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Eglise Protestante Unie de Narbonne

Apoc. 7,9-17 ; Jean 10,27-30 : "Mouton, tu es sür ?"

8 Mai 2022, 16:10pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Narbonne

DIMANCHE 8 mai 2022

ACTES 13, 14 – 52

APOCALYPSE 7, 9 - 17

JEAN 10, 27 – 30

« Mouton ? Tu es sûr ? »

INTRODUCTION : « moutons » ?... « Grande foule que personne ne peut compter ?... » Voilà des expressions qui ouvre toute grande ma boite à questions ! Qui sont ces moutons, et cette foule innombrable, au sort si enviable ?

Les premiers, dociles, sont aimés du Fils et du Père, ils ne seront jamais perdus et personne ne les arrachera de la main de leur berger.

La grande foule, elle, en adoration, devant le trône de l’agneau après un temps de tourmente vécu dans la persécution, est l’objet d’une formidable promesse : « l’agneau sera leur berger et les conduira aux sources d’eau vive. Et Dieu essuiera toutes larmes de leurs yeux ».

Et à l’égard tant de la foule que des moutons, un fil rouge se déroule tout au long de nos lectures, et quel fil rouge ! la fidélité du Seigneur, une fidélité immuable, indéfectible et nous le savons inconditionnelle.

Ce matin nous commencerons par examiner d’un peu plus près ces agglomérats de vivants : foule d’abord, moutons ensuite, bénéficiaires de la fidélité du Père et du Fils qui sont « un » pour l’éternité, garantie infaillible de la réalisation de la promesse. Puis une question dans laquelle notre implication est entière : foule ou moutons, où nous situons nous ?

 

 1) une grande foule   : La grande foule est dans une situation particulièrement déconcertante : il y a un trône, des anges, des anciens, des animaux… dans un même lieu ! C’est quoi ce binz ? Et un truc que certainement Coluche aurait pu tourner à la rigolade : ils ont des robes blanches, et on les lave dans du sang. Côté lessive, dans le ciel, y aurait des séances de formation à organiser…

Et bien, c’est tout simplement parce que nous avons sous les yeux un texte dit « apocalyptique », c'est-à-dire une description qui relève d’un « langage biblique qui fourmille d’images et de symboles à décoder[1] ».

La foule innumérable occupe une place privilégiée, devant le trône, comme celle qu’occupaient les prêtres dans le temple de Jérusalem. Ce sont des officiants, adorant leur Dieu, dans une symbiose d’amour, avec les anciens et les quatre êtres vivants. Notons au passage qu’une foule ce dont des hommes mais aussi des femmes !

Issue de toutes nations, toute langue, tout peuple, éclatante dans ses robes blanches, rayonnante dans sa reconnaissance partagée pour le salut reçu, elle me semble l’aboutissement, et même l’achèvement de l’envoi formulé par Jésus dans les derniers versets de l’Évangile selon Matthieu, envoi qui résonne comme une promesse : « allez auprès des gens de tous les peuples et faites d’eux mes disciples leur enseignant tout ce que je vous ai commandé[2] ». Chacune, chacun de nous n’a t-il pas bénéficié de cet enseignement ? Nous sommes donc parmi ces gens de tous les peuples, la grande foule destinée à vivre la louange et l’adoration, c’est nous. Joie du Royaume !

Une autre réminiscence clarifie la scène : les branches de palmiers dans leurs mains font-elles allusion à la montée triomphale à Jérusalem qui conduira Jésus à un sacrifice qui fit de lui un agneau rédempteur ?

Cela expliquerait pourquoi les robes peuvent être blanchies, en esprit, dans le sang sacrificiel de l’agneau, vies désormais justes aux yeux du Dieu fidèle en qui elles avaient foi.

Puis, l’agneau, paradoxe, devient berger. Encore des images qui, prises au premier degré, seraient incompréhensibles ; mais dans un texte apocalyptique, elles sont comme un condensé de la fidélité dont bénéficient ces disciples : d’abord, un temps d’offrande, celle du Seigneur qui accepte de devenir un agneau conduit au bois pour, le troisième jour, ressuscité, leur ouvrir ses bras aimants et protecteurs comme un berger. Ce condensé de la grâce, Jésus le résume un peu plus haut dans notre lecture de l’Évangile : « je suis le bon berger. Le bon berger donne sa vie pour ses moutons ». Dieu est fidèle. Joie du Royaume !

 

2) un anonymat fructueux pour des moutons : Les moutons, parlons-en. Des moutons pour lesquels le sort envisagé, à la limite de l’inconcevable pour l’époque, que dis-je, pour toutes les époques, n’est rien moins que l’éternité ! Des moutons engraissés juste pour le plaisir du berger, gratuitement, sans arrière pensée de vente à la boucherie ou au temple. Ce berger là sort de l’ordinaire ! Et quelle chance que celle de ces moutons installés dans un package verdoyant à l’abri des bêtes sauvages et des brigands qui feraient bien leur 4 heures de quelques côtelettes ! Un pasteur fait ce commentaire, je cite : « Le berger s’active sans aucune rentabilité et les moutons en s’engraissant n’ont aucune autre fonction, sinon celle de faire la joie de leur berger [3]». Et vous savez quoi ? Il connait chacun par leur nom ! Le troupeau, ce n’est pas un amalgame d’animaux indifférenciés mais un agrégat d’individu dont le nom importe au berger. Et dans les Écritures, le nom ce n’est pas rien : chaque nom est spécifique, il est la personne même.

Dans ce texte, c’est le berger qui est mis en lumière, un berger d’exception, je viens d’en parler, un berger, aussi, qui échange avec son Père des relations d’intimité telles qu’il fait « un » avec lui.

Voilà le troupeau sous la houlette d’une communion bienfaisante et dynamisante dont les disciples ont vécu les retombées dans leur suivance du Maître. Nous pourrions relire le chapitre 17 de l’Évangile selon Jean, une prière que le Fils fait monter vers son Père et qui colle à la perfection avec ce que Jésus décrit des relations entre le berger et ses moutons : « tout ce qui est à moi est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi (…) maintenant je viens à toi et je dis ces choses pendant que je suis encore dans le monde, afin qu’ils aient en eux ma joie, une joie complète[4] ».

Un bonheur dans une fidélité divine juste pour une communion d’amour avec nous, car, il va sans dire que nous sommes aussi les disciples que Jésus veut enseigner avec cette histoire champêtre imagée. Nous sommes des moutons justifiés dans la fidélité indéfectible du Seigneur. Notre seule fonction : remplir Dieu de bonheur.» Joie du Royaume !

 

3) moi, l’anonyme : quand Jean rédige le livre de l’Apocalypse à l’attention de ses frères et sœurs dans la tourmente d’un temps peu favorables aux chrétiens, pourchassés, persécutés, il a l’ardent désir de leur communiquer l’assurance de l’espérance annoncée. Dans sa description de la grande foule, chacune, chacun peut se retrouver, quand enfin, la tourmente passée, l’adoration et la louange deviennent leur lot éternel. Oui, certes, c’était à son époque mais oserais-je dire : « déjà là, et pas encore » ?

Pour ce qui est des moutons, nous le savons, Jésus avait pour habitude de puiser dans le quotidien de son temps des images familières à ses auditeurs. La vie champêtre avec ses bergers et leurs moutons pouvait aider les disciples à déplacer l’image campée vers leur propre vie, à réaliser combien leur maitre était la fidélité incarnée pour eux, pour elles, comme le berger de la parabole. Ainsi rassurés, ils pouvaient continuer de cheminer à ses côtés sur les routes plutôt dangereuses de l’époque.

L’enseignement dispensé l’est pour toutes les époques, tous les temps, tous les lieux, je veux dire qu’il l’est pour nous encore aujourd'hui, ici, dans ce temple.

Avec nos deux textes, nous recevons une fabuleuse proposition du Seigneur : entrer dès maintenant dans son éternité, avec la ferme assurance que « ni la mort, ni la vie, ni les anges, ni d’autres autorités ou puissances célestes, ni le présent, ni l’avenir, ni les forces d’en haut, ni celles d’en bas, ni aucune autre chose créée, rien ne pourra jamais nous séparer de l’amour que Dieu nous a manifesté en Jésus Christ notre Seigneur[5] ». Je l’ai déjà dit, et comment ne pas le répéter encore : la fidélité de cet amour éclatant du Seigneur est pour toi, pour moi. Joie du Royaume !

 

Conclusion : Des milliers, des millions d’anonymes ont formé, au fil des siècles et des lieux, membre d’une grande foule que personne ne peut compter ou mouton dans un troupeau, une chaine insécable de foi partagée dans cette fidélité dont nous sommes ici, aujourd'hui, là, dans ce temple, les maillons les plus récents. Cette chaine, c’est l'Église !

Wilfred Monod écrit, je cite : « la vraie Église réside dans le silencieux et interminable cortège des âmes pardonnées, consolées, purifiées, inspirées qui forment une infrangible chaîne entre le Calvaire et chaque table de communion (…) Elle s’identifie avec la triomphale continuité de l’expérience chrétienne à travers les âges[6]. »

Grande foule, moutons une même destinée : l’Église, celle que décrit Wilfred Monod évidemment où chacune, chacun, peut vivre à satiété                                                                                                                            la joie du royaume dans la fidélité de Dieu, aujourd'hui et demain aussi. Amen !

 

 

 

 

 

[2] Matthieu 28, 19-20

[4] Jean 17, 10 - 13

[5] Romains 8, 38-39

[6] Wilfred Monod la nuée de témoins volume 1 p.ix et x

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