’il soit sauvé par lui ». Ils se trompent, comme on le voit, ceux qui brandissent leur vérité pour juger et condamner. Jésus est venu dans le monde pour le sauver et non pas pour juger.

Et encore déclare Jean : « qui croit en lui n’est pas jugé » Comme il est rassurant d’entendre cela : celui qui met sa foi, c’est à dire sa confiance en Jésus, sans aucun mérite de sa part, est assuré du salut et de l’amour de Dieu. Et les autres, ceux qui ne mettent pas leur foi en lui, Dieu ne les juge pas, et nous à plus forte raison, nous ne devons pas le faire : ils se jugent eux-mêmes : « qui ne croit pas en lui est déjà jugé » (v.18).

 

Je voudrais introduire ici une réflexion sur cette idée de jugement, l’intervention dernière de Dieu dans l’histoire humaine. Ce que l’on appelle l’eschatologie. Cette idée est traditionnelle dans le judaïsme et elle a été reprise par le christianisme : le retour du Christ aux temps voulus (nul n’en sait le jour), mettra fin à l’histoire du monde tel qu’il existe. L’Evangile de Jean connait incontestablement cette attente eschatologique et y fait plusieurs fois allusion. Cependant, l’entretien avec Nicodème comme d’autres textes johanniques tels que ceux de la résurrection de Lazare ou la guérison du paralytique indiquent clairement que le jugement, la résurrection ou le don de la vie éternelle, ne sont pas seulement des événements appelés à se produire dans un avenir lointain, mais ils ont lieu, dès maintenant, dans la rencontre avec Jésus. Il en va de même pour l’idée de Royaume qui est à la fois à venir et présent. Cette double perspective : une eschatologie à venir (un Royaume à venir) et une eschatologie présente (un Royaume déjà là) est à prendre dans sa dualité. La première eschatologie rappelle au croyant que sa vie et son histoire auront un terme. La seconde affirme que la vie en plénitude offerte par Dieu à celui qui met sa foi en Jésus, commence ici et maintenant.  

Nicodème a-t-il compris tout ce que le jeune rabbi qui l’intriguait, a voulu lui dire ? Sans doute en partie, car il avait une bonne connaissance des Ecritures auxquelles Jésus se référait. Mais le récit de l’entretien de nuit ne nous en dit pas plus. Pourtant Jean nous livre un élément de réponse, à la fin de son Evangile : dans le récit de la sépulture de Jésus, il écrit : « Joseph d‘Arimathée vint enlever le corps. Nicodème vint aussi, lui qui naguère était allé trouver Jésus au cours de la nuit. Il apportait avec lui un mélange de myrrhe et d’aloès d’environ cent livres » (33kg environ). Quel courage au moment où tous abandonnent Jésus. Quelle admiration pour le jeune rabbi suppose cette fidélité ! J’ose croire que la Résurrection du Christ l’aura confirmé dans sa foi, c’est-à-dire dans sa confiance en Jésus.

 

En conclusion,

je me permets une audacieuse métaphore. Lorsque vous passez devant la plaque du cabinet de votre médecin, la voiture d’une infirmière, vous pouvez voir un caducée, cette tige autour de laquelle s’enroule un serpent. Vous savez que ce symbole, attribut d’Esculape, Dieu de la médecine, évoque l’art médical, celui de rendre ou d’améliorer la santé. En voyant un caducée, vous penserez au serpent d’airain de Moïse dont la vue rendait la santé aux Hébreux et, métaphoriquement, au Christ, dressé en croix. Vous vous rappellerez que Dieu a tellement aimé le monde que, pour le sauver du mal, il a donné son Fils. La fidélité à sa mission qui répond à l’amour du Père pour les hommes l’a conduit à la mort. Par lui, le Grand Médecin qui a vaincu le mal et la mort, nous avons accès à la vie, celle qui ne peut finir ni s’altérer, la Vie divine.

 

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