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Eglise Protestante Unie de Narbonne

Prédication du culte de Noël. Le dimanche 25 décembre 2016

27 Décembre 2016, 09:21am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Esaïe 52 : 7-10; Matthieu 2 : 1-12

«Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie la paix, de celui qui annonce le bonheur, qui publie le salut, qui dit à Sion : Ton Dieu règne ! »

 

Aujourd’hui c’est Noël, jour de joie, jour de paix et surtout jour de la réalisation de la promesse de Dieu.

Comme dans la tradition du temps d’Esaïe, nous avons ce privilège d’être porteurs de cette bonne nouvelle les uns pour les autres et porteurs de la grande Bonne Nouvelle pour le monde ! Dieu entre dans notre monde, dans nos fragilités humaines en prenant la forme d’un nouveau-né, pour une nouveauté de vie.

Quel bonheur ! quelle joie en ce jour de Noël d’entendre résonner ce message d’assurance et d’espérance non seulement dans un monde fracturé comme le nôtre mais aussi dans nos vies personnelles souvent traversées par des doutes, des souffrances et parfois même la résignation.

Aujourd’hui Noël, c’est une ère nouvelle qui commence. Esaïe, décrit cette ère nouvelle comme le passage de l’obscurité, de l’ombre de la mort à la lumière. La nouvelle marche avec Dieu débute aujourd’hui même : « Le peuple qui marche dans les ténèbres, nous dit Esaïe, voit une grande lumière; sur ceux qui habitaient dans le pays de l’ombre de mort,… la lumière resplendit. Car un enfant nous est né, un fils nous est donné, et la domination reposera sur son épaule ; on l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père Éternel, Prince de la paix.».

Pour les contemporains de la naissance du Messie, il s’agit du rétablissement de Jérusalem, au chapitre 52, versets 7 à 10 du livre du prophète Esaïe, notre premier passage. L'asservissement de Jérusalem sera changé en domination, l'esclavage en liberté. L'honneur de Dieu demande que la ville sainte soit rétablie : qu'elle se relève donc pleine de joie et de gloire. Sa restauration sera complète et parfaite.

En effet, le peuple d’Israël et son roi sont en exil et Jérusalem est en ruines. Mais voici un « porteur d’évangiles », dont on salue la course. Ainsi appelait-on le messager qui courait annoncer une victoire dans la bataille ou l’avènement d’un roi, et qui recevait pour cela, une gratification.

Le messager imaginaire dans cette prophétie d’Esaïe, annonce ceci : Dieu revient à Jérusalem, avec les exilés. Il va s’y établir en roi de paix, selon la formule rituelle d’intronisation royale. Et toutes les nations, naguère ennemies, seront témoins de l’œuvre libératrice de Dieu, du salut de son peuple. Jérusalem est donc invitée à se réveiller et à se revêtir d’une nouvelle force et de ses habits de fête car Dieu va délivrer gratuitement Israël de cette captivité pour que son Nom ne soit plus outragé mais célébré et sanctifié au milieu de son peuple.

En esprit, Esaïe voit les messagers qui traversent les montagnes de Juda pour apporter à Jérusalem la nouvelle de la délivrance des exilés ainsi que les sentinelles qui annoncent leur arrivée avec des cris de joie, 52:7-10.

Finalement, Esaïe exhorte les exilés à profiter de cette délivrance accordée par Dieu ( au travers de Cyrus ) pour quitter Babylone et ramener avec eux à Jérusalem les ustensiles du temple, 52:11. Leur retour sera une marche de triomphe sous la conduite de l’Eternel, 52:12.

Cet avènement de Dieu dans notre humanité longtemps prédit par les prophètes et longtemps espéré et attendu par les nations, se réalise.

L’Évangile de Matthieu commence par situer clairement l’événement dans l’histoire, en des temps et lieux bien précis. On n’est pas ici dans un récit purement légendaire bâti pour donner libre cours à l’imagination et à la piété populaire. Même si l’important est dans l’enseignement spirituel qui en découle, ce qui nous est rapporté ici n’est pas sans fondements. Jésus, nous est-il dit, était né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode (Mt 2,1).

Alors que jusque-là, les élites du pays étaient déportées, ce sont des élites du pays voisin, les rois mages ; qui viennent en Israël annoncer la naissance du nouveau Roi : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? En effet, nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus pour l’adorer.. ».

Alors que les arrivées de puissance étrangères étaient signes de domination, ces prêtres, ces gens importants de pays voisins, non seulement viennent en paix, mais viennent se soumettre au roi des juifs. Les rois mages instaurent une autre relation à l'étranger que cette vision guerrière.

Dans le récit de Matthieu, la venue des Mages, annonce la portée universelle de l’évènement. Le bonheur qu’apporte le nouveau roi est universel et inclusif. Ce sont des païens qui se présentent à Jérusalem, cherchant le roi des Juifs. Ce sont eux qui reprennent la route alors que Jérusalem ne bouge pas, ce sont eux enfin qui entrent dans la maison et adorent l’Enfant.

Les Mages venus de l’Orient sont des savants, perses ou babyloniens, probablement astrologues, qui ont pu avoir contact avec le messianisme israélite à Babylone. À travers eux, c’est le monde entier qui se met en marche vers le Christ, Messie, c’est l’univers des païens qui se tourne vers la lumière de l’Évangile.

Frères et sœurs, ce qui se qui se joue dans ce récit que rapporte Matthieu, ce n'est pas seulement un renversement des relations d'Israël et des étrangers. Ce n'est pas tant qu'Israël deviendrait dominant sur l'étranger alors qu'il a été dominé jusque-là. Ce n'est pas un renversement, c'est un changement de regard : vous étiez obsédé par la peur de la domination étrangère, arrêtez, ce n'est plus le cas. Regardez ce qui se passe, ce qui se vit entre Jésus et les mages : d'autres relations d'échanges, d'amour, de respect peuvent s'instaurer avec l'étranger. Les mages ont rendu visible la naissance de Jésus, ils ont semé des graines de l’ouverture, ils ont fait des gestes qui ont frappé les esprits. Ils préfigurent l’humanité entière marchant vers l’étoile du Seigneur, ce Christ qui va pouvoir se proclamer Lumière du monde (Jean 8,12 ; 12,46).

Une fois de plus, frères et sœurs, c’est Dieu qui a tout conduit. C’est lui qui, au moment favorable, a choisi de s’incarner parmi nous. Et c’est lui qui, aujourd’hui, en ces jours qui sont les derniers, a envoyé son étoile pour conduire depuis le lointain Orient des hommes, vers ce Fils, reflet de sa gloire (He 1,2-3), pour l’heure, encore silencieux, dans la précarité de l’étable mais qui n’en est pas moins Parole de Dieu incarnée. (Jean 1,1-2).

Désormais chacun, chacune de nous peut, s’il le veut, marcher à sa suite. Lui offrir sa vie. Écouter sa Parole qui est Lumière et Vie, l’aimer jusqu’à l’adorer car il est le Seigneur de la gloire (1 Co 2,8). Il est toujours là, comme à Bethléem, dans la maison de notre âme (Mt 2,11). Il nous accueille. On le reçoit. On le porte et il nous porte. On est tout illuminé, pacifié, réjoui de sa présence. Il est la vie de nos vies. On peut lui offrir nos trésors. On ne perd rien à répondre par le don de sa vie humaine et mortelle à un Dieu qui nous a aimés par le don de toute la sienne, divine et éternelle.

Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, les Mages se comportent en explorateurs. Ils se sont mis en route, ils suivent l’Etoile, ils ne savent pas, ils rencontrent, questionnent, sont ouverts et ouvrent. Ils savent quitter, rencontrer, avancer, prendre des risques. Ils connaissent la joie, ils donnent, ils adorent. Ils ne seront pas retenus, ils retourneront chez eux. Ils respectent le cadre établi pour ce qui leur apparaît être le bien de l'humanité.

Frères et sœurs, chaque fois que nous faisons confiance à ce qui advient, que nous jouons le jeu et que nous mettons en œuvre ce qui nous est proposé par la Parole de Dieu, nous nous ouvrons à la nouveauté du règne du Christ qui nous est donné. Chaque fois que nous laissons surgir la nouveauté, et que nous désirons que cela change, nous laissons advenir un sens nouveau dans notre vie.

Les mages peuvent repartir par un autre chemin. Ils ont accompli leur mission en allant jusqu’au bout de leur route : nous conduire auprès du Dieu fait humain. Quand on a reconnu dans le Christ Jésus, le Sauveur du monde, tout le reste passe en second.

Hormis Jésus, le nouveau-né, personnage central de notre Evangile, il y a le roi Hérode jaloux de son pouvoir. Ce roi Hérode, bien connu des historiens, est pour l’évangéliste Matthieu le symbole du refus d’accueillir le Christ et son message. Ainsi, c’est tout le destin du Christ qui nous est présenté en raccourci dès le prologue de Matthieu : accueilli par les hommes de bonne volonté, Jésus sera rejeté par les responsables de son peuple.

Hérode convoque les prêtres juifs pour savoir une chose : où a lieu la naissance. Aux yeux de ses contemporains, Hérode pouvait donner l’impression de régner en maître, soutenu qu’il était par le pouvoir romain. Il va effectivement s’illustrer dans l’histoire en perpétrant l’effroyable massacre des enfants innocents. Mais, suggère déjà Matthieu, ce n’est qu’un petit roi, marionnette. Le vrai roi de l’univers, et pas simplement des juifs, est ailleurs. À la seule évocation de sa naissance, pris d’angoisse, Hérode tremble de peur. Pourtant, ce bébé, n'a pour tout palais qu'une étable. Il n'a pas d'armée. Il ne va avoir pour toute richesse que ce que vont lui laisser les rois mages.

Hérode s'attend-il à une confrontation violente ? Armée ? Une révolte des bergers ? A une révolte populaire ? A l'assaut d'une armée formée d'anges et de mages ?

Le roi Hérode cherche à garder la maitrise des choses, choses qui ne cessent de lui échapper, il est fermé sur lui-même, sur sa vision, son pouvoir, qu’il ne cesse de sentir menacé. Alors, pour se maintenir, il se rapporte faussement aux données, il cherche à bricoler, il fait preuve de manipulation, il rencontre dans le secret, il fait preuve de duplicité, il ne manquera pas d’être violent...

Frères te sœurs, le vrai pouvoir de Jésus qui nous est né dans l’étable de Bethlehem est de l'ordre du ressenti, du changement de regard sur le monde et sur ce qui est important dans le monde. Et pour changer le monde ainsi, ce qui compte, ce n'est pas la confrontation immédiate, ce n'est pas le rapport de force : c'est le temps. Chaque fois que nous prenons cette position de rapport de force, de maîtrise, en mettant en avant notre propre point de vue de manière exclusive, nous courrons le risque de la manipulation. Notre parole n’est plus droite, nous rétrécissons dramatiquement le sens de notre vie à notre réussite illusoire...C'est compter sans la force du temps que nous donne Dieu. Notre amour est le plus fort et le plus subversif des pouvoirs alternatifs quand il sait qu'il peut compter sur le temps de Dieu.

Frères et sœurs, Noël 2016, c’est faire route vers la lumière que le Messie, Dieu fait homme nous apporte. Il est le Pasteur, le Berger qui s’offre à nous. Devant les hostilités de la vie et dans un monde de la confrontation et l’immédiateté, le nouveau-né nous rappelle que nous, nous avons la force du temps : le pouvoir le plus subversif que donne l’Evangile. Hier, aujourd’hui et pour toujours, ton Dieu règne ! Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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