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Eglise Protestante Unie de Narbonne

Dimanche 2 juillet 2022 : Luc 10, 1-12,17 "comme une bonne odeur..."

2 Juillet 2022, 18:32pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

NARBONNE

 

3 JUILLET 2022

 

LUC  10, 1 – 12, 17
« Comme une bonne odeur… »

 

Introduction : Nous, nous sommes de « icissiens », selon le mot inventé par Djamel Debbouze. Je veux dire, nous sommes d’ici, et tellement d’ici, que nous y sommes quasiment des sédentaires indécrottables, collés à notre petit bout de paradis méditerranéen. Partir ? Aller ailleurs ? Dis, tu rigoles ! On est trop bien dans notre petit pré carré paisible et ensoleillé… Pas la peine de m’appeler Abraham ou Abrahama, Seigneur, ça ne marchera pas…

Pourtant, en quelques versets, voici ce que Jésus adjoint à ses disciples : allez, annoncez la paix, annoncez que le royaume s’est approché. Devenez des colporteurs de la Parole et du Royaume de Dieu.

Remarquez, question « paradis paisible et ensoleillé », nous aurions beaucoup à dire et à partager ! N’est-ce pas ce que nous vivons dans ce lieu immatériel qu’est notre foi, avec nos frères et sœurs, ici, aujourd'hui, à Narbonne, dans ce temple de l'Église protestante unie ?

Nous venons de commémorer la Pentecôte, l’Esprit de paix, l’Esprit de lumière, l’Esprit d’unité et de communion, force ventilée, si j’ose le dire ainsi, d’un amour qui se diffuse comme une flamme incandescente en chacune, chacun de nous. Ce paradis-là, ce lieu des cœurs, qu’il serait judicieux de le faire connaitre ! Qu’il serait délicieux pour beaucoup de nos concitoyens d’en franchir les portes toutes grandes ouvertes… Oui, mais comment ?

Commençons par poser notre texte dans son contexte, puis examinons ce qu’ont vécu les disciples. Et puisque nous en sommes, je veux dire, des disciples, comment recevoir l’injonction de Jésus en 2022, dans une modernité qui trace un gouffre entre les habitudes sociales du premier siècle et celles qui sont vécues de nos jours ?

 

  1. Contexte : Le contexte est quelque peu déroutant car dans Luc, l’envoi en mission est raconté deux fois : d’abord l’envoi des Douze au chapitre 9 puis celui de 70 (ou 72) disciples anonymes dans notre lecture : peut-être une référence rabbinique à Genèse 10 qui « présente la table des 72 peuples de la terre[1] ». Matthieu, quant à lui, fusionne les deux envois. Il est probable que Luc, pour sa part, a disposé de deux sources : l’Évangile selon Marc et aussi ce qu’on appelle la « source Q », « Q » pour « quelle » en allemand qui veut tout simplement dire « source », (…) et qui serait un évangile presque tout en maximes, en paraboles, en discours de Jésus [2]». En tout cas, ce deuxième envoi, celui des anonymes, pourrait bien dépeindre celui de l’Église tout entière et mettre en exergue l’universalité de la mission. C’est dire que nous voilà, nous aussi, embarqués dans cet envoi !

 

  1. Les disciples : Mais commençons par les premiers disciples. Ça ! Pour une surprise ! y a de quoi en tomber le bas du dos par terre ! C’est tellement magnifique de suivre Jésus, d’assister à toutes ces guérisons, d’écouter les paroles d’exhortation qui boostent et remettent debout, qui entrouvrent la porte du Royaume de Dieu et de toutes les bénédictions qui l’accompagnent. Suivre Jésus, malgré les embuches des routes, avec parfois la faim au ventre, la soif dans la gorge, les yeux empoussiérés et tout ce qui a construit un galiléen de l’époque, oui, suivre Jésus, qu’est-ce que c’est bon. C’est d’autant plus bon que c’est lui qui fait tout ! Nous, on le suit et on profite.

Et paf ! paf ! paf ! Regardez ce qui leur tombe dessus. Jésus, l’air de rien, connait tout son petit monde. Enfin, quand je dis « petit », ils étaient quand même nombreux celles et ceux qui ne le quittaient pas d’un « digitus », je veux dire d’un pouce. Et lui, jour après jour, a su que parmi ses compagnes et compagnons de route, certains avaient des possibilités insoupçonnées : ils étaient en mesure, comme les apôtres, d’aller devant lui annoncer la venue du règne de Dieu. Peu importe les études, exit les savoirs rabbiniques, pour être son envoyé(e), c’est dans le cœur que cela se passe. Du coup, des cœurs battant pour le Seigneur, il n’en manque pas autour de lui. Il y a lu et discerné des capacités de partage, il a vu sourdre dans les regards et les conversations, des aptitudes au témoignage. Alors ? « il en désigna 72 autres et les envoya devant lui, dans toute ville et en tout lieu où lui-même devait se rendre ».

Le texte ne parle pas de la réaction à chaud des 72 volontaires désignés d’office. Nous ne savons pas ce qu’ils ont pu penser de cette mission inopinée, ni de leurs commentaires devant Jésus ou entre eux, une fois désignés.

Ils s’en vont « sans argent, ni sacs, ni sandales » avec un ordre de marche péremptoire : « y aller franco sans faire de chinoiseries en chemin, partager la paix du Christ avec qui en veut, guérir, témoigner du Royaume, et aussi blackbouler publiquement les réfractaires à leur message et les laisser éternuer dans leur poussière, après tout c’est la leur, et puisqu’ils en veulent…

Ils y vont donc. Et nous les retrouvons au moment de leur retour tout joyeux, volubiles, racontant tout ce que le Seigneur leur avait donné de pouvoir faire : « même les esprits mauvais nous sont soumis en ton nom » relataient ils avec peut-être étonnement et délice.

Bref, les disciples ont témoigné avec succès. Ceux-là, certes, l’ont fait et des myriades de myriades après eux. Mais qu’en est-il pour les disciples d’aujourd'hui ?

 

  1. Quel sens pour nous ici aujourd'hui : Aujourd’hui ? Qui sont les disciples ? Comment recevoir et forcément transposer l’envoi évangélique à notre mode de vie 2022cien (je peux inventer un mot moi aussi ?) ici, en France, où la laïcité négative élève un mur anti-témoignage dans la mentalité de nos concitoyens à la majorité incroyante ?

Cependant, entre les contemporains de Jésus et les nôtres, il me semble que la différence est ténue : les humains vivent toujours les mêmes joies et les mêmes peines, les mêmes combats, les mêmes victoires et les mêmes défaites. Ils espèrent toujours un monde meilleur pour eux et pour leurs semblables. Partout sur la terre sévissent des guerres qui anéantissent la vie, des maladies qui plongent dans la souffrance des corps à bout de souffle, et conduisent même à la mort, souvent prématurée. Mais aussi, et vous savez combien je tiens à regarder la moitié pleine de la bouteille, (après tout, avec un fond de cette bouteille là, si c’est du muscat, on peut se faire un bel apéro !), et dans cette moitié pleine, je vois des millions de bonnes volontés solidaires, engagées dans l’accueil, le partage, le soin, sans compter temps et ni ce qu’il y a dans le porte monnaie. Au sein de cette foule innombrable, il y a l'Église, et nous, pierres vivantes du temple qu’est cette Église. Comme les disciples, à la suite de Jésus, nous sommes nourris, exhortés, boostés par la Parole. Certains sont même transportés par la force de l’Esprit pour témoigner et guérir !

L'Église, cette maison universelle, avec ses qualités et ses défauts, avec ses robinets qui fuient, ses volets qui claquent, son carrelage parfois glissant, quelques tuiles qui laissent passer l’eau sur le toit quand il pleut, bref, une maison quoi… mais c’est la nôtre, et c’est aussi nous ! Et franchement, quelle différence avec les disciples au temps de Jésus ?

Alors, si nous ne sommes pas tous qualifiés pour être « envoyé(e)s » par les routes et les chemins, il n’empêche que chacune, chacun de nous est dépositaire d’un trésor à partager, de la paix du Christ qui nous habite et qui, comme si nous étions un diffuseur de parfum, peut exhaler sa douce plénitude vers l’extérieur et pénétrer les narines (spirituelles évidemment) de celle ou celui qui la respire. Celui qui fournit le parfum, c’est l’Esprit. Aucun souci à se faire donc, il s’attache sans compter et en tout temps à faire le plein dans le diffuseur. Et nous, ce qui nous incombe c’est tout simplement d’entretenir bien ouverts les trous du diffuseur ; nous disposons de tous les outils nécessaires à commencer par ce que nous sommes, chacune, chacun tels que nous sommes. Puis, nous pouvons ouvrir notre Bible, traduite dans toutes les langues et y puiser force et assurance. Il y a aussi les temps de culte, la Parole annoncée, les milliers de partages et commentaires disponibles sur papier, et dans tous les médias, et à profusion sur internet. Et le plus précieux des dons, ce sont les dons en hommes et femmes qualifié(e)s qui se mettent à notre service pour travailler avec nous à l’entretien et même intervenir en cas de panne. Je suis sûre que vous disposez probablement d’autres outils encore pour garder le diffuseur opérationnel. Par exemple, un sourire, une main tendue, un regard d’accueil, une parole réconfortante… la liste n’est pas exhaustive. Vous le constatez, peu importe notre âge, nos capacités physiques, notre lieu de vie, toutes et tous nous sommes à même de répondre à l’envoi du Seigneur.

 

Conclusion : En conclusion, acceptez que je partage avec vous mon intime conviction. Elle se traduit par un spectacle qui est devant mes yeux, permanent et tellement joyeux. Je vois la grande table du banquet du Seigneur à laquelle nous sommes toutes et tous conviés : là, un repas nous attend, un repas qui, comme lors de la multiplication des pains, est sans cesse renouvelé, chaque plat sitôt servis, sitôt remplacé. La grâce, le salut, l’espérance du Royaume, l’assurance tangible et irréfragable d’un amour inconditionnel qui me porte, et parfois même me transporte, des fruits à profusion dont les vitamines stimulent et dynamisent les cœurs, vous savez, ces fruits que l’Esprit distribue à satiété et ont une double vocation : nous fortifier, maintenir la lumière allumée et du coup, éclairer celles et ceux qui sont autour de nous. Et nous, devant ces agapes, nous sommes rassasiés, récepteurs de ces dons de la bonté divine. Vous voyez vous, là, une assiette bien garnie dans la main, papotant à droite et à gauche en offrant votre assiette au partage ? Comment pourrions-nous ne pas en offrir tout autour de nous et devenir à notre tour diffuseurs de tous ces délices ? N’est-ce pas ce que nous allons faire tout à l’heure pendant l’apéritif partagé ? Ce que nous faisons ensemble, en paroisse, je ne doute pas que nous puissions le faire ailleurs pour le plus grand bonheur de celles et ceux que la vie nous fait côtoyer. A table et au boulot ! Amen !

 

[1] Tassin, Hervieux, Cousin, MArchadour Les Evangiles textes et commentaires p.677

[2] Marguerat, Norelli, Pffet Jésus de Nazareth nouvelles approches d’une énigme.

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