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Eglise Protestante Unie de Narbonne

predications

Jean 1, 1-18: Prédication du 25 décembre 2017, fête de Noël

26 Décembre 2017, 18:58pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

 

Jean 1, 1 à 18

 

Voici un noël sans crèche, sans enfant Jésus, sans bergers, mages  ou anges. Sans même l’évènement d’une naissance. Sans doute ceci nous permet il de remettre noël dans le «  droit chemin », loin des scories folkloriques et plus loin encore des dérives commerciales, celui de l’évènement « Jésus-Christ ».

Chacun des évangélistes débute son récit en annonçant à sa façon l’évènement Jésus. Les récits d’enfance, s’ils ont des choses à nous dire n’existent que chez deux évangélistes et sont des récits de tradition tardive.

Jean Commence son évangile par un hymne magnifique. Dernier des évangélistes, il est fortement marqué théologiquement, influencé par le gnosticisme. Il nous livre un hymne dont l’origine est du judaïsme héllènistique.

Comment le commenter ? comment le faire sans dénaturer sa poésie ? Alors que ce texte est comme une confession de foi ?

«  Personne n’a jamais vu Dieu. Jésus , fils unique qui est dans le sein du Père nous l’a révélé »

Cette révélation de Dieu, c’est Noël même. Dieu se révèle dans l’enfant de la crèche .

Cf. Paul Tillich  « Le salut est un enfant ». L’enfant est déjà là, mais pas encore, dans le sens où il recèle toute la potentialité du développement à venir. Il en est de même pour le salut.

Ce salut est développé dans le prologue sous bien des aspects, nous en retiendrons trois :

-Le commencement

-La Parole

-La lumière

 

1°) Le commencement.

 

 a) « Au commencement » renvoie à Genèse 1. Le même mot grec est employé dans la septante traduction  grecque du premier testament.

L’affirmation suggérée est double :

-En Jésus –Christ un monde nouveau nait.

Jésus comme Dieu préexiste à toute création. Théologie élaborée propre à Jean ; «  Je suis sorti d’auprès du Père et je suis venu dans le monde » Jn 16, 28.

Paradoxe même du Christianisme en la notion d’incarnation. Dieu dans notre humanité .

En termes Tillichiens : comment l’infini ( de Dieu), peut-il se manifester dans la finitude ( d’un homme). Révélation essentielle qui distingue la foi chrétienne des autres religions. Ces arguments théologiques semblent bien loin de nos préoccupations. Pourtant, si Dieu s’est fait homme, l’humanisme est absolu. L’homme est image de Dieu. Que Dieu se soit manifesté en notre humanité lui donne une dignité infinie. La relation à l’autre est transfigurée en tant que relation à une image de Dieu.

 

b) Le commencement fait également référence à une nouvelle création «  toutes choses nouvelles » Comme lors du déluge, on s’attend à un monde « épuré ». « Tout va changer ce soir » chantait un de nos contemporains. Pourtant à regarder notre monde, si beaucoup a changé dans ce qu’on nomme développement  et parfois de façon catastrophique, rien n’a changé dans la barbarie humaine !

On est renvoyé ici au thème de l’accueil «  Le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu dans son propre bien, mais les siens ne l’ont pas reconnu ». Le renouvellement du monde est rendu possible par la venue de Jésus-Christ, de Noël, mais les hommes doivent l’accueillir. Noël doit être accueilli comme une possibilité de transfiguration de notre monde. En Jésus, nous savons ce qui est à accomplir, encore faut-il nous mettre en marche. C’est aussi l’idée du Royaume déjà là et pas encore parce qu’il nous revient de l’accomplir. Théodore Monod disait  «  Le Christianisme n’a pas échoué, nous ne l’avons pas encore essayé. » Essayons le ! Noêl n’est pas une sorte de 14 juillet biblique à célébrer comme une vielle histoire, mais une invitation à nous mettre en marche. Jésus-Christ n’est pas seulement notre passé, il est notre futur.

 

2°) La Parole

 

  Elle est éternelle dit le texte c’est-à-dire hors du temps. C’est ce qu’exprime le verbe « être »du premier verset. On trouve ici une personnalisation du logos, du Verbe, de la Parole qui en fait une entité indépendante comme ailleurs la Sagesse.

Cette entité se confond toutefois avec Dieu lui-même comme «  l’ange du Seigneur ».  «  Le verbe était tourné vers Dieu, le Verbe était Dieu »

Et un second caractère est qu’elle est créatrice v 3 à 5 «  tout advint par elle » On est une nouvelle fois renvoyé au livre de la Genèse où le tout est symbolisé par «  le ciel et la terre » et la Parole créatrice par le « Dieu dit »

La Parole, toute parole, est créatrice y compris les nôtres. Les objets que nous ne nommons pas n’existent pas et de même nous nommons des objets qui échappent à nos sens mais que nous considérons comme existants. Mais nos paroles ne sont que de pâles reflets de la Parole. On parle volontiers  de     «  Parole de Dieu » et l’on dit que la Bible est la Parole de Dieu ! Mais la Bible est un recueil de livres et ceux-ci ne deviennent «  Parole de Dieu » que si on se les approprie. La Parole de Dieu est dans la Bible à condition de lui donner vie dans nos existences individuelles et en Eglise.

« L’écriture seule » devrait être entendue comme  «  la Parole seule » et non comme une «  religion du Livre. » En effet «  La Parole s’est faite chair et elle a habité parmi nous ». La Parole n’est pas un livre, la Parole est une personne, Jésus-Christ, personne dont nous trouvons des témoignages dans un livre . Témoignages qui, s’ils nous engagent, deviennent Parole Vivante.

 

3°) La Lumière

«  En toi est la source de la vie, par ta lumière, nous voyons la lumière » dit le Psaume 36. » «  Ne plus voir la lumière »  c’est mourir affirme le psaume 49. «  Ta Parole est une lampe sur ma route » dit le psaume119 réunissant ainsi nos deux concepts.

La lumière permet de diriger sa vie. Sans elle pas de possibilité d’aller dans la bonne direction si la vie est comparée à une marche.

La disparition progressive de la lumière en hiver a constitué sans doute une source de terreur pour l’humanité primitive pensant qu’elle allait disparaitre à jamais. La fête du solstice d’hiver a laquelle s’est raccrochée Noël nous le montre. Pourtant là aussi, le paradoxe de la condition humaine se manifeste . « La lumière brille et la ténèbre ne l’a pas saisie. » Les versets 7 à 12 soulignent ce refus. Jésus est comparé à la Lumière du monde. « Celui qui vient à ma suite ne marchera pas dans les ténèbres ». Mais cette lumière est trop éblouissante et les hommes la refusent. La perfection humaine de Jésus semble impossible à atteindre et les hommes la rejettent. L’image des ténèbres me fait penser fait penser au refus des hommes plus préoccupés par la recherche de la richesse que celle de l’Amour.

 

Noël est l’invitation à nous saisir de cette lumière, à faire qu’elle éclaire nos vies, guidées par la Parole, vers un nouveau commencement. L’affirmation essentielle est que nous ne sommes pas seuls. Dieu est venu nous offrir «  grâces sur grâces » «  La grâce et la Vérité sont venues en Jésus-Christ. » Grâce et vérité doivent être accueillies et vécues pour le Royaume qui est déjà là mais que nous devons aider à faire advenir.

Noêl est un jour de choix existentiel, celui de savoir si nous continuons à vivre dans les ténèbres ou choisissons de suivre l’enfant de Bethléem et « devenir enfants de Dieu ». Cet enfant, s’il fut derrière nous dans l’histoire, est avant tout devant nous. Etre chrétien c’est être dans l’attente de son retour, non dans une attente passive et béate, mais une marche difficile dans ses pas et qui se nomme espérance.

 

Jean Pierre Pairou

25/12/17

 

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Luc 1, 26-38 Prédication du 4e dimanche de l'Avent , le24 décembre 2017

26 Décembre 2017, 18:52pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

 

Texte biblique : Luc 1 : 26-38

 

  

Chers frères et sœurs, aujourd’hui dernier dimanche de l’Avent, nous assistons à un dialogue intéressant entre le messager de Dieu, Gabriel et Marie. Le messager est porteur d’une bonne nouvelle, un message de joie !

Selon son habitude, Luc commence par bien situer ce passage dans le temps et l’histoire, en précisant l’époque, les circonstances historiques et les personnages concernés. Cependant je précise que nous sommes là devant un récit de foi et non devant un fait rationnel avec cette belle formule de Luc mise dans la bouche de Gabriel : « car rien n’est impossible à Dieu ».

Le messager Gabriel est envoyé à Marie le sixième mois après la conception de Jean-Baptiste.

Nous sommes donc toujours « aux jours d’Hérode, roi de Judée » (Luc 1,5). L’action se déroule en Galilée, dans le village de Nazareth. Jusqu'ici personne n'avait entendu parler de Nazareth ! Nazareth, petit village sans importance d'une province assez mal vue des autorités de Jérusalem. Tout ce qui venait de la Galilée était regardé avec mépris par les docteurs de la Loi. C'est là que le messager Gabriel est allé transmettre à une toute jeune fille le plus haut compliment qu'une femme ait jamais reçu : « Comblée de grâce » ; c'est-à-dire toute baignée de la grâce de Dieu, sans ombre.

 

Pas étonnant qu'à la fin de la rencontre, celle qui était si bien accordée au projet de Dieu ait répondu spontanément : « Je suis la servante du Seigneur. Que sa parole s’accomplisse pour moi. »

Entre ces deux phrases, l'histoire humaine venait de basculer : l'heure de l'Incarnation avait sonné. Désormais, plus rien ne sera jamais comme avant. Toutes les promesses de l'Ancien Testament viennent de trouver leur accomplissement.

Chacune des paroles du messager vient évoquer ces promesses et détailler l'une des facettes de l'attente du Messie telle qu'elle se développait depuis des siècles.

 

Nathan dans le second livre du Samuel au chapitre On attendait un roi descendant de David, ceci à partir de la promesse faite à David par le prophète7.C'est à partir de cette fameuse promesse que s'est développée toute l'attente messianique.

 

Dans cet évangile, c'est le centre des paroles du messager Gabriel : « Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son ancêtre. Il régnera sur la famille éternellement et son règne n'aura pas de fin. » (versets 32 et 33).

« Il sera appelé Fils du Très-Haut » : en langage biblique, cela veut dire « roi » ; en écho à la promesse que Dieu avait faite à David, chaque nouveau roi recevait le jour de son sacre le titre de Fils de Dieu.

Face à toutes ces annonces du message, la réponse de Marie est d'une simplicité extraordinaire !

On peut dire qu'on a là un bel exemple « d'obéissance de la foi », comme le dit l’apôtre Paul, c'est-à-dire de confiance totale.

 

Marie reprend le mot de tous les grands croyants depuis Abraham : « Me voici » ; comme Samuel avait su dire « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute » (1 S 3, 10). Elle répond tout simplement : « Je suis la servante du Seigneur. Que sa parole s’accomplisse pour moi. »

 

Le mot « servante » n'évoque pas ici la servilité, mais la libre disponibilité au projet de Dieu.

Il suffit de dire «Oui», « car rien n'est impossible à Dieu ». Grâce à ce « oui » de la jeune fille de Nazareth, « Le Logos, la Parole se fait chair et elle vient habiter parmi nous ».

 

Frères et sœurs, le regard de Dieu n’est pas celui des humains. Nous, nous jugeons selon les apparences, Dieu Lui regarde les cœurs (Isaïe 11,3). Nous, nous aimons si souvent ce qui est éclatant, hors du commun, extraordinaire… Dieu, de son côté, aime ce qui est humble, discret, petit… Ainsi Jésus, « doux et humble de cœur » (Matthieu 11,28-30), vrai Dieu mais aussi humain parmi les humains, ira s’installer plus tard non pas dans la prestigieuse ville de Jérusalem, mais à Capharnaüm, une autre petite ville inconnue de cette Galilée si peu appréciée par « les grands » de son époque (Matthieu 4,12-17)…

 

Oui, lorsque Dieu vient se faire chair dans notre histoire, il le fait donc au cœur de nos humbles réalités quotidiennes, dans une famille toute simple, habitant une ville toute simple, dans une maison toute simple, au cœur des activités les plus simples de la vie… Et Dieu agit toujours comme cela aujourd’hui…

Lorsque, pour croire en lui, les foules demandent à Jésus d’accomplir des choses extraordinaires, il se désole, car en fait, les foules sont aveugles : ces gens ont, en effet, sous leurs yeux, le Fils éternel de Dieu en personne ! Quoi de plus extraordinaire ? Et ce grand miracle de l’Incarnation se renouvelle à chacune des occasions les plus banales de nos réalités existentielles. Savons-nous le reconnaître présent en ces humbles signes ?

 

Consolons-nous, frères te sœurs : les disciples eux aussi ont eu du mal à reconnaître le Fils de Dieu en personne sous les apparences de cet humble menuisier de Nazareth et pourtant : « Qui m’a vu a vu le Père » leur disait Jésus (Jean 14,9). Mais comme tout le monde, les disciples étaient enclins au spectaculaire, à tout ce qui parait sensationnel ! Tels étaient les disciples de Jésus, tels nous sommes aujourd’hui. Cela nous encourage à persévérer à sa suite, lui qui est venu non pas pour les justes mais pour ceux qui sont en recherche.

 

L’évangéliste Luc nous dit que le messager Gabriel fut envoyé par Dieu dans un petit village appelé Nazareth auprès d’une jeune fille appelée Marie.

Frères et sœurs, on peut s’arrêter, s’étonner du désir de Dieu de nous rejoindre : oui Dieu veut nous rejoindre, se communiquer à nous, se donner à nous. Il y a l’étendu du monde, il y a l’étendu du temps et Dieu choisit un petit village de rien du tout, Nazareth et une personne particulière : Marie. Dieu n’aime pas en général mais dans le plus concret de l’existence. L’universel de son amour est concret : en venant vers Marie, c’est vers chacun, chacune de nous qu’il vient, en elle, Dieu rejoint les hommes et les femmes de tous les temps et de tous les pays. Cette dynamique de Dieu peut nous aider à aimer le quotidien de notre vie : ne pas chercher à trouver Dieu ailleurs que dans ce plus concret qu’il a voulu rejoindre ; regarder cela pour aimer davantage notre vie qui est lieu de Dieu.

 

La raison de la venue de Dieu est donnée par le nom de l’enfant : Jésus= Dieu sauve. Elle est donnée par : « le Seigneur est avec toi », l’autre nom de Jésus, c’est à dire l’Emmanuel.

Le temps de l’Avent peut être pour chacun de nous ce temps privilégié où nous exposons notre vie à sa venue pour qu’il vienne sauver ce qui a besoin d’être sauvé. Laisser monter en soi le désir du cœur, laisser monter à la conscience claire le désir peut-être enfoui que Dieu vienne sauver tel aspect de notre vie d’aujourd’hui ou de notre passé. Dieu ne veut et ne peut que donner que de bonnes choses, et la seule qu’il veut nous donner c’est lui-même : tu as trouvé grâce auprès de Dieu, sa vie t’est donné, tu es trouvé en lui pour ta joie et la sienne. Marie l’a compris car à la fin elle ne dit pas : je le ferai mais « qu’il me soit fait ». Oui, tout cela vient bien de Dieu, c’est sa marque ! Marie est toute disponible. C’est pour cela que Dieu a pu s’adresser à elle : « tu as trouvé grâce auprès de Dieu ». Mais cela ne veut pas dire qu’elle accepte tout sans réfléchir.

Il est beau de voir son réflexe lorsque le messager vient la saluer : « elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation » ! Aussitôt, elle cherche le sens, la signification de cette salutation. Il ne s’agit pas simplement d’un travail intellectuel. Elle veut saisir la portée des paroles qui viennent de lui être dites car elle pressent que ces paroles sont loin d’être anodines. Et voici la nouvelle inouïe : « Voici que tu seras enceinte. Tu mettras au monde un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ». Avant de dire « oui », Marie veut comprendre à quoi cela l’engage. Non pas parce qu’elle hésiterait à s’engager mais parce qu’elle veut s’engager avec toutes les fibres de son être. Elle ne voudrait pas d’un engagement à moitié. Pour cela, elle a besoin de mieux comprendre ce que Dieu attend d’elle.

Le messager lui répond. La réponse du messager est particulièrement éclairante : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi celui qui va naître sera saint, et il sera appelé Fils de Dieu. ».

Dieu ne veut jamais nous extorquer notre « oui ». Il nous veut vraiment libres. C’est aussi parce qu’il s’agit d’un engagement fait en toute liberté que Marie aura la grâce d’aller jusqu’au bout de ce « oui » dans toutes les difficultés, notamment au pied de la Croix. Par la suite, Marie ne reviendra jamais sur ce « oui » : « Que votre oui soit oui ». Marie n’est pas comme les vagues de la mer qui vont et viennent. A partir du moment où elle a la lumière suffisante sur ce que Dieu attend d’elle, elle acquiesce à sa demande. Bien entendu, elle ne mesure pas toutes les conséquences de son engagement. Heureusement que Marie n’est pas restée à tergiverser en voulant mesurer et maîtriser tous les tenants et aboutissants.

Cela peut nous paraître très simple. Pourtant que de questions se seraient pressées dans notre esprit !

Frères et sœurs, dans nos décisions, il y a tellement de choses auxquelles nous sommes attachés. Comme il nous en coûte de tout remettre entre les mains de Dieu ! Ces moments de décision sont souvent l’occasion de voir ce qui est le plus important dans notre cœur, ce qui a la priorité.

Ici, clairement, pour Marie, c’est Dieu qui prime sur tout. Combien de peurs nous paralysent ? Peur du regard et de la réaction des autres, peur du changement ou de l’inconnu, peur de ce que Dieu va nous demander, …

Pour nous aussi, frères et sœurs, dans le contexte culturel où nous vivons, la fuite de la souffrance apparaît souvent comme le critère suprême des choix. Mais il nous appartient de faire de notre vie une recherche de Dieu et non une fuite de la souffrance.

En ce temps de l’Avent qui nous conduit demain à Noël, allons donc à Jésus tels que nous sommes, offrons-lui tout et faisons lui confiance en remettant nos cœurs entre ses mains…

Comme pour ses Apôtres autrefois, il nous guérira petit à petit, il éclairera notre intelligence (Luc 24,31), il augmentera en nous la foi (Marc 9,24), il veillera sur elle au cœur même de ses défaillances (Matthieu 14,22-33 ) et il nous apprendra à reconnaître sa présence non pas hors de nos humbles réalités quotidiennes, mais au cœur de celles-ci. Dieu travaille en elles, par elles, avec elles C’est ainsi que Dieu aime habiter notre histoire et s’offrir à notre foi (Matthieu 24,24-25). Ainsi le Père est déjà là, dans le secret, lorsque l’on se retire dans sa chambre pour prier (Matthieu 6,6). Jésus, de son côté, nous a promis de ne pas nous laisser orphelins : il viendra vers nous (Jean 14), de telle sorte qu’il sera avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde Matthieu 28,20)… De plus, peu avant sa Passion, il nous a aussi promis d’envoyer un autre Défenseur, l’Esprit de Vérité, pour qu’Il soit avec nous à jamais (Jean 14,15-18).

Ainsi, Dieu Père, Dieu Fils, Dieu Saint Esprit, tous les trois sont déjà là, présents à notre vie, et ils frappent à la porte de nos cœurs pour demeurer avec nous (Apocalypse 3,20 ; Jean 14,23)…

Chers frères et sœurs, en nous appuyant sur l’exemple du dialogue entre le Messager Gabriel et Marie, prenons le moment de demander à Dieu son aide pour que nous apprenions à lui dire « oui ». Demandons-lui de nous apprendre le sens des vraies priorités, à nous abandonner entre ses mains plutôt que de nous laisser conduire par nos peurs, à le chercher plus qu’à fuir la souffrance à tout prix.

Le « oui » à Dieu ouvre à tellement de bonheur pour nous mais aussi pour ceux qui nous entourent ! Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Témoigner. Prédication du 3e dimanche de l'Avent, le 17 décembre 2017

17 Décembre 2017, 14:22pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

Témoigner : 1 Thessaloniciens 5, 16-24 ; Jean 1, 6-8, 19-28

 

Mes chers amis,

 

Le beau prologue de Jean m’a toujours beaucoup intéressé et fait réfléchir. Et  il m’a toujours été source de méditation.

Les disciples de Jean le Baptiseur ont longtemps hésité entre lui, le Précurseur et Jésus, même après sa mort.

Dès le début du prologue, Jean nous donne des indices pour nous aider : « Il n’était pas la lumière, mais il parut pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui. »

Le témoignage de Jean le Baptiseur a dû entraîner de l’étonnement  et des questions d’autant plus pressantes qu’il répondait à des pharisiens, sacrificateurs et à des Lévites envoyés, mandatés pour s’informer et qui étaient intrigués par cet homme qui dérangeait.

« Toi, qui es-tu ? »

Leurs questions sont pertinentes, directes, précises. Jean-Baptiste est amené à récuser les trois questions. Il répond sans ambages :

- il déclare que non, il n’est pas le Christ

- il n’est pas non plus Elie, celui qui doit inaugurer les derniers temps

- il n’est pas le prophète comme Moïse, le prophète censé renouveler les prodiges de l’Exode, celui dont Moïse disait dans le Deutéronome au chapitre 18,15 : «L’Eternel ton Dieu, te suscitera du milieu de toi, d’entre tes frères, un prophète comme moi : vous l’écouterez ! » et encore au verset 18 : « je leur susciterai du milieu de leurs frères un prophète comme toi, je mettrai mes paroles dans sa bouche, et leur dira tout ce que je leur commanderai. »

A la question une fois posée une nouvelle fois, Jean va finalement répondre en citant Esaïe 40,3 : «  Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : Aplanissez le chemin du Seigneur ! »

 

Oui ! Jean est une voix ! Une simple voix. Il est un simple porte-parole, rien de plus. Il est en service commandé. Il n’est pas maître mais serviteur. Au service du message qu’il doit délivrer à tous.

De nouveau pressé de questions après ses dénégations, Jean va renvoyer sans se lasser, à plus haut, plus grand que lui : « au milieu de vous il y a quelqu’un que vous ne connaissez pas, qui vient après moi ; je ne suis pas digne de délier la courroie de ses souliers »(v .28).

Ainsi révèle-t-il Jésus, l’envoyé de Dieu, le Messie, celui qui se cache dans un homme ordinaire : Jésus de Nazareth. Telle est sa mission.

 

Le témoignage de Jean-Baptiste est touchant, c’est celui de l’humble serviteur, prêt à s’agenouiller devant le Messie.

 

De ce récit, nous pouvons tirer plusieurs conclusions : Jean est envoyé pour annoncer, il a une mission : celle de servir de témoin. Son témoignage est simple, bref, précis, empli d’humilité. Il aurait pu faire valoir la notoriété qu’il avait acquise au bord du Jourdain lorsqu’il   baptisait d’eau. Mais non ! Au contraire, il s’efface devant celui qu’il annonce, celui qui vient.

Aujourd’hui, pour nous chrétiens, disciples de Christ, par notre baptême, nous sommes aussi appelés à témoigner auprès de notre proches, dans nos familles, auprès de nos enfants de nos petits-enfants, de nos amis, auprès de ceux qui nous interrogent sur notre foi.

C’est notre vocation, notre mission, car,  sans notre témoignage, qui recevra Christ, qui le connaîtra ?

Et il me vient une idée : pour être sinon entendu, du moins écouté, notre témoignage doit être suscité, voulu par nos interlocuteurs. Jean répond à des questions qui lui sont posées. C’est aussi ce que nous devrions tous faire. Trop souvent les chrétiens n’ont pas attendu les questions et ont délivré un message qu’ils imposaient sans s’embarrasser.

Le message sera d’autant plus reçu que nous aurons été questionnés.

Mais bien sûr, les questions ne peuvent venir qu’à  condition que notre comportement provoque de l’intérêt, de la curiosité voire de la sympathie sinon de l’envie. Et c’est là que j’en arrive à la deuxième partie de ma méditation.

Comment susciter de  l’intérêt, provoquer la curiosité de personnes qui souvent ne sont pas forcément en recherche ou bien au contraire, tels les sacrificateurs et les Lévites, sont campés sur leurs certitudes, leurs dogmes , une foi acquise qui ne se remet jamais en question ?

Paul nous donne trois  pistes dans la première lettre aux Thessaloniciens :

Soyez toujours joyeux. Priez sans cesse. Rendez grâces en toutes choses.

Je ne retiendrai que ces trois premiers versets de la péricope que nous avons lue.

Soyez joyeux !

Le monde d’aujourd’hui est terrible, difficile, dangereux.

Albert Camus disait : « Il faut créer le bonheur pour protester contre l’univers du malheur. » et Nietzsche affirmait qu’il ne deviendrait chrétien que le jour où il rencontrerait des chrétiens montrant  des figures de ressuscités. Comment témoigner de la Bonne Nouvelle du salut si nous sommes tristes, grincheux, énervés, agressifs ? La joie est évangélique et elle se partage, elle est contagieuse.

Priez sans cesse !

La prière et la joie sont liées l’une à l’autre. Paul l’a bien compris qui ne les sépare pas. Et les verbes sont à l’impératif. C’est inévitable, ces deux-là sont liées et consubstantielles. La prière ne peut entraîner et alimenter la tristesse, elle ne peut qu’apporter la joie puisqu’elle nous approche de Dieu ; par elle, nous entrons dans l’intimité de Dieu et Lui nous rejoint dans la nôtre. Dès lors nous sommes mus par des forces qui nous dépassent.

Rendez grâces à toutes choses !

Rendre grâce est aussi sujet d’interrogation. Si ce que nous avons reçu par notre baptême, la grâce de la foi n’est pas un sujet de gratitude, si nous ne rendons pas grâce, joyeusement, quel est le témoignage que nous voulons porter ? Montrer joie et gratitude ne peuvent que provoquer l’intérêt, les questions et permettre à l’autre, celui  qui nous écoute, nous voit, celui qui nous côtoie,  de s’ouvrir et recevoir le message d’amour et de paix dont lui aussi pourrait tirer une vie renouvelée et joyeuse.

 

 

Je voudrais terminer en citant Paul dans sa lettre aux Romains.

Au chapitre 10, 14b-15, Paul écrit  « Et comment croiront-ils en celui dont ils ont entendu parler ? Et comment entendront-ils parler, s’il n’y a personne qui prêche ? Et comment y aura-t-il des prédicateurs, s’ils ne sont pas envoyés ? »

L’Eternel par notre baptême nous envoie tous en mission, comme les prophètes, comme Jean Baptiste. Baptisés, nous sommes tous missionnés à notre niveau, tels que nous sommes. Nous sommes tous des témoins: en paroles ou en actes et, de préférence, en paroles et en actes, là où nous sommes, comme nous sommes, avec nos talents et nos manques.

Alors, oui mes chers amis, rendons grâce pour notre baptême, rendons grâce pour la fête de Noël qui approche. Montrons de l’entrain et de la joie, prions sans cesse l’Eternel de nous donner comme à Jean Baptiste de la force, du courage, de l’humilité, de l’endurance dans l’engagement et dans la prière. Que notre joie soit source de joie.

Oui ! Témoignons de la Bonne Nouvelle, témoignons de Jésus qui arrive parmi nous à Noël !

Rayonnons de joie ! Amen !

 

Georges d’Humières!

 

 

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Prédication du 1er dimanche de l'Avent , le 3 décembre 2017

8 Décembre 2017, 17:54pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

1Corinthiens 1 : 3-9

Marc 13 : 33-37

 

Frères et sœurs, nous entrons aujourd’hui dans la période de l’Avent. Avec ce 1er dimanche de l’Avent, s’ouvre une nouvelle année liturgique.

Le mot « Avent » signifie avènement, c’est-à-dire « ce qui doit venir ». Ce temps de l’Avent sera donc le temps de la préparation à la fête de Noël où l’on célèbre la première venue du Christ Jésus, il y a quelque 2000 ans. Nous sommes invités, par le texte d’aujourd’hui, à attendre ce qui doit venir en veillant, en exerçant notre vigilance. Le mois de décembre est donc marqué par un appel à la vigilance. Il est important de nous tenir prêts pour la venue de Jésus tout comme une famille se tient prête pour l’arrivée d’un nouvel enfant.

L’évangile qui nous est proposé prend place dans le discours apocalyptique des récits synoptiques. (Matthieu, Marc et Luc). Le mot apocalypse veut dire « révélation, dévoilement » de ce qui est caché. Les évangélistes ont regroupé ici tous les enseignements de Jésus qui concernent à la fois la ruine du Temple de Jérusalem, la venue du Fils de l’homme et le Dernier Jour de l’humanité. Ces récits se trouvent placés en prologue du récit de la passion et de la résurrection de Jésus.

L’Evangile de ce jour nous parle plus particulièrement de la seconde venue de Jésus, celle de sa venue en gloire à la fin des temps. Voyons comment le Seigneur nous interpelle afin que nous veillions sans nous laisser surprendre.

Un homme parti en voyage, en quittant sa maison, a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail. Il peut arriver à l'improviste et vous trouver endormis : « veillez : car vous ne savez pas quand viendra le moment ; veillez, car vous ne savez pas quand le maître de la maison reviendra ; je le dis à tous : veillez ! ».

On remarquera dans ce passage la forme impérative avec laquelle Jésus interpelle ses disciples. Prenez garde, restez éveillés ! Tout pouvoir vous a été donné, comme aux serviteurs de cet homme parti en voyage ; mais voici qu'il revient sans savoir quand précisément, 'le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin'. Alors, veillez ! Les disciples sont interpellés comme partenaires du maître qui part…Ils sont donc mis devant leur responsabilité « tout pouvoir vous a été donné », dans leur liberté d'agir : Prenez garde, et veillez ! car le Seigneur revient à l'improviste, et il veut vous trouver sans reproche à son jour. Le message est vigoureux mais plein d'espérance, rien n'est perdu.

Veiller, au premier abord, cela ne semble ni facile, ni naturel : dans les cinq versets de ce texte, nous trouvons par trois fois l’exhortation à veiller. Non, effectivement, veiller ne va pas de soi. En général, quand on veille, c’est la nuit, pour garder quelqu’un ou quelque chose. Veiller, ce n’est pas très passionnant, parce que souvent il ne se passe rien, et c’est même ce que le veilleur peut espérer de mieux. Mais le veilleur peut être gagné par un sentiment d’être inutile.

Notre parabole s’inscrit dans une réponse de Jésus aux disciples (Mc 13,4). C’est en effet alors qu’il leur parle de la ruine du Temple que les disciples font spontanément le lien avec la fin des temps, en faisant sans doute référence aux écrits de Daniel. Mais, contrairement à la pensée de nombre de ses compatriotes, la réponse de Jésus voudra dissocier venue du Messie et fin du monde.

Dans ce long passage de l’Evangile de Marc sur le retour du Messie dont nous n’avons qu’un extrait dans le texte du jour, Jésus ne cache pas que des événements terribles peuvent se produire et se sont, sans doute, déjà produits. Si Jésus nous mobilise pour faire face au danger, c’est qu’il est possible de le surmonter. Si, plus avant dans le même Evangile, Jésus fait état d’événements annonciateurs, ce n’est pas pour nous alarmer, mais pour que nous mettions notre sagesse en éveil pour interpréter ce qui se passe et prendre les dispositions appropriées.

Certains chrétiens prétendent que dans de telles circonstances, la foi ne nous dicte qu’une seule attitude possible : celle de l’attente patiente dans la prière ! Mais tel ne semble pas être l’avis de Jésus. S’il n’exclut pas la prière, il la préconise même, il donne priorité à l’action de veiller. Pour lui, l’attitude du croyant est d’abord dans l’agir et non pas dans le subir. La sagesse consiste donc à savoir que Jésus nous entraîne à l’action, car c’est dans l’action que la vie se manifeste et prend ses droits. Dieu ne cherche pas à rassembler un peuple qui subit, mais qui agit, car ce sont les hommes et les femmes d’action inspirés par Dieu qui ont en eux les solutions de l’avenir. C’est bien sûr par la prière qu’ils saisissent ce que Dieu leur suggère de faire. Cependant les mains des croyants sont les mains avec lesquelles Dieu agit. Dieu ne nous envoie pas son Esprit pour que nous restions inactifs en attendant une délivrance qui ne viendra que si nous décidons d’entreprendre. Veillez donc nous dit Jésus afin de devenir les moteurs de ce monde que Dieu se plait à accompagner, car c’est ainsi qu’il nous aidera à conjurer nos peurs.

Si l’Evangéliste choisit ce genre apocalyptique et souligne le côté sombre des événements à venir, c’est pour mieux faire apparaître le côté lumineux de cet événement unique : le retour en gloire du Christ. Par conséquent, ce qui est important dans ce texte, ce ne sont pas les catastrophes annoncées, mais bien plutôt l’espoir que constitue le retour du Christ. Dans cette perspective, cela signifie qu’il est inutile de vouloir, avec ce texte, satisfaire notre curiosité. Il ne nous donne aucune indication sur la date à laquelle les derniers événements se produiront, mais juste qu’ils peuvent survenir à tout moment, absolument n’importe quand, d’où la nécessité de rester vigilant. Non, nous ne pouvons pas connaître la dates des derniers événements, et heureusement, parce que sinon, nous serions à la place de Dieu. En fait, il ne s’agit pas de calculer quand les derniers événements auront lieu, car nous n’en avons ni la maîtrise, ni la connaissance : cela appartient à Dieu seul. Même Jésus, lorsqu’il était sur terre, reconnaissait ne pas connaître la date de ces événements : dans le verset qui précède immédiatement notre passage, Jésus déclare : « Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père. ». Et c’est justement parce que nous ne connaissons pas la date des derniers événements qu’il faut veiller. Quand on connaît la date d’un événement, il n’est pas nécessaire de veiller, il suffit de le noter sur son agenda.

Frères et sœurs, veiller, c’est rester ouvert à la présence de Dieu dans nos vies. Veiller, c’est ne pas passer à côté de l’essentiel. Veiller, c’est savoir s’arrêter et avoir tous ses sens en alerte pour discerner une présence discrète. Veiller, ce n’est pas rester passif en se disant que ce qui doit arriver arrivera de toute façon. Veiller, ce n’est pas non plus s’agiter dans tous les sens. Veiller, c’est rester ouvert à l’inattendu de Dieu. Veiller, c’est d’abord nous rendre attentif à ce qui précède la venue du Seigneur dans nos vies. Chaque jour, chaque minute peuvent être importants! C'est dans notre vie quotidienne qu'il faut veiller, c'est dans chacune de nos rencontres que nous pouvons semer un peu de la lumière de Dieu. C'est tous les jours que l'on peut donner de soi... C'est tous les jours que nous pouvons prendre soin des autres.

Veiller, c'est agir, être actif aujourd'hui, pour que le Règne de Dieu grandisse demain! Veillez, c'est faire attention à ne pas s'endormir dans la facilité, la négligence, les compromissions... Et nous sommes invités à veiller non en fonction de ce que nous savons, mais en fonction du fait que nous ne savons rien des événements derniers. Les disciples du Christ ne sont pas des initiés, mais des veilleurs.

En agissant avec bonté, en accueillant les affamés et les malades, le chrétien est éveillé à la présence de l’Esprit qui l’interpelle à travers eux. En effet, ce sont souvent ces humbles et ces marginaux qui nous précèdent dans l’amour de Dieu. À travers la nuit du monde, nous pouvons être de « petites lumières », chacun selon notre capacité, selon le talent reçu de Dieu. Une attention à un plus petit, à celui que la société marginalise, c’est ce qui nous fait rejoindre secrètement l’Esprit du Ressuscité qui vit et agit dans le cœur des mal-aimés.

Enfin, veiller à la venue du Ressuscité n’est-ce pas aussi lutter contre l’injustice, une injustice qui renaît sans cesse dans la nuit de notre monde?

Veiller ne signifie donc pas seulement penser au dernier Jour et méditer…Il ne s’agit pas d’une attente passive. Être témoin de la lumière de l’Évangile ne signifie pas seulement que le disciple doit annoncer la Parole de Jésus. Il doit en être le témoin parce qu’elle inspire sa vie quotidienne. Le disciple de Jésus est appelé à réaliser la présence divine en ce monde en faisant fructifier le don de la bonté qu’il a reçu de son Maître et Ami.

Frères et sœurs, l’Evangile dit : « en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail et recommandé au portier de veiller » (Mc 13,34). Effectivement, cette absence du maître pose notre responsabilité en tant qu’homme ou femme, et en tant que chrétien. Chacun d’entre nous exerce un pouvoir, plus ou moins grand, sur ceux qui l’entourent, sur la société ou sein de l’Eglise. Ce pouvoir nous est confié par Dieu pour un temps. Et ce temps aura une fin. Voilà pourquoi il nous faut agir en ne perdant pas de vue qu’un jour nous paraîtrons devant le Seigneur. Le Seigneur nous aime infiniment et nous fait une pleine confiance. A nous d’essayer de l’aimer en retour et de nous montrer dignes de cette confiance.

Frères et sœurs, l’appel à la vigilance ou à veiller suppose qu’il y a le risque de s’endormir. Et il y en a plusieurs qui nous guettent en cette période de fête…Il y a d'abord, les préparatifs de Noël. Il faut faire un effort pour se rappeler régulièrement que c'est bien Jésus qui vient, et non pas le Père Noël. Les cadeaux, les décorations, les files d’attente dans les magasins, la préparation des bons repas, tout ça n’est pas mauvais en soi. Mais si notre esprit se laisse accaparer par tous ces préparatifs matériels, c’est que nous nous sommes détournés de ce qui est essentiel : nous avons oublié de nous préparer à la venue de Jésus. Nous nous sommes donc bien endormis ! Et puis il y a l’esprit d’indifférence à Dieu qui est omniprésent autour de nous, et qui nous guette nous aussi, si nous ne faisons pas attention. Les gens sont aujourd’hui tellement préoccupés par leur vie professionnelle, préoccupés par leurs problèmes affectifs, leurs projets de loisirs, de vacances, leur état de santé…que nous sommes tentés de faire comme eux, tentés de vivre nous aussi comme si Dieu n’existait pas, de laisser somnoler notre esprit, dans cette indifférence générale, et finalement de nous endormir. Oui, nous avons tous nos petites ou grandes habitudes, nos dépendances qui nous éloignent de Dieu, et nous font oublier, là encore, que le Seigneur vient à notre rencontre.

Nous dormons, si nous fermons les yeux sur les situations de misère, d’injustice, de violence. Nous dormons si nous nous résignons en pensant : « qu’est-ce que j’y peux ! » Nous dormons si nous nous laissons endormir par des slogans et des pubs sous toutes leurs formes qui nous font rêver d’un monde virtuel, surtout inatteignable. Tout cela, frères et sœurs, nous endort. C'est pourquoi le temps de l'Avent est si utile pour nous sortir de notre sommeil et nous remettre en état de veille, d'attente du Seigneur.

Vous savez, frères et sœurs, le plus grand obstacle à la vigilance c’est  la foi. Oui, je dis bien la foi. La foi au sens où l'entendent beaucoup de chrétiens, c’est-à-dire la foi en l'existence de Dieu et en la vie après la mort, par opposition aux athées.

Mais la foi qui nous engage à la vigilance est celle qui nous permet de dire: nous sommes aimés de Dieu inconditionnellement chaque jour que Dieu fait avec ses événements ; chaque jour que Dieu fait est une parole pour nous, notre vie réussira et n'est qu'une longue préparation à la rencontre avec la source de tout amour.  Sans cette foi, frères et sœurs, l'inconnu nous fait peur, les autres deviennent une menace, et alors notre propre angoisse nous empêche d'écouter ceux et celles qui nous parlent, de nous ouvrir aux événements de la vie et nous sommes incapables d'être alertes.

L'évangile utilise l'image d'un maître parti à l'étranger. C'est notre situation où ne pouvons plus toucher Jésus de nos mains, mais où nous est confié la responsabilité de son domaine. Son retour s'effectue dans la mesure où nous devenons un peu plus chaque jour l'homme nouveau, la femme nouvelle. Chaque jour nous en donne l'opportunité, dans la mesure où nous savons "voir" et "être alerte". Tout cela exige une confiance incommensurable en la vie : « que ce soit tard le soir, au milieu de la nuit, ou au chant du coq, ou le matin », dit le récit de l'évangile. En d'autres mots, c'est l'œuvre d'une vie. Voilà ce que veut évoquer ce début du temps de l'Avent, alors qu'on regarde le chemin à parcourir.

L’apôtre Paul nous affirme dans sa première lettre aux Corinthiens, notre épitre du jour, qu’en Jésus Christ nous avons reçu toutes les richesses, celle de la parole et de la connaissance de Dieu… Aucun don de la grâce ne nous manque.  « Ainsi, ajoute-t-il, il ne vous manque aucun don, à vous qui attendez le moment où notre Seigneur apparaîtra. C’est lui qui vous affermira jusqu’à la fin pour que vous soyez irréprochables le jour de notre Seigneur Jésus-Christ. Dieu est fidèle, conclut l’apôtre Paul, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus-Christ notre Seigneur ».

Frères et sœurs, à Noël, c’est Jésus qui se rend présent au monde. La fête de Noël est une fête lumineuse! Pour qu'elle le soit en abondance, il faut semer beaucoup de lumière autour de soi pendant le temps de l'Avent.

En ce temps de l'Avent, VEILLER, c'est peut-être ne jamais oublier que Dieu nous invite à toujours vivre en communion avec Lui et avec nos frères, avec nos sœurs. Pour nous aider, nous pouvons suivre Jésus et accueillir l'Esprit Saint. Ce temps de l’Avent dans lequel nous entrons nous apprend à nous rendre attentif à cette présence discrète dans nos existences.

Saurons-nous voir les signes de sa présence dans nos vies ? A chacun, à chacune d'inventer sa manière pour être à l'écoute de Celui qui ne cesse de venir.

Bonne période de l’Avent à chacun et à chacune de nous. Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Prédication du dimanche 26 novembre 2017 : 1 Co 15, 20-28 et Mt 25, 31-46

1 Décembre 2017, 08:50am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

1Co 15, 20-28

Mt 25, 31-46

 

 

Comme les paraboles qui ont été  lues et commentés ici les dimanches précédents, le récit que nous venons d’entendre en ce dernier dimanche de l’année liturgique a valeur symbolique. Cela  veut donc dire qu’il ne faut pas le prendre au pied de la lettre, mais qu’il contient un enseignement qu’il convient de rechercher à travers les images qui le transmettent.

 

Dans ce récit il est question de la parousie, c'est-à-dire du second avènement du Christ lorsqu’il apparaitra dans la gloire à la fin des temps. On peut parler aussi d’eschatologie c'est-à-dire d’un enseignement, d’un discours, (logos) sur ce qui doit arriver à la fin  (eschatos) des temps.

 

En délivrant son message, Jésus, évidemment, emploi le langage des eschatologies juives qui était accessible à ses auditeurs, ou du moins qui leur était familier (anges, éclairs, tonnerre, trompettes…)

 

Au Moyen âge, alors qu’on n’avait pas tellement évolué dans la compréhension du monde depuis l’époque juive, les artistes ont réalisé des œuvres (admirables du reste sur le plan esthétique) pour représenter la fin des temps, en s’appuyant à la lettre sur le récit de Mt. Je pense à la très belle mosaïque du mausolée de Galla Placidia (Ve s.), à Ravenne, où un Christ-berger, jeune et beau, assis sur un rocher, sur fond d’aube naissante, a placé à sa droite les blanches brebis et, à sa gauche les chèvres noires. Image pastorale paisible à laquelle les artistes ont préféré l’image plus solennelle d’un Christ impérial rassemblant au son de la trompette des anges, d’un côté les élus et de l’autre les damnés, aussitôt précipités dans les tourments de l’enfer où s’activent des diables affreux. Je pense au jugement dernier de la cathédrale d’Albi.  A tout prendre, je préfère la mosaïque de Ravenne.

 

 Aujourd’hui, pour parler de la fin des temps, on n’userait pas du même discours. Samedi dernier j’étais à un colloque à Perpignan avec des chercheurs du Laboratoire Arago de Banyuls où il était question de réchauffement et de dérèglement climatique, de gaz à effet de serre, de pollution des milieux qui amèneront à des transformations inéluctables et, en conséquence à l’appauvrissement de la biodiversité. En réalité, il n’était question que de l’avenir de notre seule planète. Dans l’eschatologie de Mt. il est question du devenir de tout l’univers visible et invisible. A chaque époque son langage en fonction des connaissances du temps. Laissons donc de côté la phraséologie juive du début de notre ère pour aller à l’essentiel d’un enseignement valable pour tous les hommes de tous les temps.

 

Dans le récit de Mt, Jésus nous rappelle, premièrement que l’Univers visible et invisible, en son entier, est l’œuvre de Dieu. Deuxièmement, il nous que, dans le plan divin, notre existence passagère d’hommes sur cette terre a un sens. Troisièmement il confirme que l’univers créé disparaitra un jour dans sa forme actuelle pour être transformé, régénéré, et revenir à Dieu. « Un ciel nouveau, une terre nouvelle ».

 

Pourquoi Dieu a-t-il créé le monde bon mais imparfait, pourquoi le mal dans ce monde, pourquoi existé-je et quel est mon avenir? Toutes ces questions sont à reconsidérer en Christ et trouvent leur réponse en lui. Relisons le cantique au Christ, chef de l’univers dans l’Epitre de Paul aux Colossiens (I, 12-20) « Tout est créé par lui et pour lui…, tout est maintenu en lui… Car il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute la plénitude et de tout réconcilier par lui et pour lui, et sur la terre et dans les cieux, ayant établi la paix par le sang  de sa croix… voilà que maintenant Dieu vous a réconciliés grâce au corps périssable de son Fils, par sa mort, pour vous faire paraître devant lui, saints et irréprochables.»

 

Ce monde voulu par Dieu et réconcilié, régénéré par le Christ-fait- homme disparaîtra sous sa forme actuelle, c’est inéluctable. Même la science, sans référence religieuse, l’envisage. Nous ne pouvons pas savoir quand cet événement cosmique se produira, mais ce qui est à envisager, à courte échéance, c’est notre propre fin d’homme. Ma fin du monde et mon « jugement ».  Ce moment où, échappant au temps terrestre, j’entrerai dans l’éternité de Dieu « Il faut que cet être corruptible revête l’incorruptibilité et que cet être mortel revête l’immortalité », nous a dit Paul dans le passage de l’Epître aux Corinthiens que nous avons lue tout à l’heure. Remarquons que, en Dieu, notre fin individuelle et celle de l’univers ne relèvent pas du temps, la chronologie est une notion relative à la matière, ce qui veut dire que, dès que nous sommes morts, dès que nous avons échappé au monde matériel, nous sommes dans l’éternité, autrement dit dans  l’éternel présent divin. Jugement individuel et jugement du monde ne sont plus dans le temps, mais dans l’instant divin ; le mal est vaincu, le ciel nouveau et la terre nouvelle sont advenus. Le Royaume est là.

 

Mais, puisque, pour l’heure, notre existence s’écoule dans le temps matériel (chronos) et que l’enseignement de Jésus s’adresse à chacun d’entre nous en ce temps, revenons au chapitre 25 de l’Evangile selon Mt.

 

J’avoue qu’il y a de quoi être surpris par la façon dont le « jugement » est présenté. Nous avons entendu que deux groupes seront constitués : d’un côté les bénis du Père et de l’autre les maudits. On aurait aimé lire un jugement de ce type : Ceux qui auront cru en Jésus seront à sa droite et ceux qui ne l’auront pas reçu seront à sa gauche. En effet, nous croyons que le salut est offert à ceux qui reconnaissent en Jésus le Seigneur et le Sauveur, selon  la conviction de Luther qui fonde notre communion protestante. Mais ce n’est pas ce qui est dit par Jésus dans le texte que nous venons de lire. Vous l’avez entendu comme moi, seront sauvés, bénis du Père et recevront le Royaume en partage ceux à qui il dira : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger et vous m’avez accueilli ; nu et vous m’avez vêtu ; malade et vous m’avez visité ; en prison et vous êtes venus à moi. »   C’est sur ce que les hommes auront fait que sera basé le jugement. Il n’est pas question d’un salut pour les gens de la bonne religion, le peuple des sauvés, mais d’un salut pour ceux qui auront fait.  

 

Mais alors, il faut faire des bonnes actions pour être sauvés ? Le salut aurait lieu par les œuvres ? C’est ce que l’Eglise médiévale a enseigné. Beaucoup de bonnes œuvres et quelques indulgences, c’est ainsi que vous obtiendrez le salut. Le moine Luther l’a cru jusqu’à ce qu’il réalise que ses pénitences l’enfermaient dans le désespoir. Jamais il ne saurait se rendre agréable aux yeux de Dieu. C’est alors  qu’en méditant l’Epitre aux Romains  il réalise soudain que seule la mort et la résurrection du Christ le rendaient juste aux yeux de Dieu, et cette certitude fut une libération.

 

Et alors, Mt 25 ? Certes l’évangile parle d’actions en faveur des plus démunis qui attireront la mansuétude de Dieu, mais il faut aller plus loin dans la lecture. Ceux qui ont eu souci de leur prochain dans le besoin ne l’ont pas fait par intérêt, pour leur salut, ils ont agi  par compassion, par humanité et c’est Jésus qui leur révèle qu’en approchant des autres c’est de lui qu’ils se sont approchés. Ils n’en avaient pas conscience : « Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire … Quand t’avons-nous vu ayant faim, ayant soif, nu, en prison ? Chaque fois que vous avez fait cela à l’un de ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’aurez fait. » (Soit dit en passant, il ne suffit pas de faire l’aumône à un pauvre dans la rue pour être proche de ses frères ; payer ses impôts, être un citoyen actif, conscient, soucieux du bien public, c’est déjà être attentif à l’autre, au petit.)

 

Faire le bien pour être sauvé, pour acheter son salut, cela ne sert à rien, on se trompe lourdement. Dieu seul sauve, par grâce, gratuitement. Mais c’est parce que l’on se sait sauvé, aimé de Dieu, c’est à cause de cela que l’on a envie de devenir plus attentif aux autres et qu’on les considère comme des frères, eux aussi aimés de Dieu. Spontanément, sans attendre un retour, pas même un merci. Evidemment, c’est exigeant ; et qui peut dire que tout ce qu’il fait pour les autres est toujours libre d’arrière pensée. Pas moi, c’est sûr. Il n’en reste pas moins que le Christ nous fixe un idéal et que c’est vers lui que nous devons  tendre.

 

Avec, cependant, une certitude. C’est parce que je me reconnais pêcheur, faible et limité, parce que je me reconnais un blessé de la vie, parce que sans mon frère qui vient à mon secours (il est alors pour moi le Christ), je ne suis rien. C’est parce que je reconnais que je ne peux pas me sauver par moi-même, que j’accepte que le Christ entre dans ma vie. Alors, je puis, à mon tour, partager cette Bonne Nouvelle.

 

Ceux qui seront bénis de Dieu et partageront son Royaume, ce sont ceux qui attendent tout de lui et qui se sont tournés vers les autres en les regardant comme des frères. Comme le disait Luther à la fin de sa vie : Celui qui évangélise est comme un mendiant qui dit à un autre mendiant : « là-bas il y a du pain ».  Amen.

 

André Bonnery

 

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Matthieu 25, 14-30 "Les talents" Prédication du dimanche 19 novembre 2017

21 Novembre 2017, 10:10am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

Textes biblique : Matthieu 25: 14-30

 

« C’est bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, je te confierai beaucoup. Viens partager la joie de ton maître. » v 23.

Nous sommes sur le seuil : la croix se dessine, Jésus affronte l’adversaire ultime, c’est-à-dire la mort. Le complot se concrétise (Mt 26,1ss). Devant la mort, avec le Christ, nous nous posons la question du sens de la vie. Celui-ci est maintenant concrétisé : avec les dons qui sont les nôtres nous avons à servir l’autre dans sa vulnérabilité. C’est ce que nous suggère notre texte du jour…Même si ce passage induit l’idée de jugement dernier, il s’agit ici de la vie et de ce que nous sommes censés faire pour mener une vie sensée.

L’évangile de ce dimanche veut stimuler ou nous invite à la vigilance active. Il raconte la célèbre parabole des talents, rapportée par Matthieu. Jésus commence ainsi : « Ce sera, en effet pareil au cas d’un homme qui, partant pour un voyage, appela ses serviteurs et leur remit ses biens…» (Matthieu 25 : 14).

Étant donné que Jésus s’est déjà comparé à un homme parti « dans un pays lointain pour être fait roi », les disciples peuvent facilement comprendre que l’« homme » dont il est question ici désigne Jésus lui-même (Luc 19 : 12). Avant que l’homme de l’exemple ne parte, il confie des biens de valeur à ses serviteurs.

Durant les trois ans et demi de son ministère, Jésus s’est concentré sur la prédication de la bonne nouvelle du royaume de Dieu, et il a formé ses disciples à cette œuvre. Maintenant, il est sur le point de s’en aller, convaincu qu’ils accompliront la mission qu’il leur a confiée (Matthieu 10 : 7 ; Luc 10 : 1, 8, 9 ; Jean 4 : 38, 14 : 12).

L’homme confie cinq talents au premier serviteur, trois au second et un seul au dernier, car il donne à chacun selon ses capacités (donc très inégales : de 1 à 5). Puis il est parti à l’étranger » (Matthieu 25 : 15). Que feront ces serviteurs des biens qui leur ont été confiés ? Surtout que l’homme ne laisse aucune consigne claire ! (en tout cas dans la version de Matthieu). Les utiliseront-ils consciencieusement, au mieux des intérêts de leur maître ?

Beaucoup d’entre nous peuvent être perturbés par la conclusion de cette parabole. Le dernier, ne sachant faire fructifier le talent reçu, se verra alors « jeté dans les ténèbres de l’extérieur!!! ». Mais est-ce vraiment ça le sens du message de Jésus ?

Avoir du talent, dans tel ou tel domaine : c’est une situation bien enviable ! Mais si l’on en croit cette parabole, ce n’est pas un sujet particulier de fierté, dans la mesure où nos capacités, même petites, nous sont toutes données ! « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » nous rappelle Paul dans une de ses lettres.

Par contre, la possession d’une capacité particulière implique une responsabilité, celle de ne pas la laisser en friche, mais de l’exploiter pour le plus grand bien des autres – et de nous-mêmes. Le texte nous confirme bien l’inégalité des talents, symbolisés par des sommes d’argent (5, 2, et un seul talent), mais le plus petit correspond déjà à une somme importante ! J’y reviens tout à l’heure… Surabondance des dons du maître, qui donne à profusion à tous, y compris à ceux qui semblent les plus démunis.

Avoir un talent : cela fait penser à une possession, un avantage dont on peut jouir, même s’il est acquis par grâce, et non par nos propres mérites ; mais les talents évoqués dans ce texte sont-ils de l’ordre de l’avoir ?  Ne sont-ils pas plutôt de l’ordre de l’attitude, c’est-à-dire de l’être de chacun des trois serviteurs ?

La parabole nous indique, implicitement, que les deux premiers ont pris des risques pour faire fructifier l’argent de leur maître ; ils ne se sont pas contentés de le remettre aux banquiers pour en tirer un intérêt, ce que le troisième n’a même pas pu faire !

Les deux premiers serviteurs auraient-ils pu se lancer dans cette entreprise s’ils n’avaient pas eu confiance en leur maître ? Auraient-ils eu envie d’agir s’ils n’avaient pas éprouvé un attachement pour lui, un désir d’être de « bons et fidèles serviteurs » ? (versets 21 et 23)

A l’inverse, le troisième serviteur est paralysé par la peur. Il « sait » que son maître est un homme dur, il n’a ni confiance, ni affection pour celui qu’il ressent comme exigeant et injuste, ce qui l’amène à se réfugier dans un légalisme qui s’exprime par les excuses qu’il présente : je n’ai pris aucune initiative, c’est vrai, mais je ne t’ai pas fait tort, je te rends ce qui t’appartient !

L’histoire des talents est située dans le prolongement de l’appel à veiller: la fidélité est exprimée dans un agir (25,21-23), l’infidélité dans une attitude de paresse (25,26). Le défaut de vigilance réside dans une insuffisance d’activité concrète.

Frères et sœurs, l’attente du maître n’est pas, pour Matthieu, le fait d’une religiosité intérieure ; elle ne consiste pas dans une ferveur particulière, ou même dans la prière ; elle est un engagement éminemment actif, qui mobilise le croyant et l’invite à des initiatives mêmes parfois risquées. Il s’agit de mettre en œuvre les talents au service d’autrui, de celui qui est « affamé, assoiffé, étranger, nu, malade ou emprisonné » (Mt 25,35ss). Ce sera le thème de l’Evangile du dimanche prochain.

Le talent était la plus forte unité de compte en monnaie grecque, et ce bloc de 26 à 34 kilos d’argent valait 6000 deniers ; on sait qu’un denier représente le salaire journalier d’un ouvrier en Palestine (Mt 20,2). Alors le moins doté des trois serviteurs reçoit ainsi l’équivalent de 17 années de travail ! 17 ans de travail, deux ou cinq fois 17 ans, c’est le travail d’une vie.

Au Moyen Age, le terme « talent » a pris son sens moderne d’aptitude particulière à l’exercice d’une activité intellectuelle ou artistique.

Frères et sœurs, le talent, n’est-ce pas notre vie toute entière ? Que faisons-nous de notre vie, est la question, la vie qui nous est donnée, remise pour la faire fructifier ?

Par rapport aux talents de notre parabole, la fidélité du bon serviteur consiste non simplement à être prêt ou à se bien conduire … mais à faire fructifier les talents confiés à la mesure de leur importance. Ainsi toute vie qui se réalise à la mesure de ses possibilités est une vie bonne. L’extraordinaire devient ordinaire pour celui qui a « beaucoup de talents ». Comme l’autre, qui a moins reçu, il n’est qu’un « bon et fidèle serviteur » et « entre dans la joie du maître… » « …peut se réjouir avec son maître » (25,21.23).

La visée est la joie du maître … la joie de Dieu, la joie de la source de la vie.

En effet, l'habitude a été prise de comprendre Dieu comme un maître qui met en gérance, provisoirement ses biens, puis qui vient régler ses comptes avec ses serviteurs. Dans ce cas, le troisième aurait vraiment raison de dire de lui qu'il est dur et exigeant. Mais si l'on accepte de bien faire attention aux mots employés par Matthieu pour rapporter cette parabole, nous pouvons comprendre autrement. Il est dit que le maître donne; mais il n'est pas dit qu'il reprend ! Quand les deux premiers serviteurs présentent deux et cinq autres talents; ils ne rendent ni les talents qu'ils ont reçus, ni les autres talents qu'ils ont produits.

D'autre part, la traduction courante, pour parler du retour du maître, c'est d'écrire qu'il demande des comptes. Or, il semblerait plus juste d'écrire qu'ils s'expliquent sur la gestion... Et c'est plus qu'une nuance. Ils ne rendent ni leurs comptes, ni leur tablier... comme les partenaires gestionnaires d'une affaire, ils font un tour d'horizon sur leurs affaires... voilà ce que çà a produit!

Frères et sœurs, nous sommes bien d'accord pour dire que sous les traits de l'homme qui part, il faut y voir les traits de Dieu incarné en Jésus le Christ. Le Dieu créateur, qui donne à l'être humain ce qu'il a de mieux, à savoir l'œuvre de la création. Il le lui donne, pour que l'être humain devienne à son tour à son image et ressemblance. C'est ce que font les deux premiers serviteurs, usant du bien qui leur est donné, et en produisant de nouveaux biens. Et ils présentent le fruit de leur propre travail (ils ne le restituent pas: « Vois! », disent-ils. Ils montrent qu'ils ont su être, comme le maître, créateurs de biens

Au contraire, le troisième n'a pas reçu sa part comme un don, mais comme un objet dont il a la garde. Il s'est considéré comme serviteur, chargé de "veiller sur lui", rien de plus, et de le restituer tel quel, en serviteur honnête, mais ce faisant, il n'est pas devenu comme le maître, créateur à son image et ressemblance. Il ne peut donc partager la joie de son maître, lui qui l'avait invité à quitter son habit de serviteur pour prendre celui de fils.

Frères et sœurs, Mathieu nous montre ainsi qu’il y a différentes manières de garder les dons du Seigneur et d’en vivre : une qui paralyse, la peur et la crainte, et une autre qui libère les énergies, la confiance.

L’appel à la vigilance, à garder la mémoire du Seigneur dans l’attente de son retour glorieux, cet appel n’est pas une invitation à nous torturer l’esprit sur une probable date et encore moins à nous laisser envahir par l’insécurité du temps ou les menaces. Car tout cela ne produira aucun bon fruit.

La parabole des talents nous montre que chacun des serviteurs agit selon l’image de Dieu qu’il porte en son cœur, et le fruit de son travail correspond à l’image positive ou négative qu’il se fait de son Dieu.

Si nous gardons au cœur la mémoire du Seigneur libérateur et aimant, c’est la pensée de sa miséricorde qui doit résonner en nous. Si nous l’attendons, sans connaître de date pour sa venue glorieuse, c’est un espace ouvert à notre liberté et à notre responsabilité pour faire fructifier nos dons, pour préparer les festivités et la venue de son Règne.

Au lieu de faire confiance au Seigneur qui lui a fait un don, le 3e serviteur se méfie de lui, il en a peur et ne voulant courir aucun risque, il n’entreprend rien pour faire fructifier le talent confié.

Frères et sœurs, la peur et le manque de confiance rompent la relation d’amour initiée par le Seigneur. Au lieu de devenir acteur de la relation, en accueillant le talent et en le faisant fructifier, ce troisième se place en spectateur inactif et craintif des préparatifs du Règne de Dieu. Ainsi, il détruit la relation amicale avec son Seigneur qui n’est pour lui qu’un maître exigeant. Or, frères et sœurs, c’est la confiance et rien que la confiance qui nous conduit à l’amour.

Le Seigneur offre à tous et à toutes au moins un talent, celui de son amour offert et auquel nous répondons d’abord par la confiance qui nous ouvre à la relation. Dans la confiance, nous attendons sa venue, nous gardons au cœur la mémoire de Jésus. Nous patientons sans crainte, et travaillons joyeusement, sans esprit de calcul. Confiant dans le Seigneur qui vient, en son amour miséricordieux, nous attendons activement d’entrer dans sa joie.

Frères et sœurs, le cadeau que Dieu nous fait c'est de nous inviter à devenir dans notre liberté souveraine, participant à son œuvre créatrice, devenant "à son image et ressemblance". Nulle part, il n'est dit que Dieu cherche à faire de nous des esclaves, ni qu'il veut agir envers nous comme un supérieur envers ses subalternes. Bien au contraire, il cherche à faire de nous des fils et des filles, des héritiers (cf. Galates, 4, 4-7) de son règne de paix, d’amour et de joie perpétuelle…

« C’est bien, bon et fidèle serviteur, tu as été fidèle en peu de choses, je te confierai beaucoup. Viens partager la joie de ton maître. » v 23.

Qu’il en soit ainsi pour vous et pour moi. Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Matthieu 23, 1-12 Prédication du dimanche 5 novembre 2017

5 Novembre 2017, 14:37pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

Matthieu 23, 1-12

 

 

Texte intense ce jour, peut être à la limite du supportable pour les pharisiens, qui sont des scribes et des spécialistes de la loi. Ils sont assis dans la chaire de Moïse, leur enseignement serait donc un enseignement de qualité, éprouvé, alors quelles raisons poussent Jésus à parler ainsi à ses disciples ?

 

L’Evangile de Matthieu, qui introduit le Nouveau Testament n’est pas le premier écrit, Marc est selon les spécialistes du NT le premier, mais le texte attribué à Matthieu est un texte de combat, on pourrait de nos jours parler d’un texte militant, écrit pour les disciples, pour nous donc?

 

Les chrétiens à la fin du premier siècle, époque de la rédaction de cet Evangile sont exclus des synagogues, et sont persécutés. Dans cet Evangile le Christ récapitule en lui la destinée d’Israël, le Christ aussi a du fuir en Egypte pour échapper à la mort, lui aussi est allé dans le désert.

 

Pour Matthieu le Christ est le seul qui soit accomplissement de l’Ecriture, au contraire des pharisiens qui annoncent une lecture de la Loi très lourde à porter.

 

De nombreux versets qui précèdent préparent et annoncent la péricope que nous avons lu ce matin, mais avec des tensions parfois entre-eux.

 

Ecoutez :

  • changez radicalement, car le règne des cieux s’est approché. Le Règne est annoncé, mais il faut un autre comportement pour y avoir accès. Et d’autres attitudes.
  • Plus loin : C’est vous qui êtes le sel de la terre. Mais si le sel devient fade, avec quoi le salera-t-on ? Il n’est plus bon qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les gens…Le Royaume n’est pas fait pour les tièdes, pour les fades, il exige des gens volontaires.
  • Aussi : Quiconque se met en colère contre son frère sera passible du jugement, celui qui traitera son frère d’insensé sera passible du sanhédrin celui qui le traitera de fou sera passible de la géhenne de feu. Il n’y a pas de demi-mesure, quiconque se met en colère…avez-vous entendu « en colère »…et contre son frère ? 
  • Quand tu fais un acte de compassion, ne sonne pas la trompette devant toi, comme les hypocrites le font dans les synagogues et dans les rues…L’indispensable humilité …
  • Et enfin : Toi quand tu pries, entre dans la pièce la plus retirée, ferme la porte et prie ton Père qui est dans le secret ; et ton Père qui voit dans le secret te le rendra. La prière n’est pas un acte ostensible mais un mouvement du cœur.

 

Il me semblait nécessaire qu’ensemble nous cheminions dans cet Evangile vers la péricope de ce matin pour mieux l’entendre.

 

Que savons-nous à la lecture de ces premiers versets ?

 

Ø Nous savons que Jésus nous demande de changer radicalement,

Ø que nous ne devons pas être tièdes, mais volontaires,

Ø que nous devons bannir la colère,

Ø qu’il nous faut savoir être véritablement humble,

Ø et qu’enfin notre prière doit être toute de discrétion et non pas ostentatoire.

 

Tout cela peut sembler confus voire parfois contradictoire, mais ce qui ressort de ceci, c’est qu’il n’y a pas de loi générale, qu’il faut parfois savoir se taire, ne pas se draper dans des règles fixes, rigides, dans un rituel, agir avec amour et discrétion.

 

Bref, tout ce que les pharisiens ne font pas !

Ils font porter dans leurs paroles des charges de la Loi impossibles à tenir, ils se donnent à voir dans leurs rites, se font appeler Rabbi, et occupent les premières places.

 

Plaignons, oui, plaignons ces pauvres pharisiens là !

Plaignons-les, mais tenons aussi un regard sur nous-mêmes, et peut être plaignons-nous !

 

Ne sommes-nous pas un peu concernés aussi par cet appel à la vigilance que lance Jésus ?

Ne nous arrive-t-il pas aussi de nous faire donneur de leçons ? Parce qu’un tel, une telle, ne pense pas comme nous ?

La tentation n’est – elle pas grande de nous enfermer dans des chapelles à nos dimensions, où nous égrènerions à l’envie le chapelet de nos multiples certitudes.

Nous ne sommes pas autrui.

Ne sommes-nous pas trop souvent certains d’avoir raison, face à autrui, face à l’autre ?

 

Oui nous avons parfois des attitudes de pharisiens. Nous oublions trop souvent que l’autre est un trésor, une chance, que Dieu nous envoie.

Quel est-il ? Nous ne le savons pas vraiment chacun garde au fond de lui-même sa part de vérité, mais quel qu’il soit il est cette part d’amour et de divin ; il est cette ressemblance divine, et a droit au respect et à l’écoute.

 

Notre point de vue nous y tenons bien sûr, mais lui, mais elle aussi, tient aussi au sien, alors ? Alors parce que tu parles fort, parce que tu as l’habitude, parce que tu as fait des études, tu penses que tu es celui, celle, qui doit imposer aux autres, son avis ?

 

Se voir dans l’œil de l’autre c’est s’accepter frère, ou sœur, c’est s’accepter différents, certes, mais si nous nous accordons quelques instants de réflexions, c’est s’accepter aussi, tellement proches, tellement humains, tellement fragiles.

 

Qui est enseignant parmi nous? Un seul, le Père celui là qui nous appelle, qui nous sauve, qui nous tire.

Ce Dieu là est un, et il nous pardonne, et il nous aime.

 

Oui, il nous arrive de douter, de craindre ce doute, et de nous réfugier alors dans nos dogmes, alors nous lisons les textes, nous les traduisons, et nous décrétons que la vérité est de notre côté, rien ne peut et ne doit nous échapper !

 

Mais nous avons oublié que la source de l’amour n’est pas enclose dans un livre, nous avons oublié que le Christ nous appelle dans son humanité, qu’il chemine à nos côtés, éternels pèlerins d’Emmaüs que nous sommes, et qu’il nous aime.

 

Oubliant cela nous passons notre temps dans l’accessoire, dans la dispute, dans le besoin de plaire, alors que l’essentiel s’appelle la fidélité, la miséricorde, la patience…

 

Un seul d’entre nous est enseignant, un seul est notre maître, un seul est notre Père, le croyons nous vraiment ? Le vivons-nous ainsi au quotidien de notre vie?

 

Disciples nous sommes alors ?

 

Alors notre vie doit changer, un antagonisme global se déploie entre deux manières de vivre, de parler, d’échanger, d’agir...

L’une est tournée vers le paraître, celui, du moins dans ce texte, des pharisiens, l’autre vers l’être...

La première nie l’être en se substituant à lui, c’est le temps de la spiritualité commode et confortable. L’autre insiste sur la réponse, l’écoute, la confiance, le don.

L’une met en avant la publication, c’est le temps des zapping de la pensée, le besoin que l’action soit vue, et plaise, l’autre se base sur le secret, sur l’intériorité.

Dans l’une, un système d’obligations pesantes est promu, dans l’autre chacun est en lien direct et personnel avec le Mystère de Dieu. Dans l’une, il y a « les sachants », les experts, dans l’autre chacun est appelé à être frère de son prochain, chacun étant conduit par le seul et unique maître, le Christ...

 

Pourquoi avoir mis l’accent au début de cette péricope sur la chaire de Moïse ? ne devrait-elle pas rester vide et ainsi renvoyer chacun à sa vérité devant la Parole, sans qu’un intermédiaire quelconque prenne une place trop grande pour lui ?

 

La vie de la Parole de Dieu court le danger d’être ainsi coupée, quand un tel, une telle, s’arroge l’autorité de dire « ceci est la vérité de la Parole ».

 

L’enjeu est grand, car il est celui de l’espace possible, de l’espace nécessaire entre nous, et entre ce qui est dit et celui qui le dit.

Espace qui donne à chacun de pouvoir faire silence, de pouvoir se situer lui-même, de pouvoir se déterminer, de pouvoir recevoir en son temps, en son lieu, en sa vie, une Parole qui chemine au grès de nos doutes, de nos amours, de nos incertitudes, de notre attente et de notre confiance.

 

 « Toutes leurs œuvres ils les font pour être vus des gens » est-il écrit dans cet Evangile.

Cette tendance à vouloir occuper les places signifient une incapacité à se tenir sur soi, dans le silence et la solitude, en intimité avec Celui qui nous fait vivre. C’est refuser la limite inhérente à chacun, chacune d’entre-nous, limite constitutive de ce que nous sommes, humains, tellement humains…

 

Mais si nous prêtons attention à la Parole reçue dans le secret de nos cœurs,  si nous entendons son appel à reconnaître en toi, en toi, en vous tous, un frère, une sœur à aimer patiemment et à qui nous nous adressons avec humilité et respect, alors oui vraiment la vie peut être belle, nouvelle, pour une fraternité dans le Seigneur, une fraternité d’hommes et de femmes debout, respectueux et volontaires.

 

Etre disciples du Seigneur, c’est vraiment une aventure à vivre au quotidien, mais ensemble et dès maintenant.

 

Patrick Duprez

 

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Matthieu 21 : 33-43 - Prédication du dimanche 8 octobre 2017

12 Octobre 2017, 09:25am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Matthieu 21 : 33-43

 

« Ils respecteront mon Fils »; tel est le commentaire innocent d’un père à la fin de cette triste histoire… .

Nous sommes dans les dernières semaines de la vie de Jésus. Entré dans Jérusalem en messie il fait un geste prophétique de purification du Temple. Les chefs du Temple et les membres du Grand Conseil lui demandent des comptes: « Par quelle autorité agis-tu ainsi? » (21,23). Jésus réplique par la parabole du père et des deux fils: c’était l’évangile du dimanche dernier.

Dans l’évangile de ce jour Jésus continue à s’adresser à ses opposants au travers d’une parabole qui décrit les incompréhensions entre un propriétaire et ses ouvriers. Dans ce récit, Jésus utilise trois formules pour essayer de capter l’attention de ses auditeurs aux versets 33, 42 et 43 :« Écoutez cette parabole » puis «N'avez-vous jamais lu dans les Écritures » et enfin « Je vous le dis ». Par ces formules, nous pouvons mesurer comment Jésus cherche à être compris, reçu. Il fait appel à l’intelligence propre de ses auditeurs. Aussi il propose à ses auditeurs de prendre du recul en se situant par rapport à leur propre bon sens, code d’action, puis à leur propre connaissance des Ecritures. Au-delà de tout, Jésus cherche l’échange en vérité entre tous…

Le sens d’une parabole n’est pas toujours évident à saisir pour nous aujourd’hui. Mais il n’en était pas ainsi pour ses contemporains, comme le dit la suite du récit: « En entendant ses paraboles, les chefs des prêtres et les Pharisiens comprirent que c’était pour eux qu’il parlait. Ils cherchaient à l’arrêter… » (21,45-46).

Il y avait un homme qui possédait une terre…Après y avoir planté de la vigne il décide de louer sa vigne à des cultivateurs avant de s'en aller hors du pays pour une certaine période de temps. Durant l'absence du propriétaire, il a été convenu que les travailleurs cultiveront sa terre. En retour, ceux-ci le paieront annuellement avec les produits de la vigne. Ainsi à l'arrivée du temps de la récolte, le maître envoie ses serviteurs pour prendre la part de fruits qui lui revenait. Mais les choses tournent mal car les vignerons n'avaient aucune intention de payer quoi que ce soit au propriétaire. Les serviteurs qui se présentent à leur porte sont accueillis comme des ennemis. Ils ont été battus et assommés à coups de pierres. Certains ont même perdu la vie. Cela force le maître à réagir. Celui-ci envoie d'autres serviteurs, cette fois-ci en plus grand nombre. Malheureusement ils sont tous traités avec la même brutalité que leurs prédécesseurs. Vous voyez que l'histoire n'est guère joyeuse.

Un propriétaire de vignoble, vivant à l'étranger, tente de faire reconnaître son autorité à distance à des travailleurs qui ne lui accordent aucun respect. Le tout dégénère en un bain de sang et même le fils du propriétaire y est passé croyant, peut-être, naïvement que lui serait épargné : « Ils respecteront mon Fils »…

Dans cette parabole, le propriétaire fait preuve d’une confiance absolue puisqu’il part et laisse une liberté totale aux vignerons : ils sont complètement autonomes dans la manière de réaliser leur tâche. Mais voilà, cette liberté, les serviteurs l’emploient mal et ils en viennent à se considérer comme propriétaires de la vigne. Dès lors, le fils, qui va hériter de la vigne, devient gênant pour eux et il faut l’éliminer.

Comment mieux montrer que le désir de posséder et de maîtriser ce qui nous est offert, ultimement, ne peut mener qu’au meurtre et à la violence, que ce soit au sens propre ou au sens figuré.

Oui, ces vignerons n’ont pas su faire ce que le maître attendait d’eux… et plutôt que de mettre leur énergie à tirer le meilleur partie de la vigne en la soignant avec un réel amour pour en remettre le fruit à leur maître, ils ont mis cette énergie à s’approprier un bien qui ne leur appartenait pas. Et non seulement ils sont devenus des voleurs, mais en plus ils sont devenus des meurtriers en assassinant les serviteurs que le maître leur a envoyé pour leur faire entendre raison et même son propre fils. Et quand Jésus termine son histoire et qu’il demande aux chefs des prêtres et aux pharisiens ce que fera le maître avec ces vignerons, on a l’impression qu’ils lui répondent en toute innocence, sans se sentir, ne fut-ce qu’une seule seconde, concernés par cette histoire que Jésus vient de leur raconter… : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il louera la vigne à d'autres vignerons, qui en remettront le produit en temps voulu. ».

Mais Jésus ne se laisse pas démonter et il met définitivement les points sur les « i » : « Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit. ».

En travaillant ce texte, je me suis amusé avoir quels sont les titres que les différentes traductions de la Bible donnent à cette parabole. Un seul de ces titres est neutre par rapport aux vignerons. Les autres ont déjà formulé un jugement négatif sur eux : les métayers révoltés, les mauvais vignerons… Avant même d’avoir commencé la lecture du texte, les vignerons sont désignés comme des méchants, si bien que notre opinion est déjà faite avant d’avoir commencé à lire.

La violence des vignerons nous choque certes: pourquoi s’en prendre avec tant d’acharnement aux serviteurs ? On admet qu’ils ne soient pas ravis de lâcher une part du fruit de leur travail !  N’aurait-il pas suffi de les chasser ? On peut se demander pourquoi ils n'ont pas rendu les fruits au maître. Pourquoi ont-ils traité ses serviteurs avec autant de cruauté? On est frappé par le désir très fort d’avoir la mainmise sur la vigne. Le v. 38 nous donne une partie de la réponse: « Mais, quand les vignerons virent le fils, ils dirent entre eux : Voici l’héritier ; venez, tuons-le, et emparons-nous de son héritage ». Ils voulaient s'approprier l'héritage du fils. Ils voulaient mettre la main sur la vigne, l'utiliser à leur façon, et ne plus avoir de compte à rendre à qui que ce soit.

Mais, frères et sœurs, à travers les serviteurs successifs tabassés, exécutés, c’est la relation à l’avoir, à la possession, qui est en jeu : les vignerons ne veulent rien devoir à leur maître, ils veulent tout avoir.

Cette parabole éclaire les relations humaines : la violence meurtrière induite par le refus de toute relation reconnaissant ce qu’on a reçu de l’autre. « Moi, je fais ma vie, je ne dois rien à personne ! ». Quelle tragique méprise !

Ce propriétaire (bien naïf ?), se révèle un père qui envoie son fils « dans la gueule du loup », avec l’espoir que les meurtriers « respecteront » son fils. Ce qui compte pour lui, ce ne sont plus les fruits, mais le respect, le fondement de toute relation humaine. Nous quittons ainsi le registre économique, dans lequel s’enferment les vignerons. Leur complot pour tuer « l’héritier » dévoile leur jalousie, leur obsession de tout avoir, pas seulement tous les fruits, mais toute la vigne ! Ils oublient l’essentiel : un héritage se reçoit par donation. Tuer l’autre (le fils), c’est refuser que la vie soit vécue comme don reçu et donc à redonner.

Que fera le maître de la vigne ? Jésus interroge ses interlocuteurs, et nous les auditeurs de ce récit. La réponse de la loi du talion vient naturellement ! Ainsi va le monde et ça recommencera avec d’autres acteurs : on espère sans doute que ceux-ci seront meilleurs !

Frères et sœurs, j’ai presque envie de dire que Dieu ne ressemble pas au propriétaire de la vigne, pas plus que nous ne ressemblons à ces vignerons mal intentionnés. Il ne nous est pas demandé d’identifier les personnages du récit avec Dieu ou avec nous-mêmes. Dieu ne va pas punir les infidèles comme le fait le maître de ce récit, au contraire, vous le savez bien, Dieu va s’acharner à gagner à lui tous les humains en commençant par les vignerons de la parabole. C’est là que réside la pertinence de cette parabole.

Cette parabole nous demande d’apprécier la situation ici décrite afin que nous nous corrigions, en fonction de ce que nous avons compris de nos comportements défectueux à l’égard du prochain et donc de Dieu.

Si Jésus donne tort aux vignerons, il ne leur donne pas tort pour les raisons sociales et économiques qui nous viennent à l’esprit. Jésus ne leur donne pas tort d’avoir molesté les serviteurs et tué le fils, même si cela nous choque, il leur donne tort d’avoir voulu contraindre leur maître à changer de comportement vis à vis d’eux. Il leur donne tort d’avoir rompu le contrat qui les liait à leur maître en lui confisquant le droit d’être le maître. Qu’il soit loin ou près, qu’il soit bon ou mauvais, que sa propriété de la terre soit légitime ou pas, le problème n’est pas là. Il est dit qu’il loua la terre aux vignerons, c’est à dire que les vignerons n’étaient pas des esclaves, mais qu’ils étaient liés au maître par contrat librement consenti. Ils devaient normalement payer au maître ce qui lui revenait sans tenir compte de l’éloignement qui les séparait. En agissant comme ils ont fait, ils ont voulu contraindre le maître à exister d’une autre manière, ils ont voulu le reconstruire à leur manière et, en fait, ils le contraignent à ne pas exister, c’est pourquoi ils tuent le fils. Plus de fils, plus d’héritier, plus de maître. Telle est leur logique.

Cependant, frères et sœurs, une histoire de mort subie va se transformer en une histoire de vie. Jésus, devant les spécialistes de l’Écriture, leur révèle la rupture radicale qu’annonçait déjà le psaume 118, 22-23 : « N’avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire ». C’est là l’œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux », à savoir l’annonce d’un autre monde qui n’est pas l’amélioration de celui-ci.

Un temps vient où le Règne de Dieu (et non plus la vigne) sera enlevé aux défenseurs officiels des Écritures, du temple et de la Loi, « pour être donné à un peuple qui produira son fruit ». La violence meurtrière réussira du point de vue du monde et la violence se déchaîne à chaque génération. Mais Jésus nous ouvre à un point de vue : la pierre rejetée par les constructeurs « à la vue courte » devient la pierre d’angle, à laquelle il convient de s’ajuster !

C’est là l’œuvre du Seigneur : merveille sous nos yeux, s’ils sont ouverts pour accepter de tout recevoir, pour pouvoir tout donner en retour, et rendre grâce.

Cette parabole, frères et sœurs, nous rappelle que nous avons reçu le Règne de Dieu en héritage non pour le transformer à notre gré, non pour faire notre volonté, mais la volonté de Dieu !

L’histoire humaine est parsemée de nos manquements à Dieu… Avouons que nous ne sommes pas très loin de la parabole d’aujourd’hui. Mais malgré tout cela, Dieu veut encore et toujours nous faire confiance. Il nous aime avec passion et ne peut se résoudre à nous rejeter à cause de nos exactions. Il croit d’avantage en l’humain que l’humain ne croit en lui-même. Sans cesse il nous pardonne et nous redonne sa confiance. C’est là où nous en sommes.

Frères et sœurs, toute personne qui se sent liée à Dieu est concernée de près ou de loin par cette relation de confiance qui est aussi un avertissement qui lui est fait de ne pas dénaturer la réalité de Dieu en la modelant à notre manière. C’est en agissant ainsi qu’on le tue. La balle est dans notre camp ! C’est vraiment à nous de décider. Dieu ne s’impose pas à nous, il nous propose son amour…Il nous propose de travailler avec Lui pour l’avènement  d’un monde autre et pour Sa gloire…

Amen !

Charles KLAGBA

 

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Prédication du dimanche 1er octobre 2017 - Le Mal

5 Octobre 2017, 09:55am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Job 3, 2 à 10

 

Mc 4, 35 à 41

 

 

 C’est notre actualité, mondiale et personnelle, qui m’a fait relire ces textes. Comment ne pas parler du mal, de la souffrance alors que des milliers de personnes sont victimes des guerres, des ouragans, des tremblements de terres et que parfois un deuil personnel nous frappe ? Comment se taire, alors qu’au moment où nous sommes réunis ici, des pays entiers sont plongés dans le chaos ?

La question du mal traverse nos vies, notre foi, nos doutes. Mais elle traverse aussi la Bible !

Celle-ci n’est pas le livre des merveilles qui servirait à nous donner une réponse à chaque moment de souffrance. Elle est le livre parcouru par ce questionnement essentiel : «  Pourquoi ? ». Des psaumes au livre de Job, des lamentations de Jérémie jusqu’à Jésus en croix disant «  Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » le questionnement est toujours le même : Pourquoi le mal Seigneur ?

 Et à ce pourquoi nous cherchons une réponse, comme si une rationalisation pouvait guérir le chagrin, la souffrance le mal.

Ce mot lui-même est ambigüe et recouvre deux réalités : D’une part le mal « agit » celui causé par l’homme à son semblable et qui engendre parfois deux souffrances : celle qui est subie par la victime et celle de la culpabilité de l’auteur et que la tradition judéo-chrétienne nomme «  péché ».

Et puis il y a le mal –souffrance, dont on ne fait que subir les effets et qui n’a pas d’explication rationnelle. Le mal engendré par des causes dites naturelles mais qui de plus en plus actuellement est lié au comportement des hommes en général ( réchauffement climatique).

 

 L’un et l’autre engendrent le refus, refus d’une certaine image de Dieu comme celui d’Albert Camus pour qui la souffrance injustifiée d’un enfant met en cause l’existence d’un Dieu bon et aimant.

Et chacun d’entre nous n’est-il pas, au fond de lui –même dans ce refus indiscutable ?

Nous tombons ainsi dans la problèmatique du Dieu bon et tout-puissant qui laisserait se manifester le mal ou d’un Dieu impuissant qui ne peut agir.

Comment sortir de ce questionnement ? C’est ce que la théologie, a travers les théodicées a tenté de faire au fil des siècles.

Il s’agissait d’expliquer, de rationaliser le mal comme fruit de la désobéissance humaine, du péché.( à travers la conception augustinienne du « péché originel ». ) Mais la question de la volonté divine reste entière. Pourquoi la toute puissance divine a-t-elle laissé faire l’homme ?

 

Ou bien de dire que Dieu parfait, n’avait pu créer que de l’imparfait, ne pouvant créer son égal. C’est le «  meilleur des mondes possible », tant raillé par Voltaire  au moment du tremblement de terre de Lisbonne.

Qu’ont à faire ces « bonnes raisons » avec la souffrance de chacun, inextinguible ?

 

La Bible se réfère souvent, sur ce sujet au «  juste souffrant » dont Jésus est l’image même.
Le texte de Job, dit cette souffrance inexplicable, ce mal radical qu’on ne peut faire entrer dans une rationalité. Elle amène Job à considérer sa propre existence comme une souffrance

injuste . Qui d’entre-nous n’a jamais ressenti telle injustice. Qui n’a jamais prononcé ce cri de Job. La théophanie finale ne résoud rien , si ce n’est  qu’elle amène Job  à « AIMER DIEU POUR RIEN », position essentielle du croyant qui intègre le «  malgré »

 

 Le texte de Marc sur la tempête apaisée est situé dans une suite de paraboles. Comme celles-ci, elle est chargée de symboles ( eau, symbole de vie et de mort, barque église ou vie elle même ..) La tempête, déchainement de la nature devient le mal lui-même et ne peut pas ne pas nous faire penser aux ouragans récents. « Grand tourbillon de vent, les vagues se jetaient sur la barque au point que la barque déjà se remplissait » C’est l’image même de l’impuissance humaine face au déchainement de la nature. Ce déchainement est parfois pris pour une manifestation divine, théophanie. Ici il n’en est rien

Une image semble au centre de ce récit : « Et lui, à l’arrière, sur le coussin, dormait ». Le silence du maitre, est le silence même de Dieu. Silence assourdissant de Dieu face aux malheurs, à ces peurs, à ces souffrances humaines. Silence de Dieu face aux Caraibes, à l’Egypte, au moyen orient, mais aussi aux enfants malades ou disparus.

Mais ce sentiment de l’absence de Dieu recèle son image . L’athéisme lui-même, comme refus de Dieu en porte l’image.

Mais que répondre face à cette interrogation ? Bien sûr il y a l’apaisement de la tempête par Jésus comme la théophanie à la fin de Job, mais ni l’un ni l’autre n’ont empêché la souffrance d’advenir.. La véritable réponse est dans le questionnement de Jésus « Pourquoi avez-vous eu peur, n’avez-vous pas encore de foi ? »

 

Il est à souligner que le contraire de la foi, c’est la peur ( et non le refus de Dieu )

Face à la souffrance, il n’y a de rationalité, il n’y a qu’une attitude, c’est la FOI.

 Elle est ce qu’il reste à Job quand il a tout perdu. Elle estce qui aurait évité aux apôtres leur souffrance.

«  Aimer Dieu pour rien » La foi n’est pas explication, elle est accrochage à une parole qui fait avancer. Elle est toujours « malgré » et elle n’est pas incompatible avec la plainte ( Cf. Job et es apôtres. ) 

S’adresser à Dieu dans une plainte, c’est une manifestation de la foi.

Encore faut-il disait Paul Ricoeur «  spiritualiser la lamentation »

 

Qu’est-ce à dire ?

 

1° intégrer l’ignorance :

Non Dieu n’a pas voulu cela, non il n’a pas voulu punir mais je ne sais pas pourquoi les choses arrivent ainsi.

 

2°Laisser se répandre la plainte contre Dieu. La relation d’alliance passe par une interrogation mutuelle. Chez les diaconesses le jour du vendredi saint, on récitait les «  impropères », forme de procés que Dieu fait aux hommes pour la mort de Jésus. « Que t’ai-je fait ô mon peuple ? »

De la même manière, la plainte de l’homme est relation à Dieu pour peu qu’elle «  aime Dieu pour rien »

 

3° La victoire sur le mal est en route,, elle n’est pas acquise et l’espérance doit se détacher de l’impatience «  Jusques à quand ? » des psaumes

 

4° Les raisons de la foi, de la confiance en Dieu n’ont rien à voir avec le besoin d’explication de l’origine de la souffrance. Croire, c’est toujours croire malgré.. Il convient d’intégrer ce «  malgré «  dans la foi

 

Avoir la foi, c’est nous dire que nous ne sommes pas seuls, la plainte est aussi relation à Dieu.

 

Elie Wiesel raconte qu’à Auschwitz deux adolescents furent pendus. L’un mourut immédiatement et l’autre mit du temps à mourir . « Où est Dieu dans tout ça ? » entendit Wiesel plusieurs fois, puis une réponse lui vint : «  il est là, au bout de la corde ! » image d’un Dieu qui souffre avec l’homme . C’est là l’image d’une théologie de la croix qui transmute la lamentation dans laquelle la plainte de l’homme est aussi celle de Dieu.

 

Aimer Dieu pour rien comme Job, c’est la foi même, c’est la grâce partagée.

 

Puissions nous entrer dans cette espérance sans impatience, sans comprendre, ll’aimer pour rien, comme Lui nous a aimés.

 

Jean-Pierre Pairou

 

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Prédication du dimanche 16 juillet 2017 - Matthieu 13, 1-23

17 Juillet 2017, 09:04am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Esaïe 55, 10-11

Matthieu 13, 1-23

 

La parabole du semeur ! Y-a-t-il texte plus connu dans nos Evangiles que ce récit ?

Nous allons essayer de relire cette parabole, de la méditer avec des yeux neufs malgré les siècles qui nous séparent de l’époque de sa rédaction.

Et, pour cela, commençons par prêter attention à un petit détail que nous donne l’évangéliste en tout début de ce récit, je relis ce début :

 

 Ce même jour, Jésus sortit de la maison, et s'assit au bord de la mer. Une grande foule s'étant assemblée auprès de lui, il monta dans une barque, et il s'assit. Toute la foule se tenait sur le rivage. Il leur parla en paraboles sur beaucoup de choses.

 

Il y a tant de monde autour de Jésus qu’il est obligé de monter dans une barque. Jésus parle donc depuis une barque à des gens restés sur le rivage. Plus loin dans le récit  les disciples s’approchent de Jésus et lui demandent pourquoi il parle en parabole (v. 10)

 

Cette mise en situation est déjà à elle-seule tout une parabole. Je crois que nous avons là une petite indication très instructive. Si vous visualisez bien la scène mentalement, vous constatez qu’il y a deux places pour écouter la parole de Jésus. On peut écouter de loin, en restant sur le bord du rivage mais on peut aussi s’approcher et même s’embarquer avec Jésus. Cela change tout !

 

D’ailleurs notre texte de ce matin illustre bien la différence entre ces deux écoutes. La première partie du texte livre l’histoire du semeur telle qu’elle reçue de loin, depuis le rivage. Restons donc un moment sur le bord du lac, avec la foule.

 

L’histoire du semeur écoutée de loin

 

Nous ne sommes plus familiers de l’action de semer et nous sommes certainement moins sensibles que les auditeurs de Jésus au caractère absurde de cette histoire. Absurde, oui, car aucun semeur sérieux n’éparpille son grain comme celui du récit. Il est complètement extravagant, ce semeur qui jette à tout va sans regarder où tombe son grain … à moins qu’il ne soit particulièrement stupide. Le grain est un bien précieux qu’on ne gaspille pas. Les contemporains de Jésus le savent bien.

Ils savent aussi que la récolte est aberrante car on n’a jamais vu les mêmes grains semés dans la même terre produire du simple au triple.

Ecoutée du bord du rivage, cette histoire ne peut être entendue c’est-à-dire comprise. C’est une histoire à dormir debout et plus d’un, dans la foule pressée au bord du lac, a dû se dire qu’il écoutait un insensé.

 

Une parabole ne prend sens que si on dispose des deux éléments de la comparaison. Le mot « parabole » est un mot grec (parabolê) qui veut dire « juxtaposition, comparaison ». Mais à ses auditeurs du bord du rivage, Jésus ne livre que la moitié de la comparaison. Il ne leur dit pas à qui ressemble ce semeur excentrique.

C’est parce qu’ils s’approchent que les disciples vont pouvoir questionner Jésus et entendre pleinement cette histoire.

 

Nous reviendrons tout à l’heure sur le dialogue entre Jésus et ses disciples qui occupe le centre du récit. Prenons d’abord place auprès de Jésus, dans la barque même si possible, pour « écouter ce que signifie la parabole ».

L’histoire du semeur écoutée de près

 

La clé est livrée dès les premiers mots (verset 19) : lorsqu’un homme écoute la parole du royaume

 

Nous avons écouté tout à l’heure les versets 10 et 11 du chapitre 55 d’Esaïe que nos lectionnaires proposent en parallèle du texte de Matthieu pour ce matin. Le prophète Esaïe y attribue à  Dieu la comparaison entre Sa parole, parole divine qui est promesse, et la pluie qui fait germer les graines et donc nourrit les hommes.

Voilà donc le terme de la comparaison qui nous manquait quand nous écoutions de loin, il s’agit de la « parole ». « Parole du royaume » dit l’Evangile de Matthieu, cela signifie exactement parole divine ou promesse.

Ce qui est distribué, semé, avec libéralité, sans discernement, voire même dans un grand gaspillage, c’est la promesse divine, la  promesse qu’un autre monde est possible, la promesse qu’un royaume de paix et d’amour est possible. Il y a un mot tout simple pour dire cela, c’est  « évangile » qui veut dire bonne nouvelle. Voilà le grain qui est dispersé aux quatre vents.

 

Le semeur qui nous semblait extravagant ou insensé, qui fait tomber ses graines n’importe où, est donc une image de l’universalité de l’évangile. L’évangile n’est pas destiné aux uns et pas aux autres, aux juifs et pas aux païens, aux hommes et pas aux femmes, aux riches et pas aux pauvres ….. Non, il est à la portée de tout le monde, où que l’on soit, qui que l’on soit.

 

Cette parole distribuée avec libéralité ne va pourtant pas être reçue de la même manière par tous et la parabole se prolonge par une comparaison entre les types de terrain ensemencés et les cœurs. Il n’y a qu’une parole, qu’une promesse mais il y a une grande diversité chez les humains. La parabole devance de plusieurs siècles nos théories modernes de la communication qui étudient comment un même message peut être reçu de façons bien différentes selon le récepteur. Nous faisons, hélas, l’expérience quasi quotidienne de ces distorsions de sens entre émetteur et récepteur.

 

Quatre types de récepteurs sont ici pris en compte, des plus aux moins sourds :

  • Les premiers sont ceux qui n’ont pas même conscience d’avoir reçu une parole-promesse. Ils sont au bord du chemin ou au bord du lac comme la foule qui n’a entendu qu’une demi-parabole.
  • Les seconds ont bien entendu la parole-promesse mais ils ne l’ont pas laissée pénétrer assez profondément en eux et, au premier obstacle, ils l’oublient. La parole n’a pas pris racine en eux. On pourrait les appeler « cœurs de pierre ».
  • Les troisièmes sont presqu’aussi sourds que les premiers, ils entendent bien vaguement quelque chose mais leurs soucis quotidiens les détournent d’écouter mieux. Gagner de l’argent, se faire une place au soleil, se divertir … tout cela étouffe la parole comme les épines étouffent la semence du semeur. Ce sont des « cœurs épineux », pourrait-on dire.
  • Les quatrièmes enfin sont les auditeurs attentifs de la promesse, ceux qui se sont approchés,  et en eux, cette parole devient un moteur d’action. Ils n’ont pas seulement des oreilles pour entendre mais aussi des mains pour faire. Ils portent du fruit. Mais parmi eux, on retrouve une nouvelle diversité, ils n’ont pas tous la même efficacité.

 

Je note que la différence quantitative qui distingue, entre eux, les membres du quatrième groupe ne correspond à aucune différence qualitative. Peu importe la productivité, peu importe qu’on produise 30, 60 ou 100. Ce qui importe seulement c’est que nous fassions fructifier le don reçu. Le royaume promis ne connaît ni la rivalité ni la compétition.

Voici donc ce qu’on entend quand on écoute la parabole au plus près de Jésus : le don de la parole est gratuit et destiné à tous sans aucune réserve mais les cœurs des hommes ne sont pas tous bien disposés à le recevoir et à lui faire porter des fruits.

 

 

Cela est simple mais il reste un souci et les disciples l’expriment clairement quand ils demandent à Jésus (verset 10) « pourquoi leur parles-tu en paraboles ? »

 

L’étonnement des disciples

 

Si l’on résume en français courant la réponse sensée être donnée par Jésus à cette question, elle consiste à dire que certains sont désignés pour comprendre et d’autres condamnés à ne jamais comprendre. Le ton en est solennel et presque incantatoire.

Les versets (10 à 18) qui sont insérés entre l’histoire du semeur et son interprétation se retrouvent dans les trois Evangiles synoptiques mais ils portent la marque propre de Matthieu dans le texte que nous avons lu. Ces versets ont fait et font encore l’objet de nombreux et savants commentaires. Sans entrer dans des détails qui n’ont pas leur place ici, je retiens seulement qu’il faut en « attribuer la rédaction à des courants apocalyptiques de l’Eglise primitive[i] ». Ils appartiennent à une époque de persécution qui pensait la fin des temps proche et il est prudent de prendre nos distances avec eux.

 

Il reste que nous pouvons nous interroger, nous aussi, sur la raison de parler en parabole.

Il faut savoir que c’est un procédé courant dans le monde sémitique. C’était une façon pédagogique de s’exprimer. En prenant des situations ordinaires de la vie quotidienne, on voulait rendre compréhensibles des vérités abstraites. Paradoxalement, loin de voiler la vérité comme le suggèrent les versets 10 à 18, la parabole essaye donc de la rendre accessible.

 

« Accessible » ne veut pas dire « sans effort ». L’évangile est bien offert à tous mais tous ne savent pas le recevoir et c’est ce qu’illustre à sa façon la mise en scène du texte sur laquelle j’attirais l’attention en commençant.

On peut être sourd à l’enseignement de Jésus si l’on reste sur le rivage ou, autre image, si on la reçoit du bord du chemin.

On ne peut y être réceptif que si on s’approche, si on va y voir de près. Ce matin, nous sommes invités à « aller voir de près » ces textes qui nous transmettent l’évangile, la Bonne Nouvelle. Les textes resteront lettre morte si on reste sur le rivage, il faut s’embarquer avec Jésus.

 

Oui cette Bonne Nouvelle est accessible à tous mais ne laissons pas les cailloux, épines, oiseaux l’empêcher de croître en nous et nous empêcher de la faire fructifier .

Sylvie Queval

 

[i] Synopse des quatre Evangiles, Benoit et Boismard, 1980,  tome II page 185

 

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