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Eglise Protestante Unie de Narbonne

Dimanche 12 mars 2023 : Jean 4, 5 - 42

14 Mars 2023, 10:03am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Narbonne 12 mars 2023

Jean 4, 5-42

Pasteur Philippe Perrenoud

Cantiques 419, 609,542.

Voilà un beau passage, pour notre foi, et pour le monde en général… tout le monde…

Ce passage n’est pas toujours facile. Cette histoire est un peu mystérieuse, voire difficile… comme le sont les relations humaines, et notre monde, parfois… toujours…

Ainsi ces deux personnes, Jésus et cette Samaritaine : avec leurs parcours, leur histoire, qui se rencontrent. Mais qui semblent parler à des niveaux différents, comme deux étrangers. Il y a des malentendus partout ; dans ce passage en particulier : au point de se dire qu'ils sont voulus, pour pousser plus loin. Peut-être un peu comme en psychologie : ne pas répondre à la demande immédiate pour aller chercher plus loin, plus profondément ?... toujours est-il qu'il y a ici deux langages et des sujets de conversations qui changent très vite : on parle de l'eau. Oui mais de quelle eau ? On parle de maris. Oui mais de quels maris ?

Jésus parle d’eau, mais qui représente aussi autre chose : l’eau symbole de vie, de condition nécessaire de vie ; et de création.

Elle ne semble pas comprendre. Et nous ? Il va alors plus loin : parle de ces maris successifs. Il y a eu beaucoup de recherches, ou plutôt de suppositions, sur ce que pouvaient représenter ces maris, quels symboles il pouvait y avoir là. Beaucoup de suppositions, alors que la réalité est peut-être comme nos vies et comme nos relations : à la fois plus simples et plus mystérieuses…

Comme pour nous dire que Jésus perçoit, en elle et au-delà d’elle : il la voit, profondément… non pour la juger, la condamner : ce regard profond va être un exemple de Grâce, et faire d’elle un relais de Grâce… Elle va découvrir non seulement un prophète, mais le Messie, et finalement le Sauveur...

Comment ? Ils sont avec leurs parcours, leurs origines, leurs buts différents ; mais à ce même puits : comme une Église, qui signifie appelés hors de  nous sommes différents, mais appelés ensemble : comme lieu de rencontre. Et ce puits là : symbole/lieu de racines (puits de Jacob) Des racines qui donnent à vivre : non pas à enfermer, chacun dans sa logique, mais qui peuvent donner vie ; si on l'accepte et si on y puise... un ressourcement qui permet le dialogue, envoie et rassemble…

Les deux langages si différents de tout à l’heure auraient pu en rester là... Il est tellement plus simple de se limiter à ce que l’on connaît/croit connaître, dans nos limites… nos a-priori… c’est si simple et rassurant… Et après tout, pourquoi y aurait-il rencontre entre ces deux personnes, ces deux univers, ces deux perspectives ? Est-ce bien nécessaire ? A quoi bon ? Et tant d'autres questions que vous entendez peut-être... à propos d'univers différents, de cheminements…

D'autant plus qu'on pourrait s'étendre sur les barrières entre Jésus, le Juif, et la Samaritaine. Les Samaritains étaient mal vus des Judéens. Et il y avait de quoi... Ils représentaient un peuple qui se serait accommodé des envahisseurs Assyriens. Ils ne se rendaient plus à Jérusalem, car il avaient d'autres lieux, comme le Mont Garizim ; en fait par volonté de fidélité à la Loi seule. Chacun était donc sûr de son bon droit, d'être le plus fidèle, le meilleur...

Ils étaient comme étrangers l'un à l'autre. Étranger dans le sens profond du terme : l'autre non seulement différent, mais avec un passif dans les relations, des à priori,/tant d'à priori dans les regards ! Et pourtant Jésus a traversé la Samarie. Le texte nous dit même il fallait ; or dans la pratique, il ne fallait pas nécessairement !... Mais Jésus ne peut se satisfaire de cela, se débarrasser de cette question, se satisfaire à bon compte de cette situation... de nos barrières, limites. Alors il fallait effectivement ! Non pas comme une obligation qui nous tombe dessus, mais comme un choix…

Car si on ne traverse pas la culture de l'autre, le dialogue ne sera pas plus possible, et la vie réduite à de l'eau stagnante...

Malgré les barrières et les malentendus qui les séparent, les deux commencent à se parler et à s'écouter ! Les deux étrangers, voyageurs arrivent à se comprendre. Chacun va découvrir l'autre. Et à travers cela, ils découvriront la vraie personne qu'est l'Autre. Comme évoqué jeudi soir : les autres et l'Autre, avec un A majuscule, y compris de Dieu lui-même ! Notre foi n'est-elle pas ainsi/d'ailleurs, médiatrice dans tant/toutes dimensions de vies...

Les deux langages s'approchent finalement, et se reconnaissent autour de la même affirmation que Dieu est Esprit et ceux qui l'adorent doivent adorer en esprit et en vérité. La polémique entre les deux lieux (Jérusalem et Garizim ; ou d'autres...) est dépassée par une spiritualité vivante et partagée.

En fait, les deux étrangers se retrouvent auprès de Dieu, parce que reconnu lui-même comme différent... Différent au-delà de nos particularismes, source de Vie !

N'est-ce pas vrai que d'« accueillir le différent » peut être source de vie ?

La femme va sortir de son enfermement, et va vivre pour,/avec les autres... Comment ne pas partager et vivre cette bonne Nouvelle ?... source de vie ; elle reste elle-même, mais elle accepte autre chose...

Nous savons combien il est parfois difficile de parler des mêmes choses, de se mettre sur la même longueur d'onde, plutôt que de rester à deux niveaux différents : chacun le sien...

Nous savons combien il est parfois plus difficile de chercher à dépasser les malentendus que refuser le dialogue...

Plus encore : pas seulement de faire malgré nos différences, mais de faire avec nos différences...

Mais nous savons aussi combien il est parfois plus difficile de comprendre l'autre que de vivre chacun retranché chez soi ;

plus difficile de parler, tendre la main, recevoir un regard de Grâce que de rester dans des à priori ;

plus difficile de réfléchir que de rejeter.

Nous savons combien une paix véritable est parfois si difficile...

Mais sinon, ne serions-nous pas

en train de laisser nos forces de vies, nos eaux vives au fond d'un puits profond ?

en train de laisser stagner cet échange de Vie.

Le chemin de rencontres, auquel nous sommes appelés, n'est pas facile ; mais possible. Le Christ nous précède sur ce chemin. C'est lui, l'autre différent, qui nous a ouvert ce chemin : par sa mort et sa résurrection : de l'eau stagnante (au fond d’un trou !) à l’eau vive !

Amen.

 

 

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