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Eglise Protestante Unie de Narbonne

dimanche 14 novembre 2021 : Marc 13, 24-37

16 Novembre 2021, 21:08pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Marc 13,24-37

Pasteur Philippe Perrenoud

 

En ces jours là, après cette détresse, le soleil s’obscurcira, la lune ne brillera plus, etc.

De tous temps, l’humanité a vécu avec des peurs… Qui n’a jamais eu peur, évidemment…

Des peurs, de tous temps... en particulier lors de moments charnières de vie. Comme en ce moment, d'ailleurs, à l'approche d'une campagne électorale...

 

A l'époque de Jésus, le monde était encore plus qu'aujourd'hui rempli de sujets de peurs fortes, réelles ; un registre supplémentaire était (depuis longtemps d'ailleurs) quant à la fin des temps !... Comme une sorte de film catastrophe, en pire, car menaçante pour tous, avec des images extraordinaires et terrifiantes…

Or ce qui est le plus extraordinaire, c'est Jésus ne nous présente pas la perspective de la fin des temps comme une série de catastrophes… et encore moins pour des catastrophes… Il ne les utilise pas, à des fins personnelles, intéressées...

Il nous dit qu’il y en aura ; ça nous le savons.

Et ce qu’il dit au début du passage d’aujourd'hui sont des citations plus anciennes que lui…

Il le sait bien, et ses interlocuteurs aussi ; et il sait que ses interlocuteurs savent… que ce n’est pas nouveau... Alors pourquoi le dit-il ? C’est justement là que c’est plus intéressant, et plus nouveau !

Dans quelle perspective nous dit-il cela ?

De quelles perspectives nous parle-il ??

Il prend une comparaison de vie : le bourgeonnement.

La venue du Fils de l’homme est une venue de vie, et non de peurs… C’est beaucoup moins spectaculaire que des images sur la fin des temps ; tellement plus quotidien, tellement plus constructifs pour nos vies, à chacun et à chaque instant…

 

Il ne s’agit pourtant pas de se rassurer à bon compte…

par une Grâce « à bon marché »...

ou par une Grâce qui consisterait à faire n’importe quoi…

Comment savoir alors qui est au bénéfice de cette Grâce, de ce Salut ?

Comment le savoir, l’entendre, le comprendre ?...

 

Et est-ce que, même pris comme une perspective de vie, cette annonce de la fin des temps donnerait raison à ceux qui cherchent dans différents mouvements religieux une fuite, un scénario tout tracé ?

Ou qui voient là une bonne dose de naïveté, ou même de crédulité dépassée...

Car à première lecture, le passage suggéré pour ce dimanche nous livre effectivement un certain nombre de difficultés, et même d'obscurités : le Christ annonce une apocalypse pour cette génération ; or nous y sommes toujours... Ou même pire encore : il semble se contredire lui-même, puisqu'il ajoute aussitôt que nul ne connaît ni le jour ni l'heure...

 

Pourtant, dans ce chapitre 13, Jésus nous livre plusieurs signes. Les disciples le questionnent, le poussent à tenir un discours sur la fin des temps. Cette demande concerne les indices précurseurs ; comme avec la question, au début de ce chapitre : quel sera le signe que tout cela va finir ? Est-ce une façon de se rassurer, en se disant que si on connaît le début de la fin, on peut s’y préparer ? Un peu comme si on pouvait connaître le moment d’un accident de la route, pour ne mettre la ceinture de sécurité qu’à ce moment là... Ou, de façon pire encore : que ce monde est tellement difficile et négatif qu’on a hâte d’en connaître la fin : comme un suicide collectif gigantesque ... La foi serait-elle aussi terrible que cela ?

Alors faudrait-il ainsi obéir sous la menace ? D'autant plus que nous sommes avertit... Faut-il alors voir dans tous les malheurs de la terre, autant d’images de la colère de Dieu ?... Certains n’hésitent guère à le faire... Et il n’est pas rare que cela glisse subrepticement vers des délires ou intolérances intégristes, terroristes, et autres sectaires...

Bref, face à cela, nous avons envie de donner des explications historiques et rationnelles. Certes, mais ce serait également une erreur de tout repousser trop vite... Dès que quelque chose nous gène, nous avons tendance à évacuer (et cela correspond également assez bien à un fonctionnement actuel)...

Et pourtant cette dimension des temps, avec leur « fin», fait bel et bien partie de notre foi chrétienne, et de nos vies.

Nous vivons chacun facilement dans l'illusion du définitif. Or, il faut si peu de choses pour que tout bascule, parfois très vite. Nous ne pouvons jamais être sûrs de grand chose.... L’appel à la vigilance est déjà en soit une parole de Salut.

En réalité, nous avons toujours besoin que nos limites nous soient rappelées ; nous avons toujours besoin de rappels que nous évoluons dans le provisoire (voir grâce au provisoire...).

Ce jour, cette heure désignent déjà des réalités qui sont hors de portée de tout calcul humain. De tout temps, des croyants ont tentés de spéculer sur le jour ou l'heure de la fin du monde ; ce qui est, à nouveau, la tentation de tout maîtriser, contrôler, là où il y a justement quelque chose qui nous marque une limite !...

Quelles leçons en tirons-nous alors ?

Car, finalement, ai-je vraiment besoin de connaître, même dans mon existence actuelle, par exemple, de connaît l'heure de ma mort ?? Pas moi ! Il me suffit de me souvenir que je suis mortel… De façon plus générale, pourquoi ne pas entendre le fait de veiller comme la volonté de s’inscrire dans une dynamique de vie ? sur le sens de nos vies ? A avoir la chance de se poser des questions.

La foi nous recommande de rester éveillés pour que, le jour où l’épreuve (quelle qu'elle soit...) viendra, elle ne nous prenne pas au dépourvu. Ne voyons-nous pas des gens qui malheureusement ne tiennent pas sous le choc de ce qui leur arrive ?

Car il ne s'agit évidemment pas d'un appel à nous préparer à la mort !... mais à vivre... avec/grâce à notre condition et aux perspectives qui nous sont données.

Il s’agit même pas d'un appel individuel ; la suite du récit parle bien d’une tâche communautaire dans un monde qui nous est confié.

Cette perspective nous rappelle qu’il y a des repères au-delà de ce que nous voyons, dans le temps : et aussi, alors, communautairement : nous pouvons toujours construire nos vies et nos sociétés avec des murs. Mais il y a une perspective qui nous dépasse tous ; qui nous dit aussi, que nous sommes tous dans la même barque !...

Puisque nous ne connaissons pas l'heure, que nous ne pouvons la connaître, cela signifie aussi que nous n'avons pas à nous poser cette question, finalement assez inutile. La vie n’a-t-elle pas bien davantage de poids et de valeur en vivant chaque jour comme si c’était le dernier... ?

Bien plus : alors que tant de gens faisaient (et font toujours...) des suppositions, qui occupent tellement d’énergie pour rien..., Jésus nous dit : il existe une fin, mais ce n’est pas encore notre problème ! Notre problème, pour l’instant, est bien plutôt de nous occuper du domaine qui nous est confié...

Ce passage, et les versets qui suivent, passent donc du futur au présent...

Un appel à être vigilant, donc, mais non passif : se donner les moyens de remplir le temps autant qu'il est possible.

Cela fait peut-être partie de ces principes chers aux protestants, avec leurs lots de culpabilisations possibles... car basés sur la responsabilité, vers laquelle s’ouvre les derniers versets de notre passage.

 

Alors qu'est-ce que cela nous dit de Dieu et de son rôle ? Un Dieu qui, dans le cycle de vie de ce monde, nous donne des signaux. Il nous rappelle alors notre rôle à la fois limité, parce que marqué dans le temps, et immense parce que dans la responsabilité. Un appel à la confiance donc malgré les difficultés : il y a une fin qui nous dit aussi une justice.

Ne pas nous rassurer à bon compte donc, d’une manière ou d’une autre ; mais prendre le monde tel qu’il est, et l’Evangile aussi :

l’un (le monde) est rempli de défis ;

l’autre (l’Evangile) n’est pas un scénario catastrophe ou un chantage, mais une Bonne Nouvelle, qui nous apporte une confiance. Une confiance qui n'est pas là pour nous endormir, pas plus qu'elle pourrait nous faire suivre une voie toute tracée de revendeurs exclusifs (sectaires). Ne pas nous endormir (au risque de se culpabiliser) parce que nous sommes toujours dans le provisoire. Et que nous avons bien besoin qu'on nous le rappelle de temps en temps...

 

Malgré toutes les apparences qui pourront se présenter, l’obscurité, le froid, la vie qui semble bloquée, comme en hiver, elle n’en restera pas là !... L'avenir offert par la foi n’est pas synonyme de catastrophes ; celui des hommes peut-être, parfois... Mais l’avenir de Dieu est annoncé comme un été : récolte, douceur, chaleur, etc. Devant nous, au delà des moments froids et tristes, durs, il y a des merveilles : tous bourgeonnements, pour celui qui a le cœur et les yeux ouvert, peut devenir une parabole du Royaume qui vient.

 

Amen.

 

 

 

 

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