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Eglise Protestante Unie de Narbonne

predications

Matthieu 5, 38-48 . Prédication du dimanche 19 février 2017

24 Février 2017, 17:05pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Mt . 5, 38 à 48.

 

Si l’on avait à donner un titre à ce passage celui de « Mission impossible » serait sans doute celui qui conviendrait le mieux, tant il est en rupture avec ce que nous sommes.

Situé dans le « sermon sur la montagne », il suit les paroles des « béatitudes » et nous poursuit dans la contradiction. Ce texte va à l’encontre de notre vécu. Jésus reprend « ce qu’il nous a été dit » et poursuit l’opposition entre être humain et Père qui est dans les cieux.

Nous vivons dans un monde cruel, inhumain, où les barbaries se succèdent. Nous avons tous au cœur- à travers nos sentiments, nos prises de positions, ce sentiment d’une justice qui est celle de « l’œil pour œil, dent pour dent ». Cela nous semble naturel et a forgé nos institutions. ( nous y reviendrons )

Mais au milieu de cette barbarie ambiante qui parfois nous guette, il est des résistants à cet « œil pour œil ». Il est des êtres qui, sans qu’ils se disent pour autant chrétiens, tentent de sortir de ce cercle vicieux de la haine et de la vengeance. Lors de l’attentat du Bataclan, une voix s’est élevée, celle du journaliste Antoine Leiris, et ce d’abord à travers une lettre bouleversante que je vous livre ici :

 

Lettre de Antoine Leiris

19/11/15

“Vous n’aurez pas ma haine”

« Vendredi soir vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine. Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir, vous êtes des âmes mortes. Si ce Dieu pour lequel vous tuez aveuglément nous a fait à son image, chaque balle dans le corps de ma femme aura été une blessure dans son coeur.

Alors non je ne vous ferai pas ce cadeau de vous haïr. Vous l’avez bien cherché pourtant mais répondre à la haine par la colère ce serait céder à la même ignorance qui a fait de vous ce que vous êtes. Vous voulez que j’ai peur, que je regarde mes concitoyens avec un oeil méfiant, que je sacrifie ma liberté pour la sécurité. Perdu. Même joueur joue encore.

Je l’ai vue ce matin. Enfin, après des nuits et des jours d’attente. Elle était aussi belle que lorsqu’elle est partie ce vendredi soir, aussi belle que lorsque j’en suis tombé éperdument amoureux il y a plus de 12 ans. Bien sûr je suis dévasté par le chagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je sais qu’elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouverons dans ce paradis des âmes libres auquel vous n’aurez jamais accès.

Nous sommes deux, mon fils et moi, mais nous sommes plus fort que toutes les armées du monde. Je n’ai d’ailleurs pas plus de temps à vous consacrer, je dois rejoindre Melvil qui se réveille de sa sieste. Il a 17 mois à peine, il va manger son goûter comme tous les jours, puis nous allons jouer comme tous les jours et toute sa vie ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre. Car non, vous n’aurez pas sa haine non plus. »

Cette lettre, puis le livre de Antoine Leiris m’ont paru essentiels, parce que précisément la victime d’un acte barbare refuse de se laisser aller à son instinct. Alors que la haine serait naturelle, comprise et partagée par tous, il s’y refuse au nom de la Vie ( et, une fois encore, sans qu’on sache s’il est chrétien ).

Mais, cet « œil pour œil », si l’on y réfléchit, n’est pas seulement le lot de l’individu comme sentiment naturel et compréhensible, il fait aussi partie des structures de nos sociétés à travers la notion de « justice ». Dans notre société, et sans que nous n’y prenions garde, tant cela parait naturel, il existe un « Ministère de la Justice ». Or de quoi s’agit- il si ce n’est d’ajuster une peine à un délit ou un crime. Comme si la « peine » avait un caractère « magique « de compensation !

Si nous y réfléchissons, nous voyons que cet « œil pour œil » qui, bien sûr protège plus ou moins la société, n’a qu’un caractère « métaphysique », surtout lorsqu’on voit parfois le peu d’efficacité du système.

Il ne s’agit nullement de remettre en cause ces structures, simplement de prendre conscience de ce qu’elles sont.

Au niveau individuel, comme au niveau collectif, la fausse équivalence « délit-punition » apparait comme une évidence, même s’il ne répare en rien l’effet du délit.

Je crois qu’il y a là, une distinction essentielle entre « justice humaine » et « Justice divine ».

Face à la Loi de son temps, face à nos lois, Jésus oppose des comportements contraires à la vision humaine, sociale. Pourtant Jésus dit « qu’il n’est pas venu abolir, mais accomplir la loi et les prophètes. »

La Loi, les lois sont comme une préparation à une valeur plus haute : celle de l’Amour, qui va au-delà de l’impuissance humaine.

Il est à chaque fois question de rencontre. Pour Jésus, comme pour nous, la rencontre véritable entre humains est essentielle.

Rencontrer, c’est trouver dans l’autre, qui soit- il, quoiqu’il ait fait, son humanité sous ses deux facettes – bien-mal-.
Ce à quoi Jésus invite, c’est à aller au-delà et retrouver en chaque homme « l’image de Dieu » qu’il est, par le plus, l’au-delà de l’humain.

« Tendre la joue, laisser son manteau, accompagner, aimer ses ennemis » autant d’actes qui nous sont présentés comme conditions pour devenir « fils du Père qui est aux cieux » « soyez parfaits » dit Jésus, sachant bien que c’est impossible pour l’homme.

Ce qu’il propose c’est un chemin qui va vers l’au-delà de nos limites. C’est comme une « utopie » dont un penseur sud-américain disait qu’elle est un horizon qui recule lorsque nous avançons, mais sert précisément à nous faire avancer.

Il en est de même de la Parole évangélique qui est là pour nous faire avancer sur le chemin du Seigneur. Nous savons que nous ne serons jamais arrivés mais resterons toujours des « apprentis chrétiens » . ( Théodore Monod ). Mais nous savons que l’Amour inconditionnel de Dieu nous attend et que notre chemin n’est rien d’autre que celui du témoignage.

Ce témoignage est celui de l’amour que nous pouvons donner : « aimer l’homme pour ne pas manquer Dieu » dit M. Zundel qui dit aussi :

"Vous êtes le Christ des autres. Ils n'ont pas d'autres Christ que vous, parce que c'est uniquement à travers vous qu'ils voient le Christ. Où voulez-vous que l'homme de la rue, où voulez-vous que nos contemporains découvrent Dieu comme une expérience vivante, sinon à travers nous? Pour eux, ce ne sont pas les livres, ce ne sont pas les discours qui pourront jamais rien changer à rien... Il s'agit uniquement d'un témoignage où, dans une vie dont la noblesse et le rayonnement porteront partout la lumière et la joie, que l'homme d'aujourd'hui découvrira ce Dieu caché au plus intime de lui et qui ne cesse de l'attendre..."

Puissions- nous, malgré nos faiblesses, malgré notre humanité apporter chaque jour, là où nous sommes, le témoignage de l’inimaginable amour de Dieu pour nous.

Jean-Pierre Pairou

19/02/17

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Matthieu 5, 15-37. Prédication du dimanche 12 février 2017

24 Février 2017, 17:02pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Prédication du culte du 12 Février

Matthieu 5,17-37

 

Je crois que nous sommes en ce moment, certes dans ce culte, après la lecture de l’Evangile, à un point culminant, mais sans doute aussi quand nous prenons un peu de recul pour réfléchir, après avoir ouvert la Bible quand nous regardons le monde, notre monde, déboussolé, par les diverses nouvelles et péripéties qui l’agitent ainsi que celles du monde politique qui nous interrogent et nous choquent, quand nous apprenons que des milliers de personnes meurent en méditerranée ou qu’elles sont rejetées au seul motif qu’elles sont étrangères de culture, de langue et de religion. Oui nous sommes avec ces paroles de l’Evangile à un point que volontairement, je qualifie de crucial, et vous comprenez pourquoi cet adjectif ce matin. Crucial vient du latin « crux » la croix, le panneau sur la route dans cette forme nous propose un choix entre deux directions possibles…en philosophie l’instancia crucis, c’était l’importance ou la permanence de la croix, la possibilité de choisir entre deux hypothèses…

C’est ce que nous lisons dans le Dt, que choisissons nous vraiment, la vie et le bonheur, ou la mort et le malheur .

La parole de l’Evangile d’aujourd’hui ne nous propose-t-elle pas aussi un choix crucial ? Essayons de nous approprier et de comprendre ce que nous dit la Parole de l’Evangile.

Jésus commence par nous annoncer que sa venue n’a pas pour conséquence l’abolition de ce que nous nommons l’ancienne Loi, mais au contraire que sa venue est le signe de l’accomplissement de cette ancienne LOI.

Venir l’accomplir signifie bien évidemment dans notre langue, dans le dictionnaire qui est aujourd’hui le notre, venir la réaliser, venir l’exécuter, mais cette phrase prend aussi le sens plus théologique d’un aboutissement. C’est l’aboutissement en Jésus de la Loi et des prophètes, comme un fleuve aboutit à la mer… On ne peut imaginer nos terres sans ses fleuves qui les irriguent, et où donc iraient-ils s’ils n’avaient la mer ou l’océan pour déverser cette eau née à des centaines et parfois des milliers de kilomètres…

Cette première loi, riche de l’apport des siècles, de textes de sagesse, de narrations historiques et allégoriques, véritables nourritures pour un peuple affamé de divin, a bercé aussi Jésus et ses disciples.

Or, l’Evangile ce jour nous la présente comme relative.

Elle ne passera pas avant que « tout ne soit arrivé », dit Jésus, tout c’est tout ce que contient la Promesse de la Bonne Nouvelle, tout c’est le mystère de cet accomplissement.

Relative ? Oui sans doute, mais le paradoxe dans l’Evangile c’est que tous doivent pourtant s’y soumettre, à cette ancienne loi, le riche comme le pauvre, la femme comme l’homme, le maître comme le serviteur, l’enseignant, comme l’enseigné.

Cette première Loi est universelle.

Mais acceptée, suivie, par tous, cette loi suffit-elle à Jésus ?

Non.

Mais alors qu’est-ce qui est en jeu ?

L’accès au Royaume !

C’est la clef de cet Evangile, nous y reviendrons.

Jésus nous parle de l’accomplissement, mais de quoi ?

D’une autre justice qui dit-il doit être supérieure à celle des scribes et des pharisiens.

Que connaissons-nous aujourd’hui des héritiers des scribes et des pharisiens ? Aujourd’hui, nos frères et sœurs juifs, ceux que nous pouvons côtoyer, ceux que je connais, avec lesquels j’échange, régulièrement, nous donnent l’image d’une obéissance humble et fidèle à la Loi, à la Torah. Il en a été toujours ainsi, malgré le temps, malgré la nuit des camps qui s’est un jour abattue sur le peuple juif et sur le monde.

Mais il nous est demandé autre chose qu’une fidélité, il nous est demandé un déplacement, un vouloir, et surtout, un agir chrétien.

Or, ce faisant le message de l’Evangile, la formulation de Jésus, semble nous faire passer du raisonnable de la loi à l’excès de sa Parole, est-ce le cas ?

Ainsi le commandement de ne pas commettre de meurtre, qui demeure, s’augmente du risque de punitions que fait encourir la colère, l’insulte, contre le frère…

Ainsi si nous sommes brouillés avec tel ou tel, et ça arrive, si nous avons des adversaires, et ça arrive, il nous faut aller vers eux avant d’aller vers l’autel.

Ainsi, si l’adultère reste un interdit regarder avec convoitise une femme, ou un homme, est déjà un adultère.

Réexaminons cela.

Tuer est une chose terrible, quel qu’en soit le motif. Supprimer une vie, une histoire...C’est une tragédie. L’histoire de notre pays est parsemée des sillons de ces vies trop tôt brisées. Des guerres ont déchiré des destinées, et le paysage de notre pays est ponctué de monuments à nos morts, sur lesquels sont inscrits les noms et parfois l’histoire de tout un village…

Plus récemment la violence s’est faite plus insidieuse, portées par des enfants, parfois nos propres enfants, et nous en avons ressenti partout les violents ressacs lors des attentats qui ont ensanglanté New York, Paris, Nice et d’autres villes dans le monde.

Il y a peu nous débattions en Cercle d’Evangile et Liberté de non violence, et une question s’est posée, existe-t-il des raisons de prendre les armes ? Et comme toujours quand il y a débat il y a des avis contradictoires...J’étais parmi ceux qui disaient n’oublions pas nos anciens et particulièrement ceux qui ont choisi la Résistance, les maquis, ceux qui ont choisi de défendre ce pays...si tous n’étaient pas armés, beaucoup l’étaient, et parmi eux aussi des chrétiens…et s’il le fallait, aujourd’hui que ferions-nous ?

C’est la raison pour laquelle ces impasses politiques, économiques, sociales, et spirituelles dans lesquelles semble se perdre notre monde doivent pouvoir trouver des sorties nouvelles, audacieuses, respectueuses, et comme chrétiens nous devons avoir notre mot à dire. Nous ne pouvons nous dérober, la maison du Père, ce n’est pas d’abord, ce n’est pas surtout, non, c’est seulement le cœur de chacun d’entre nous, qui accepte ou non de s’ouvrir pour le frère. C’est crucial. Notre monde a désappris ce langage. Le choix de l’engagement nous est proposé, mais comment le recevons-nous ?

Oui tuer est une chose terrible, mais nous oublions trop souvent que la parole aussi peut tuer. Une parole injurieuse, blessante, et il y a tous les jours des paroles de vie ou de mort…le regard, ou le non regard sur une personne peut tout changer dans sa vie lui donner espoir, confiance, ou au contraire le rejeter dans ses angoisses, dans sa solitude, dans sa peur.

La parole radicale de Jésus a alors une double conséquence.

D’abord en ce qui concerne nos actes religieux. Ceux-ci ne sont pas une fin en soi. Ils ne sont que des moyens, que ce soit le sabbat, fait pour l’homme et non le contraire, ou la prière, les études bibliques, les cultes, celui-ci par exemple, si tous ces temps privilégiés ne nous rappellent pas qu’il y a autour de nous des gens qui existent, des frères, des sœurs, des personnes, à quoi bon ouvrir la Bible ?

Qu’as-tu fait de ton frère ? Ainsi résonne comme un écho dans nos cœurs la vieille question de la vieille loi…et que répondons-nous aujourd’hui ?

Ensuite l’offrande demandée ne remplace, ni ne précède l’exigence de la réconciliation.

Nos religions, nos sacrements, nos rites, nos cultes, ne servent qu’à nous donner des impulsions, à nous faire franchir des étapes, à nous mouvoir, et peut être faut-il aussi apprendre à se passer de ces temps, qui pourraient n’être que des œuvres, si nous ne savons servir nos frères…

Oui servir le frère. Le chrétien est un être de relation, et il arrive que, les circonstances aidant, la relation avec le frère se casse.

Et il nous est demandé alors de nous réconcilier avec celui qui est devenu un adversaire, et la précision de l’Evangile, « en chemin » nous dit quelque chose de cette réconciliation.

  1. de notre existence quotidienne qu’il s’agit, quand Jésus dit « en chemin », c’est de notre chemin de vie qu’il s’agit, au quotidien, c’est peut être savoir se priver de la certitude « d’avoir toujours raison », d’être celui qui sait toujours tout, se laisser libérer du besoin de gagner contre l’autre, et ce, quel que soit l’instance dans laquelle nous nous trouvons, notre famille, nos amis, un parti politique, nos voisins, parfois notre Eglise...

Mais soyons attentifs, aussi, au fait que la réconciliation n’est pas de force, soyons attentifs au risque de démagogie, l’autre a aussi une intelligence, un point de vue, la force de se réconcilier ou de pardonner ne se commande pas, elle se reçoit, elle se reçoit de Dieu, et de l’Esprit Saint, comme une grâce.

Mais alors ce qui nous est proposé par Jésus, n’est-ce pas d’abord de nous réconcilier avec l’adversaire le plus coriace, je veux dire notre égo, nous même ?

Et même si l’autre a quelque chose à nous reprocher, se réconcilier, avec nous même et avec lui, c’est savoir accepter que l’autre soit digne d’avoir lui aussi son avis, digne d’avoir une pensée, un point de vue… y compris dans les petits cercles parfois trop bien pensants de nos vies…Nous avons remplacé, je le crains, le prochain par le voisin, inaugurant une culture de l’immédiat, de la communauté, au détriment de l’universel, celui qui n’est pas le voisin, quelle que soit la distance, c’est l’étranger, c’est l’autre, l’autre me fait peur, alors j’essaie de retrouver le même, celui qui a des caractéristiques communes avec moi, il habite le même village, il aime les mêmes choses, le voisin résume bien ça. Oui nous sommes devant un choix rester entre voisins, ou recevoir l’autre ?

Jésus parle ensuite de l’adultère.

La Loi interdit l’adultère, nous rappelle Jésus, mais elle autorise la répudiation, qui permet d’avoir d’autres femmes. En ce domaine aussi Jésus radicalise alors son propos, regarder une femme avec convoitise est aussi adultère dit-il.

La convoitise envers une autre personne ressemble, disent les cliniciens, à l’instinct de l’animal qui scrute sa proie, parce qu’il veut manger, c'est-à-dire tuer ce qu’il désire. L’autre n’a littéralement rien à faire, rien à dire. Il faut qu’il s’efface, qu’il disparaisse devant la toute puissance, qu’il se laisse engloutir.

Pour expliquer mon propos, souvenez-nous d’une publicité ahurissante, pour une marque de voiture très connue, qui éclairera ce que je veux dire.

Elle se présente sous la forme d’un film en noir et blanc qui majore le côté un peu luxueux et mystérieux. On y voyait un homme très BCBG dans une luxueuse voiture, et sur un trottoir une femme très BCBG elle aussi, marcher, des enfants jouent au ballon, et le ballon va sur la route. Il y a menace pour les enfants. L’homme arrête la voiture, ramasse le ballon et le tend aux enfants avec un sourire. Puis il remonte en voiture, la femme regarde la scène et sourit aussi. La voiture repart et s’arrête à son niveau à elle, la portière côté passager s’ouvre, elle monte alors dans la voiture.

Ecoutez ce que la publicité disait : « Il a l'argent, il a le pouvoir, il a une AUDI il a une âme, il aura ... la Femme »

Il s’arrête devant la femme, et la femme monte alors dans sa voiture (symboliquement la porte de la voiture qui s’ouvre et se ferme l’engloutit) elle disparait, n’existe plus, elle se retourne vers la caméra et ce qui est terrifiant c’est elle qui conclut en disant : il aura ... la Femme " Ce film est toujours visible sur internet.

Sans commentaire, mais ça en dit beaucoup sur ce que nous psychologues nommons la psyché, pour faire simple, de ceux qui ont imaginé, et fabriqué ce film.

En Mt 19,8 Jésus rappelle « c’est à cause de la dureté de votre cœur que Moïse vous a permis de répudier vos femmes, mais au commencement il n’en était pas ainsi ».

Et les versets 29-30 de l’Evangile de ce jour où il est question d’amputation et d’éborgnement, vous l’avez entendu, nous aident me semble-t-il à comprendre le raisonnement de Jésus dans sa radicalité.

Non il n’est pas possible de perdre impunément, une partie de soi même, il faut donc éviter cela, éviter quoi ? Eviter la perte d’une paix en nous même, d’un regard apaisé sur nous-mêmes, éviter de devenir in-tranquille en nos esprits, ce que génère l’adultère…

Non les femmes ou les hommes ne se possèdent pas, ne s’achètent pas. Et même si le langage de notre monde ne nous entend pas, nous devons nous garder de l’illusion de la toute puissance et de son regard, sur elle, sur lui.

Le manque fait partie de notre vie, de l’enfance à sa fin, il nous faut vivre et accepter ce que dans les sciences humaines nous appelons « la castration symbolique ». C'est-à-dire que nous ne pouvons avoir tous les hommes ou toutes les femmes. Assumer le manque, telle est notre existence, ni la femme, ni l’homme ne sont là pour être mangés, mais pour être reçus comme des personnes, rencontrés comme des personnes, aimés et désirés comme des personnes.

Et vous le savez, le texte hébraïque nous le dit, la femme est issue du côté de l’homme et non de sa côte, et je me demande si les discussions que nous rencontrons parfois, à propos de cette traduction, y compris parmi mes amis hébraïsants, ne cache pas, l’angoisse de ce manque là, c’est peut être plus facile me dis-je, de laisser une côte, qu’un côté.

Alors une fois que l’on a dit tout ça, qu’en est-il du Royaume des cieux ? Jésus nous dit « non vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux ». Il nous connait donc si bien que ça ? Peut être sait-il aussi que nous ne l’ignorons pas nous-mêmes.

Notre vie est peut être sombre, brisée, avec des accès de jalousie, de rancune, des colères, des désirs…des vies inavouables…

Mais l’Evangile de ce jour nous dit aussi autre chose. L’accès à ce Royaume passe d’abord par reconnaître en nous l’existence d’un royaume intérieur, qu’il faut sans doute le repenser, le mettre un peu en ordre. Il ne faut pas le détruire, mais l’accomplir, mais comment ?

Tout dépend de chacun, des lieux, des circonstances, accomplir le monde, comme citoyen, ou nous même, nous accomplir, laisser notre moi en dialogue avec tout ce qui l’habite, avec l’espérance de Dieu, sans que rien ni personne ne soit oublié, le frère, le conjoint, l’autre, le prochain quoi…

Oui, le Royaume c’est aussi penser que nous ne sommes pas seuls. Tous sont appelés, et tous nous concernent, on n’entre pas seul en les bousculant, le Royaume est un espace qui renvoie à notre royaume ici même.

Car cet acte de foi entre Dieu et nous-mêmes fait intervenir le tiers oublié, la foi n’est pas une coquetterie, des humains sont en relation les uns avec les autres, ils alimentent notre vie, notre foi, ils font vibrer notre royaume.

Nous sommes attendus dans la cité, nous devons y prendre toutes nos responsabilités, oui il faut appliquer la loi, non comme un dogme, mais comme on ouvre un espace d’humanité, alors nous découvrirons peut être, une promesse derrière la règle qui la contient, la promesse d’une vie réconciliée entre les hommes, une vie réconciliée entre nous.

C’est d’un chemin de conversion qu’il s’agit, n’en doutons pas. Faisons le choix de ce chemin là, choisissons la vie et le bonheur, premiers pas vers le Royaume…

Nous pouvons dire aussi ici, aujourd’hui, un chemin de réforme qui est ouvert en permanence, jour après jour, pour nous tourner sans cesse et toujours à frais nouveaux vers Celui qui ouvre la porte du Royaume.

Il en est la vérité, la vie et le chemin même.

AMEN.

Patrick Duprez

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Invitation à suivre Jésus. Mt 4, 12-22 - Prédication du dimanche 22/01/2017.

26 Janvier 2017, 11:20am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Textes bibliques : Esaïe 8 : 23-9 :1-3; Matthieu 4 : 12-22

 

Jean-Baptiste a annoncé l’entrée en scène de Jésus puis il l’a baptisé dans le Jourdain : « Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde ».

Nous sommes ici à un moment charnière de l’Evangile de Matthieu.

Jean est arrêté, lui qui appelait à la repentance et à la conversion et qui annonçait le ministère de Jésus. Et voici qu’après l’arrestation de Jean-Baptiste, Jésus se retire en Galilée, où il se sent plus en sécurité.

Vous savez, Jésus n’est pas un téméraire fanatique. Il sait qu’il ne faut pas aller au devant de la persécution, qu’il ne faut pas céder à la violence mais l’éviter. La mission de Jésus est rythmée par ces retraites stratégiques (dans le désert au début ce chapitre) à Capharnaüm dans notre péricope) et, à Gesthsémané plus tard) ; ces moments paradoxaux, où, devant la menace, il semble renoncer. Jésus n’est jamais là où on l’attend ! Il surprend. Peut-être qu’il ne veut pas tout simplement aller au devant du danger car sa mission ne fait que commencer.

Jésus est l’unique, il l’est vraiment et, par cela, il nous donne de mieux nous connaître comme humain, de mieux cerner notre propre cheminement de vie, de mieux repérer ce qui peut nous aider à devenir humain. La manière dont Jésus avance dans sa vie, telle qu’attestée dans l’Evangile, peut guider notre propre manière.

La figure de Jean-Baptiste disparaissant, Jésus se trouve comme à devoir occuper sa place et, par cela, il développe son propre style, sa propre manière. Il nous dit aussi que mettre les pas dans celui de notre prédécesseur est aussi un moyen de marcher sur notre propre chemin…Jésus se retire donc, loin des siens, près de Capharnaüm, à côté de la mer de Galilée (aujourd’hui le lac de Tibériade), sur les territoires de Zabulon et de Nephtali dont parle le prophète Esaïe dans notre premier texte.

Le prophète nous annonce la gloire et la lumière du Seigneur sur les terres galiléennes de la route de la mer et du carrefour des païens (Esaïe 8, 23).

En plus de sa stratégie de ne pas délibérément affronter le danger, Jésus se retire dans cette contrée, à la périphérie du centre religieux du peuple d’Israël pour accomplir les prophéties et pour se hâter d’appeler à lui ceux qui devaient être ses élèves et collaborateurs, car c’était dans celle ville qu’ils exerçaient leur métier de pêcheurs. C’est dans cet endroit excentré, humble, que le ministère de Jésus va commencer loin de Jérusalem, loin des institutions religieuses ou sociales.

A partir de ce moment, Jésus se met à proclamer : « Convertissez-vous, car le Règne des cieux s’est approché. »

Voilà ce qui naît en lui comme parole, dans ce nouveau contexte.

C’est une parole tournée vers les autres : « convertissez-vous » dans une urgence qui s’impose à tous, aussi bien aux autres qu’à lui : la venue du Règne des Cieux…Jésus marche sur ce chemin avec la conviction que ce chemin est en lien avec ceux des autres, et celui de l’humanité entière. Il ne se situe pas dans une aventure individualiste, centrée sur son seul devenir, mais dans la perspective que son chemin propre est en lien profond avec ceux de tous les autres.

« Convertissez-vous, car le Règne des cieux s‘est approché. ». On peut aussi traduire par : « Il faut que vous réorientiez votre vie, car le monde de Dieu a commencé à vous rejoindre. »

Jésus ne dit dans ses prédications que ce que Jean avait déjà proclamer. Il ne parle pas encore de lui-même. Il se contente de prêcher la conversion que Jean venait de faire. Stratégiquement, c’était une assez bonne chose de faire admettre la conversion, alors que le peuple n’a pas encore conçu de Jésus-Christ une assez haute opinion. Jésus hésite même à parler avec force. Il ne menace point son auditoire, comme Jean, de « cette hache tranchante, qui devait couper l’arbre par la racine. ». Il ne dit point: « Qu’il va purger son aire, et jeter la paille dans les flammes éternelles. ». Il n’annonce d’abord que des biens; et il commence par faire découvrir à ceux qui l’écoutent le règne qu’il leur prépare. C’est bien de lumière dans les ténèbres dont il s’agit dans l’évangile de ce jour « Le peuple qui se trouvait dans les ténèbres a vu une grande lumière ».

La lumière va resplendir au bord de ce lac sur Simon et André, sur Jacques et Jean et puis sur tant d’autres.

Jésus commence à constituer son groupe de douze disciples, douze comme les tribus d’Israël, car Dieu s’incarne dans une histoire, dans l’histoire d’un peuple. Douze pour manifester l’universalité de la mission de Jésus, représenter ce peuple nouveau rassemblé par Dieu à la fin des temps.

Dans ce récit, comme dans bien d’autres rencontres de Jésus rapportées par les Evangiles, le déroulement est le même. Jésus marche, il voit, il appelle, il est suivi : « il voit deux frèresil leur ditils le suivent ». «Il voit deux autres frères….., il les appelle…., ils le suivent ». Jésus s’adresse à des pêcheurs en pleine activité pour en faire des pêcheurs d’hommes.

En lisant ce récit de Matthieu, nous sommes surpris par la brièveté de la scène. Sur une simple parole de Jésus, Simon, André, Jacques et Jean vont lâcher leurs filets, abandonner leur barque et leur père et suivre Jésus, sans le moindre état d’âme, sans poser aucune question, sans s’inquiéter de la suite.

« Suivez-moi…»

Chers frères et sœurs, ici nous est manifestée la radicalité du changement de vie auquel nous sommes appelés. Il ne s’agit pas d’abandonner femmes et enfants et de se retirer loin du monde mais de répondre immédiatement à cet appel, sans nous poser de question, sans regarder en arrière ni penser à l’avenir, sans nous interroger sur nos capacités.

Dire tout simplement « oui ».

« Oui » pour que Jésus transforme nos vies, « oui » pour que Jésus nous conduise vers les autres, « oui » pour que, à notre tour, après avoir été pêchés, nous devenions pêcheurs d’hommes. L’obéissance à Jésus ne souffre pas de délais, de tergiversations. Jésus nous appelle, suivons-le !

Mais si l’appel est radical, c’est que le don qui en découle est sans mesure. Le royaume est proche, il est même là, en sa personne. Comment peut-on encore suivre Jésus et devenir pêcheur d’hommes ? Matthieu nous le rappelle :

En observant Jésus et en l’écoutant : il marche, il voit, il appelle. Cela semble si simple …

Comme Jésus, et avec son aide, nous pouvons nous mettre en marche à notre tour, essayer de ne pas prendre racine, apprendre à lâcher nos filets si lourdement chargés de pierres inutiles, nos habitudes et attitudes solidement ancrées, pour nous laisser prendre dans les filets de la grâce, joyeusement, librement, avec confiance.

En réalité, la foi en Dieu et notre engagement à son service se renouvellent chaque jour. Nous devons toujours quitter, nous déplacer, être toujours en mouvement. Notre vocation, car c’est de cela dont il s’agit, ne dépend ainsi pas de nous, de notre recherche, de notre intelligence, de nos mérites, de nos capacités ou même de notre piété. C’est avant tout un appel qui nous est adressé par Celui qui nous a vus avant même que nous pensions à lui. Il vient nous surprendre dans notre quotidien, tout comme la lumière qui s’est levée sur ceux qui étaient assis dans les ténèbres à Nephtali.

Tous les chrétiens ne sont pas appelés à abandonner leur gagne-pain ou à renoncer à jouir des liens de famille. Mais tous ont entendu, un jour ou l'autre, dans leur cœur la voix connue qui leur disait: «Suis-moi». Y as-tu répondu?

Frères et sœurs, nous qui aimons nous organiser, planifier nos rencontres, réfléchir avant de répondre, connaître à l’avance les conséquences de nos choix et qui pensons nous rassurer parce que tout est prévu et que nos agendas sont remplis, essayons de nous laisser surprendre par la rencontre imprévue !

Si nous marchons – il ne s’agit pas de courir ! – nous prendrons le temps de voir ceux qui sont placés sur notre chemin, à la sortie du culte, dans la rue, dans notre immeuble, à la maison, dans nos familles, dans tous nos lieux de vie. Nous pourrons être attentifs, prêts à les écouter, à partager leurs joies et leurs peines, leurs difficultés.

Ne nous préoccupons surtout pas du résultat ou de nous-mêmes. C’est l’affaire de Jésus ! C’est dans l’humilité et la simplicité d’une rencontre au bord d’un lac que l’Evangile se joue, pas dans le spectaculaire, pas dans un discours interminable, argumenté ou offensif. C’est par sa seule présence, ou avec des paroles ou des gestes tout simples, que Jésus guérit. Il s’invite dans le quotidien de notre vie. Et c’est avec les autres que nous sommes appelés à répondre à son invitation.

En effet, nous ne sommes pas seuls sur ce chemin mais en Eglise. Vous l’avez remarqué dans le récit, Jésus a appelé ses disciples deux par deux : « Suivez-moi » leur a-t-il dit. Dès le début, Simon, qui deviendra Pierre, est associé à un autre disciple.

Pour accomplir sa mission, Dieu a besoin des talents de tous et de toutes, aussi modestes soient-ils, et de talents conjugués. Dans la communauté que nous formons, et dans laquelle nous ne pouvons rien seuls, chacun, chacune d’entre nous peut recevoir avec confiance cet appel et marcher avec les autres à la suite de Jésus. Chacun, chacune a sa place.

Frères et sœurs, Jésus nous invite à marcher à sa suite, à devenir ses disciples ou à renouveler cet engagement.

Pour se mettre ou se remettre en chemin à la suite du Christ, nous entendons un appel, et nous percevons une lumière c’est-à-dire tout le positif de cet appel, toutes les promesses bénéfiques qui nous attendent. Nous répondons à l’appel du Christ non pas seulement et non pas d’abord pour lui rendre service, ou pour manifester notre générosité. Mais nous répondons à l’appel du Christ, d’abord parce que cela est bon pour nous. Pour exprimer ce positif, le prophète Esaïe prend l’image de la lumière. « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi ».

Pour se mettre à la suite du Christ, il faut le percevoir comme cette lumière qui éclaire notre histoire, le chemin qui nous conduit au Père, la promesse de la vie en plénitude. Quand le Christ appelle, quand il confie une mission, certes, il y a un service à rendre, mais celui qui répond à cet appel et accepte la mission, est le premier bénéficiaire de la grâce accordée par cet appel. Marcher à la suite du Christ, qui est notre lumière et notre libérateur est une grâce et cette grâce apporte la joie et la libération ce qui est une autre manière de parler du salut.

Maintenant alors, frères et sœurs, lâchons nos filets et partons à la pêche avec Jésus! Amen!

Charles KLAGBA

 

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Prédication du culte de Noël. Le dimanche 25 décembre 2016

27 Décembre 2016, 09:21am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Esaïe 52 : 7-10; Matthieu 2 : 1-12

«Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie la paix, de celui qui annonce le bonheur, qui publie le salut, qui dit à Sion : Ton Dieu règne ! »

 

Aujourd’hui c’est Noël, jour de joie, jour de paix et surtout jour de la réalisation de la promesse de Dieu.

Comme dans la tradition du temps d’Esaïe, nous avons ce privilège d’être porteurs de cette bonne nouvelle les uns pour les autres et porteurs de la grande Bonne Nouvelle pour le monde ! Dieu entre dans notre monde, dans nos fragilités humaines en prenant la forme d’un nouveau-né, pour une nouveauté de vie.

Quel bonheur ! quelle joie en ce jour de Noël d’entendre résonner ce message d’assurance et d’espérance non seulement dans un monde fracturé comme le nôtre mais aussi dans nos vies personnelles souvent traversées par des doutes, des souffrances et parfois même la résignation.

Aujourd’hui Noël, c’est une ère nouvelle qui commence. Esaïe, décrit cette ère nouvelle comme le passage de l’obscurité, de l’ombre de la mort à la lumière. La nouvelle marche avec Dieu débute aujourd’hui même : « Le peuple qui marche dans les ténèbres, nous dit Esaïe, voit une grande lumière; sur ceux qui habitaient dans le pays de l’ombre de mort,… la lumière resplendit. Car un enfant nous est né, un fils nous est donné, et la domination reposera sur son épaule ; on l’appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père Éternel, Prince de la paix.».

Pour les contemporains de la naissance du Messie, il s’agit du rétablissement de Jérusalem, au chapitre 52, versets 7 à 10 du livre du prophète Esaïe, notre premier passage. L'asservissement de Jérusalem sera changé en domination, l'esclavage en liberté. L'honneur de Dieu demande que la ville sainte soit rétablie : qu'elle se relève donc pleine de joie et de gloire. Sa restauration sera complète et parfaite.

En effet, le peuple d’Israël et son roi sont en exil et Jérusalem est en ruines. Mais voici un « porteur d’évangiles », dont on salue la course. Ainsi appelait-on le messager qui courait annoncer une victoire dans la bataille ou l’avènement d’un roi, et qui recevait pour cela, une gratification.

Le messager imaginaire dans cette prophétie d’Esaïe, annonce ceci : Dieu revient à Jérusalem, avec les exilés. Il va s’y établir en roi de paix, selon la formule rituelle d’intronisation royale. Et toutes les nations, naguère ennemies, seront témoins de l’œuvre libératrice de Dieu, du salut de son peuple. Jérusalem est donc invitée à se réveiller et à se revêtir d’une nouvelle force et de ses habits de fête car Dieu va délivrer gratuitement Israël de cette captivité pour que son Nom ne soit plus outragé mais célébré et sanctifié au milieu de son peuple.

En esprit, Esaïe voit les messagers qui traversent les montagnes de Juda pour apporter à Jérusalem la nouvelle de la délivrance des exilés ainsi que les sentinelles qui annoncent leur arrivée avec des cris de joie, 52:7-10.

Finalement, Esaïe exhorte les exilés à profiter de cette délivrance accordée par Dieu ( au travers de Cyrus ) pour quitter Babylone et ramener avec eux à Jérusalem les ustensiles du temple, 52:11. Leur retour sera une marche de triomphe sous la conduite de l’Eternel, 52:12.

Cet avènement de Dieu dans notre humanité longtemps prédit par les prophètes et longtemps espéré et attendu par les nations, se réalise.

L’Évangile de Matthieu commence par situer clairement l’événement dans l’histoire, en des temps et lieux bien précis. On n’est pas ici dans un récit purement légendaire bâti pour donner libre cours à l’imagination et à la piété populaire. Même si l’important est dans l’enseignement spirituel qui en découle, ce qui nous est rapporté ici n’est pas sans fondements. Jésus, nous est-il dit, était né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode (Mt 2,1).

Alors que jusque-là, les élites du pays étaient déportées, ce sont des élites du pays voisin, les rois mages ; qui viennent en Israël annoncer la naissance du nouveau Roi : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? En effet, nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus pour l’adorer.. ».

Alors que les arrivées de puissance étrangères étaient signes de domination, ces prêtres, ces gens importants de pays voisins, non seulement viennent en paix, mais viennent se soumettre au roi des juifs. Les rois mages instaurent une autre relation à l'étranger que cette vision guerrière.

Dans le récit de Matthieu, la venue des Mages, annonce la portée universelle de l’évènement. Le bonheur qu’apporte le nouveau roi est universel et inclusif. Ce sont des païens qui se présentent à Jérusalem, cherchant le roi des Juifs. Ce sont eux qui reprennent la route alors que Jérusalem ne bouge pas, ce sont eux enfin qui entrent dans la maison et adorent l’Enfant.

Les Mages venus de l’Orient sont des savants, perses ou babyloniens, probablement astrologues, qui ont pu avoir contact avec le messianisme israélite à Babylone. À travers eux, c’est le monde entier qui se met en marche vers le Christ, Messie, c’est l’univers des païens qui se tourne vers la lumière de l’Évangile.

Frères et sœurs, ce qui se qui se joue dans ce récit que rapporte Matthieu, ce n'est pas seulement un renversement des relations d'Israël et des étrangers. Ce n'est pas tant qu'Israël deviendrait dominant sur l'étranger alors qu'il a été dominé jusque-là. Ce n'est pas un renversement, c'est un changement de regard : vous étiez obsédé par la peur de la domination étrangère, arrêtez, ce n'est plus le cas. Regardez ce qui se passe, ce qui se vit entre Jésus et les mages : d'autres relations d'échanges, d'amour, de respect peuvent s'instaurer avec l'étranger. Les mages ont rendu visible la naissance de Jésus, ils ont semé des graines de l’ouverture, ils ont fait des gestes qui ont frappé les esprits. Ils préfigurent l’humanité entière marchant vers l’étoile du Seigneur, ce Christ qui va pouvoir se proclamer Lumière du monde (Jean 8,12 ; 12,46).

Une fois de plus, frères et sœurs, c’est Dieu qui a tout conduit. C’est lui qui, au moment favorable, a choisi de s’incarner parmi nous. Et c’est lui qui, aujourd’hui, en ces jours qui sont les derniers, a envoyé son étoile pour conduire depuis le lointain Orient des hommes, vers ce Fils, reflet de sa gloire (He 1,2-3), pour l’heure, encore silencieux, dans la précarité de l’étable mais qui n’en est pas moins Parole de Dieu incarnée. (Jean 1,1-2).

Désormais chacun, chacune de nous peut, s’il le veut, marcher à sa suite. Lui offrir sa vie. Écouter sa Parole qui est Lumière et Vie, l’aimer jusqu’à l’adorer car il est le Seigneur de la gloire (1 Co 2,8). Il est toujours là, comme à Bethléem, dans la maison de notre âme (Mt 2,11). Il nous accueille. On le reçoit. On le porte et il nous porte. On est tout illuminé, pacifié, réjoui de sa présence. Il est la vie de nos vies. On peut lui offrir nos trésors. On ne perd rien à répondre par le don de sa vie humaine et mortelle à un Dieu qui nous a aimés par le don de toute la sienne, divine et éternelle.

Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, les Mages se comportent en explorateurs. Ils se sont mis en route, ils suivent l’Etoile, ils ne savent pas, ils rencontrent, questionnent, sont ouverts et ouvrent. Ils savent quitter, rencontrer, avancer, prendre des risques. Ils connaissent la joie, ils donnent, ils adorent. Ils ne seront pas retenus, ils retourneront chez eux. Ils respectent le cadre établi pour ce qui leur apparaît être le bien de l'humanité.

Frères et sœurs, chaque fois que nous faisons confiance à ce qui advient, que nous jouons le jeu et que nous mettons en œuvre ce qui nous est proposé par la Parole de Dieu, nous nous ouvrons à la nouveauté du règne du Christ qui nous est donné. Chaque fois que nous laissons surgir la nouveauté, et que nous désirons que cela change, nous laissons advenir un sens nouveau dans notre vie.

Les mages peuvent repartir par un autre chemin. Ils ont accompli leur mission en allant jusqu’au bout de leur route : nous conduire auprès du Dieu fait humain. Quand on a reconnu dans le Christ Jésus, le Sauveur du monde, tout le reste passe en second.

Hormis Jésus, le nouveau-né, personnage central de notre Evangile, il y a le roi Hérode jaloux de son pouvoir. Ce roi Hérode, bien connu des historiens, est pour l’évangéliste Matthieu le symbole du refus d’accueillir le Christ et son message. Ainsi, c’est tout le destin du Christ qui nous est présenté en raccourci dès le prologue de Matthieu : accueilli par les hommes de bonne volonté, Jésus sera rejeté par les responsables de son peuple.

Hérode convoque les prêtres juifs pour savoir une chose : où a lieu la naissance. Aux yeux de ses contemporains, Hérode pouvait donner l’impression de régner en maître, soutenu qu’il était par le pouvoir romain. Il va effectivement s’illustrer dans l’histoire en perpétrant l’effroyable massacre des enfants innocents. Mais, suggère déjà Matthieu, ce n’est qu’un petit roi, marionnette. Le vrai roi de l’univers, et pas simplement des juifs, est ailleurs. À la seule évocation de sa naissance, pris d’angoisse, Hérode tremble de peur. Pourtant, ce bébé, n'a pour tout palais qu'une étable. Il n'a pas d'armée. Il ne va avoir pour toute richesse que ce que vont lui laisser les rois mages.

Hérode s'attend-il à une confrontation violente ? Armée ? Une révolte des bergers ? A une révolte populaire ? A l'assaut d'une armée formée d'anges et de mages ?

Le roi Hérode cherche à garder la maitrise des choses, choses qui ne cessent de lui échapper, il est fermé sur lui-même, sur sa vision, son pouvoir, qu’il ne cesse de sentir menacé. Alors, pour se maintenir, il se rapporte faussement aux données, il cherche à bricoler, il fait preuve de manipulation, il rencontre dans le secret, il fait preuve de duplicité, il ne manquera pas d’être violent...

Frères te sœurs, le vrai pouvoir de Jésus qui nous est né dans l’étable de Bethlehem est de l'ordre du ressenti, du changement de regard sur le monde et sur ce qui est important dans le monde. Et pour changer le monde ainsi, ce qui compte, ce n'est pas la confrontation immédiate, ce n'est pas le rapport de force : c'est le temps. Chaque fois que nous prenons cette position de rapport de force, de maîtrise, en mettant en avant notre propre point de vue de manière exclusive, nous courrons le risque de la manipulation. Notre parole n’est plus droite, nous rétrécissons dramatiquement le sens de notre vie à notre réussite illusoire...C'est compter sans la force du temps que nous donne Dieu. Notre amour est le plus fort et le plus subversif des pouvoirs alternatifs quand il sait qu'il peut compter sur le temps de Dieu.

Frères et sœurs, Noël 2016, c’est faire route vers la lumière que le Messie, Dieu fait homme nous apporte. Il est le Pasteur, le Berger qui s’offre à nous. Devant les hostilités de la vie et dans un monde de la confrontation et l’immédiateté, le nouveau-né nous rappelle que nous, nous avons la force du temps : le pouvoir le plus subversif que donne l’Evangile. Hier, aujourd’hui et pour toujours, ton Dieu règne ! Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Matthieu XI, 2 -11 "Qui attendons-nous ?" - Prédication du 3e dimanche de l'Avent, 11 décembre 2016

12 Décembre 2016, 11:09am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Matthieu XI, 2 -11 Qui attendons-nous ?

 

Troisième dimanche de l’Avent, trois bougies sur notre table pour aller vers Noël et, ce matin, une question « qui attendons-nous ? Qui est donc ce Jésus dont nous célèbrerons la venue dans quelques jours ? »

C’est la question que se pose Jean du fond de sa prison.

Pourtant, il le connaît bien ce Jésus, c’est son cousin et, d’après Luc, c’est dès avant leur naissance, ces deux-là se sont reconnus : Jean aurait tressailli dans le ventre de sa mère lors de sa rencontre avec Marie, elle-même enceinte de Jésus. Et puis, il y a eu le baptême dans le Jourdain et Matthieu le raconte comme Luc. Et voilà que Jean, mis en prison par Hérode, se met à douter : « es-tu celui dont nous savons qu’il doit venir ? » Es-tu celui que les prophètes ont annoncé, celui qui nous délivrera des oppresseurs ? Es-tu ce sauveur qui fera le tri des bons et des méchants, punira les méchants ?

Ce doute est troublant mais aussi déculpabilisant car, si Jean doute, alors a fortiori nous pouvons, nous, nous sentir décomplexés de nous poser des questions sur ce Jésus qu’on dit Christ.

 

Jean a certes des circonstances atténuantes, il sait sa mort prochaine, Hérode n’est pas homme à grâcier. L’urgence de savoir s’impose pour lui. Il serait temps que Jésus se manifeste, qu’il use de son pouvoir, renverse Hérode, chasse les Romains, restitue Israël dans sa souveraineté et, par là-même, délivre Jean de sa prison.

La question que pose Jean à Jésus par le truchement de ses amis est celle que nous devons nous-aussi nous poser en cet Avent 2016. Oh ! Nous savons bien que Jésus n’est pas l’homme des insurrections et des renversements de régime. Trop de dictateurs imposent encore un régime de terreur à leurs peuples de par le monde. L’actualité nous en apporte, hélas, la preuve chaque jour.

Mais, alors, qui nous apprêtons-nous à fêter en ce nouveau Noël ? Quel est ce messie qui n’arrache pas Jean à sa prison et n’empêche pas les Romains d’oppresser Israël ? Qui est ce roi pour qui nous avons allumé trois bougies ? Oui qui attendons-nous en cet Avent 2016 ?

 

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Notre passage biblique attache deux courts épisodes. Dans le premier, Jésus répond à l’inquiétude de Jean (v. 4-6) puis, dans le second, il commente sa réponse pour la foule qui l’entoure (v. 7-11).

Jésus répond à Jean

(Mat. 11, 4-6)

Jean avait « entendu parler des œuvres de Jésus » et c’est bien de ces œuvres que Jésus parle en réponse. La réponse de Jésus ne porte pas sur son enseignement mais sur son action car son action est le plus éloquent de ses enseignements.

Les disciples de Jean sont invités à témoigner de leurs observations (V.4) à rapporter ce qu’ils voient et entendent, Jean aura à en déduire la réponse à son doute. Lui qui rêvait de certitude, le voilà renvoyé à un exercice d’interprétation. Pauvre Jean !

 

La réponse énumère donc les actions accomplies par Jésus en une sorte de crescendo des bénéficiaires de ces actions : les aveugles, les boiteux, les lépreux, les sourds, les morts, les pauvres. Ce sont les paroles prophétiques d’Esaïe que Jésus cite ici, c’est aux Ecritures qu’il renvoie son cousin. Jésus accomplit bien ce que le prophète avait annoncé.

 

Il est à noter que l’énumération rapportée par Matthieu omet de mentionner les prisonniers et s’ouvre sur une mention universaliste : « heureux celui qui n’abandonnera pas la foi en moi ».

Pauvre Jean vraiment, lui qui est en prison ! Il ne risque pas de prendre à la lettre l’annonce que Jésus aurait pu emprunter à Esaïe de la libération des prisonniers. Non, parmi les malheurs de la condition humaine, Jésus ne cite pas l’emprisonnement.

Comme le note A.Gounelle dans son commentaire du passage, Jésus omet aussi de mentionner tout ce qui concerne la violence de Dieu, sa vengeance et les châtiments promis aux impies. Jésus cite les Ecritures mais effectue des coupures ! A ce point, je cite A.Gounelle car on ne saurait mieux dire :

« Jésus renvoie Jean à l'Écriture, mais à une Écriture lue avec discernement, où l'on ne retient pas tout, où l'on sépare le message essentiel d'éléments accessoires et secondaires. C'est une manière pour Jésus de dire à Jean : "mais si, je remplis bien le programme annoncé; seulement, ce programme, tu l'as mal compris, il diffère de ce que tu crois. Le messie ne vient pas pour cette manifestation de force et de puissance dont tu rêves; sa mis­sion consiste avant tout à soulager les malheureux, à leur ou­vrir une vie qui mérite d'être vécue. Regarde bien les textes, tu verras que j'agis comme doit le faire l'envoyé de Dieu". Ainsi, Jésus appelle Jean à une meilleure lecture de l'Écri­ture, qui derrière la lettre sache en découvrir l'esprit. »

Jésus nous donne une leçon de lecture ! Pouvons-nous faire moins que de l’imiter dans notre façon de lire les Ecritures ? Pouvons-nous négliger cet appel au discernement, cet appel à une lecture en esprit et non littérale ?

 

C’est la conséquence de cette lecture avisée des prophéties d’Esaïe que nous allons rencontrer dans le second épisode de notre texte.

Jésus parle jean à la foule

Mat. 11, 7-11

Au départ, nous avions Jean se demandant qui est vraiment Jésus.

Nous venons d’entendre Jésus redresser la lecture que faisait Jean des prophéties messianiques.

Maintenant Jésus explique qui est Jean. La question « qui ? » traverse vraiment notre texte.

 

Jean est, selon Jésus, un prophète et même le plus grand des prophètes. Selon la hiérarchie de l’ancienne alliance, Jean occupe le sommet. Mais, ajoute Jésus, « le plus petit du royaume des cieux est plus grand que lui » (V.11).

Jésus oppose là frontalement deux ordres de réalité, deux « règnes » comme on prendra l’habitude de dire plus tard, le règne de la loi naturelle et le règne de Dieu et de la grâce.

 

Dans le premier ordre, celui où Jean est le plus grand des prophètes, on attend un messie justicier venant pour restaurer la puissance d’Israël. Les hiérarchies y sont établies sur la force et la puissance.

Rien de tel dans « le royaume des cieux ». Cette expression est propre à Matthieu, elle est l’équivalent chez lui de l’expression « royaume de Dieu » employée par les autres Evangélistes. Matthieu s’adresse, en effet, à des Juifs qui avaient, culturellement, pris l’habitude de s’interdire d’employer le mot « Dieu » et qui le remplaçaient par un mot voisin. Ce royaume des cieux est donc le monde nouveau de Dieu dont nous parle surtout Marc.

Jésus signifie donc que Jean est resté sur le seuil de l’Evangile. Sa lecture littérale des prophéties ne peut le conduire plus loin qu’au sommet de l’ancienne alliance. Elle ne lui permet pas d’apercevoir l’autre règne, celui de la grâce, ce monde nouveau où, je cite le verset 5, « la bonne nouvelle est annoncée aux plus pauvres ».

Il est heureux que l’imaginaire porté par la tradition fasse naître ce messie, roi du monde nouveau, dans une étable avec pour premiers visiteurs des bergers puis, ensuite, des étrangers, des païens, venus de lointains pays, des mages.

Jean attend un roi de gloire, nous attendons un petit enfant sans autre force que l’amour.

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Les débats sur la nature de Jésus ont occupé les premiers siècles du Christianisme. On l’a dit « messie », « christ », « fils de dieu », « sauveur », « seigneur », ….. Tout cela est exact à condition de savoir le sens qu’on met derrière ces mots qui risquent toujours de nous enfermer dans des dogmes, de nous figer dans des croyances qu’on répète en credo sans jamais se demander ce que cela veut dire.

 

Comme Jean, dans l’attente de ce nouveau Noël, nous nous demandons qui nous attendons. Comme Jean, nous rêverions d’un Père Noël, super héros venant nous délivrer de tous les fléaux dont nous souffrons. Un roi de gloire qui remettrait à leur place les tyrans en tous genres qui massacrent des peuples ou les oppriment. Comme Jean, nous sommes tentés de douter, de nous dire que ce Jésus n’a finalement pas changé grand-chose.

 

Saurons-nous écouter les témoins qui nous rapportent les œuvres de ce Jésus ? Saurons-nous entendre que les prophéties sont à prendre avec discernement ? Saurons-nous comprendre que le monde nouveau de Dieu n’est pas une superpuissance ?

 

En ce troisième dimanche de l’Avent, je nous souhaite d’être ouverts aux témoignages de ceux qui ont expérimenté dans leur vie, ce souffle qui rend la vue et l’audition, qui remet debout et guérit nos maux. Dans deux semaines exactement, nous fêterons Noël, nous célèbrerons ce nouveau règne que représente un bébé impuissant vagissant dans une mangeoire et menacé par les Grands du moment.

N’oublions pas qui nous attendons. N’oublions pas que le messie est venu pour les plus démunis.

 

Sylvie Queval

 

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Prédication du 2e dimanche de l'Avent, le 4 novembre 2016:« Convertissez-vous, le Règne des cieux s’est approché !»

7 Décembre 2016, 11:05am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

 

Textes bibliques : Esaïe 11 :1-10; Matthieu 3 : 1-12

 

« Convertissez-vous, le Règne des cieux s’est approché !»

Dimanche dernier, c'était l'appel à la vigilance, une vigilance qui nourrit notre espérance pour un monde nouveau !

Pour ce deuxième dimanche de l’Avent, Dieu a une bonne nouvelle pour toi et pour moi. Dans son désir ardent de sauver l’humanité, il ne se contente pas de nous appeler de loin. Il envoie des messagers qui sont ses proches. Ces messagers de Dieu ont pour mission d’annoncer le Messie, de lui préparer la voie, en nous invitant à retourner notre cœur, à nous convertir à l’amour, au service, à l'accueil... alors seulement nous préparons les chemins du Seigneur. Tout au long de ce temps de l’Avent, nous sommes invités à accueillir sa parole et à nous laisser transformer par elle. Le Seigneur attend de nous une réponse qui soit à la hauteur de l’amour passionné qu’il nous porte et veut nous faire vivre. Dieu vient établir son règne parmi les humains, sa présence sera manifeste dans ce monde appelé à devenir son Temple, lieu de rassemblement et d’unité de toute l’humanité quelle que soit la diversité qui la caractérise.

 

Le prophète Esaïe, dans notre premier passage, est porteur de ce message de l’émergence du nouvel ordre. Dans un contexte où tout semble s’écrouler autour de nous le prophète Esaïe nous convie à nous joindre à la caravane de l’espérance comme des lettres vivantes écrites sur le modèle de Dieu. Cette attente est exprimée par la promesse d'un rejeton : « Puis un rameau sortira de la souche d’Isaï, un rejeton de ses racines portera du fruit… » Esaïe 11 : 1

Esaïe s’adresse à un peuple qui vit une situation difficile. La population a souffert de la guerre avec les pays voisins. Elle a été humiliée et fragilisée par plusieurs défaites. Mais pour Dieu, rien n’est jamais définitivement perdu. Au nom de sa foi, le prophète réagit. Pour lui, le seul véritable roi, le maître de l’histoire, c’est Dieu.

Dieu part de presque rien du tout pour faire surgir de l’inattendu. Esaïe nous parle de la « souche d’Isaï ». Cette souche, c’est l’image de la désolation et de la mort. La maison de David a été anéantie au moment de la destruction du temple. Mais Dieu agit dans le monde de manière imprévue. De cette souche morte, va naître un rejeton. Il assurera la paix au peuple mais aussi à l’humanité entière. Là où l'on pensait qu'il n'y avait plus rien à attendre, à espérer, surgit une pousse, un rameau, un nouvel arbre ! De ce qui était mort ( ou cru mort ) surgit la vie. De la souche du grand roi d'Israël va surgir un nouveau Messie, qui transformera le monde. On part d'une souche qui a tout l'air d'être morte, desséchée, incapable de produire de la vie. Et pourtant, c'est le point de départ de Dieu. Dieu prend l'impossible comme point de départ, parce que c'est la situation réelle et qu'il est inutile de penser commencer ailleurs, il n'y a pas d'ailleurs. Il n'y a pas d'ailleurs que notre monde, notre société, notre nature humaine. C'est la souche, c'est la pâte de départ et c'est à partir de là que Dieu agit.

L’instauration du nouvel ordre ou la naissance d’un nouveau monde annoncé par Esaïe nous est présentée sous forme d'images. Images de paires d'animaux que tout oppose : le loup et l'agneau, la panthère et le chevreau, le veau et le lionceau, la vache et l'ours, le lion et le bœuf, le nouveau-né et la vipère, le petit garçon et l'aspic. Ces images nous disent que l'incompatible peut et va coexister en paix, ensemble. C’est un bouleversement complet de l'ordre naturel, un renouveau complet et total des relations établies.

Ces images sont, bien sûr, des métaphores prises dans la nature pour nous parler de nos relations humaines. C'est une remise en cause de nos rapports humains quand ils s'expriment comme des rapports fondés sur la loi de la jungle, la loi du plus fort. Esaïe annonce la fin des rapports de force, de domination. C'est l'abolition de la peur, de la crainte, de la terreur.

Frères et sœurs, voilà qui parait bien utopique ! C'est utopique, car c'est au-delà de la logique des forces humaines.

Justement ! Pour réaliser cela, il faut un nouveau Messie, il faut une intervention divine, un envoyé de Dieu. C'est à partir de nous, humains, avec nos fragilités, que Dieu agit. C'est nous qu'il vient transformer, mais pas sans nous ou contre nous.

Frères et sœurs, ces paroles d’Esaïe nous rejoignent dans notre monde d’aujourd’hui. Commençons par nous-mêmes, commençons par accepter de nous voir tels que nous sommes : tantôt prédateurs, tantôt proies, tantôt vipères, tantôt vulnérables comme un nouveau-né. Acceptons que ce changement vient de Dieu et pas de nous-mêmes, de nos propres forces.

Dieu envoie son Messie, le porteur de son Esprit pour nous transformer, pour que nous le suivions pour être inspirés. Ce Messie est le porteur de l'Esprit de Dieu : « Esprit de sagesse et de discernement, Esprit de conseil et de puissance, Esprit de connaissance et de crainte de l’Éternel. ».

Frères et sœurs, le projet de Dieu c’est de nous libérer de toutes sortes d’aliénation ; il est donc important de nous rappeler que Dieu ne rejette personne ! Dieu ne nous rejette pas, ni le loup qui est en nous, ni l’agneau qui est en nous. L’un comme l’autre sont des créatures magnifiques dans leur genre.

Dieu s’est donné une mission de reconstruction et non de destruction. Il fait tout pour que le méchant change, Dieu ne se moque pas de ceux qui ont besoin de tendresse, il ne méprise pas l’incapable que tous méprisent… Dieu vient pour réconcilier partout le loup et l'agneau, la panthère et le veau. Il vient pour que le puissant devienne capable d’aider le faible, que le fort soit au service de ce qui est beau et bon, de ce qui est juste. Il vient nous aider à réconcilier toutes les dimensions de notre être, pour réconcilier notre force, nos blessures et notre soif de reconnaissance, nos doutes et nos élans spirituels.

Le message radical de Jean, dans l’Evangile de ce jour, nous indique l’attitude dans laquelle nous devons être, de façon concrète, pour préparer la voie à cette reconstruction et être à la fois bénéficiaires et partenaires de Dieu dans l’instauration de la cité nouvelle faite de bonheur pour tous et pour toutes.

« Convertissez-vous le Règne des cieux s’est approché !»

Quand Jean-Baptiste commence sa prédication, l'occupation romaine dure depuis 90 ans à peu près. Le roi Hérode a été laissé en place par les Romains mais il est unanimement détesté ; les partis religieux sont divisés et on ne sait plus très bien qui croire ; il y a les collaborateurs et les résistants...Régulièrement un exalté, un faux messie fait parler de lui, promet la libération, mais cela se termine toujours mal.

C'est dans ce contexte que Jean-Baptiste se met à prêcher ; il vit dans le « désert » de Judée (entre le Jourdain et Jérusalem). A vrai dire cette région n'est pas totalement désertique, mais ce qui intéresse Matthieu, ce n'est pas le degré de sécheresse, c'est le sens spirituel du désert : il a en tête toute la résonance de l'expérience d'Israël au désert pendant l'Exode.

Pour un peuple opprimé, qui cherchait un sauveur qui détruira les romains et qui les délivrera de l'oppression, c'était un message étonnant.

« Convertissez-vous le Règne des cieux s’est approché !»

Jean dit à Israël que le nouveau règne commence chez eux. Il dit : « Vous, vous devez vous convertir ! ».

Qu'est ce que la conversion? Quand Jean dit "« Convertissez-vous!» que veut-il dire aux habitants de Jérusalem, de toute la Judée et de tout le pays qui borde le Jourdain?

A la base « Convertissez-vous !» veut dire "changez d'avis", "changez votre façon de penser", "détournez-vous de...".  C’est un acte volontaire. La conversion dans la Bible a toujours comme objet le mal, le mal contre Dieu.

Ce que Jean dit, en effet, c'est "détournez-vous de votre mal contre Dieu." On peut ajouter que, si l’on doit se détourner de quelque chose, il faut se tourner vers quelque chose d'autre. La conversion est donc l’acte volontaire de l’être humain qui se tourne vers Dieu. On tourne le dos au mal et on va dans une autre direction. « Convertissez-vous !» donc c'est "détournez-vous de votre mal et tournez-vous vers la voie de Dieu".

Dans sa prédication, Jean ne se retient pas! Le langage de Jean est celui de l’authenticité, de la vérité et de l’action : « Convertissez-vous, » proclame-t-il.

Si la centralité du message de Jean est la conversion, la conséquence de son message doit être un changement de vie.

Remarquons que dans ce passage, ce n'était pas seulement "les gens ordinaires" qui sont allés voir Jean dans le désert. Les chefs religieux sont allés aussi, et Jean réserve pour eux ses paroles les plus féroces : « Races de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir? Produisez donc du fruit qui confirme votre changement d’attitude et ne prétendez pas dire en vous-mêmes: Nous avons Abraham pour père! Car je vous déclare que de ces pierres-ci Dieu peut susciter des enfants à Abraham. ».

Ce que Jean dit est très fort ! Vous savez, c'est parce que les chefs religieux de l'époque étaient hypocrites. Ils prétendaient avoir la piété, ils prétendaient être saints, irréprochables mais ils ne l'étaient pas ! Ce n'était qu'un masque fait pour impressionner ceux qui les regardaient. Les paroles de Jean touchent au cœur du problème : « Produisez donc du fruit qui confirme votre changement d’attitude».

Frères et sœurs, Jean offre l'opportunité de nous mettre en règle avec Dieu avant qu'il ne vienne. Et c’est tout un programme de vie spirituelle. Car la conversion ce n’est pas seulement un changement de mentalité, mais toute une marche et une démarche vers Dieu.

Frères et sœurs, on imagine souvent que la conversion, c’est un instant privilégié dans une existence. C’est beaucoup plus que cela ! C’est toute une vie qui part d’un instant de rencontre. La conversion, c’est un événement, certes, mais plus encore, un cheminement. Un retournement, certes, mais surtout un retour, qui dure toute la vie. Car il ne s’agit pas seulement d’un remords passager, qui ramène l’être humain sur lui-même ou sur ses fautes, mais d’un pèlerinage, d’un voyage d’amour, qui ramène l’humain vers quelqu’un, vers Celui qui appelle, qui tend la main c’est-à-dire vers le Dieu qui crée et donne la paix et la joie, vers le Règne de Dieu. L’amour deviendra alors le point commun de la rencontre entre Dieu et l’humain. C’est en le partageant qu’ils se reconnaîtront l’un et l’autre. Par amour, Dieu introduit l’humain dans sa souveraineté et dans son éternité et par amour, l’humain renonce à tout ce qui l’attache à la vanité et accepte de partager l’éternité de Dieu.

Frères et sœurs, c’est ainsi que se prépare Noël !

A quelques semaines de Noël, Dieu nous ramène ensemble au désert, pour y entendre l’appel du Précurseur, une nouvelle invitation à nous convertir.

Comme elle est bienfaisante, cette rudesse de Jean, qui vient balayer avant chaque Noël toutes nos lenteurs, toutes nos paresses, toutes nos pauvres excuses, alors que les années passent et que s’alourdit en nous, d’un Avent à l’autre, le poids des occasions perdues d’aimer Dieu avec tout notre être. A travers les Pharisiens et les Sadducéens, c’est nous qui sommes pris à partie par le Précurseur. Car nous aussi sommes menacés par la routine, et nos retours vers le Seigneur restent trop souvent des engouements passagers. Nous aussi, nous risquons de nous sécuriser par les gestes religieux que nous posons ou par les idées que nous défendons, sans nous soucier suffisamment de porter du fruit par une vraie conversion du cœur et de l’intelligence.

« Convertissez-vous le Règne des cieux s’est approché !»

Prenons du temps pendant ce mois de décembre pour voir ce que Dieu peut transformer en nous, quelle souche Dieu peut revivifier, ce qu'il peut faire renaître en nous : pour que nous soyons transformés, pour que notre vie soit changée et que le monde en soit rendu plus habitable. Dans cette attente, il s’agit de nous ouvrir à l’Esprit du Messie qui est déjà venu et qui vient encore. Il s’agit de prendre modèle sur lui, pour apprendre la sagesse et le discernement. Il s’agit pour nous de voir plus large, voir de plus haut, ne plus nous laisser piéger par les rapports de force, pour nous ouvrir à l'esprit messianique qui ne juge pas selon les apparences ; Jésus dira même, de ne pas juger du tout.

Frères et sœurs, s’il y a une attitude à avoir, en dernier mois de l’année, c’est de nous remettre radicalement en question ; ainsi l’amour du Seigneur brûlera en nous,  tout vain désir et redressera ce qui est tordu.

Que le Seigneur fasse refleurir justice et paix en nos vies afin qu'elles soient prémices du monde nouveau où il régnera à jamais.  Amen !

Charles KLAGBA

 

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"Restez donc vigilants..." - Prédication du dimanche 27 novembre 2016

28 Novembre 2016, 15:22pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Textes bibliques : Esaïe 2 : 1-5; Matthieu 24 : 37-44

 

« Restez donc vigilants, puisque vous ignorez à quel moment votre Seigneur viendra. ». Matthieu 24 : 42

 

Chers frères et sœurs, à partir de ce dimanche qui est le premier des quatre dimanches de l’Avent, notre regard se tourne vers Noël, fête de la naissance de Jésus, Fils de Dieu, Lumière pour les humains. Dieu va nous donner un Sauveur ! Et comme nous l’avons chanté au début de ce culte, c’est une aube nouvelle qui s’annonce. Pour sauver son peuple Dieu va venir.

Cet évènement est donc aussi « avènement », et doit être préparé.

 

L’Avent est la période durant laquelle nous nous préparons intérieurement à célébrer Noël, comme si c’était la première fois. C’est un événement inouï, et décisif pour l’humanité, puisque Dieu s’est fait humain parmi les humains : de sa naissance à sa mort sur la Croix, il a partagé la condition humaine en tous points, à l’exception de nos manquements.

Cette préparation de l’Avent est d’autant plus importante qu’il s’agit aussi de célébrer la venue du Christ dans le cœur des humains depuis des millénaires et son avènement dans la gloire à la fin des temps.

 

En ce premier dimanche de l'Avent, nous avons lu l’Evangile, qui nous parle de la fin des temps, qui nous invite à préparer cette fin des temps. Et chaque jour nous en rapproche.

 

Nous sommes donc appelés à la vigilance : « Restez donc vigilants, puisque vous ignorez à quel moment votre Seigneur viendra. ». Matthieu 24 : 42

 

Comme à son habitude, Jésus provoque ses disciples et nous provoque pour mieux guider notre réflexion. Jésus parle à ses disciples des bouleversements terribles, des cataclysmes. C'est le mot qui est utilisé en grec dans ce texte pour parler du déluge : il y aura des cataclysmes. Il commence son propos en évoquant l’épisode de l’arche de Noé.

Il raconte l’histoire en s’arrêtant avant la fin au moment où l’humanité est engloutie dans les flots, non pas parce qu’il ne sait pas comment finit l’histoire, mais parce qu’il sait que nous savons la fin. Il nous laisse le soin de nous en souvenir.

Il ne raconte donc pas l’épisode de la colombe et du rameau d’olivier, il ne nous raconte surtout pas l’épisode de l’arc-en-ciel et du repentir de Dieu et de sa promesse de ne plus chercher à détruire l’humanité, car c’est sur ce point que réside notre compréhension de l’avenir.

Le souvenir du déluge, repris ici par Jésus, évoque un avertissement auquel les générations de ce temps n’avaient pas tenu compte, leurs inconduites les ayant menés à l’engloutissement du fait de leurs imprévoyances, et de leurs fautes… La vie était facile, agréable et l’on oubliait Dieu, on refusait la référence de vie que Dieu proposait pour le vécu quotidien, car ils étaient trop absorbés par leurs égoïsmes.

 

D'une certaine manière, aujourd'hui, nous vivons les mêmes cataclysmes qu’au temps de Noé.

Nous voyons, comme au temps de Noé, comme au moment du déluge, le monde courir à sa perte, le monde risquer chaque jour sa destruction. Il apparaît chaque jour, de manière plus forte, que ce n'est pas l'intelligence de l'humain qui prend le dessus, mais sa volonté de puissance, sa volonté de richesse, sa volonté d'une vie égoïste. Cette manière égocentrique de voir le monde entraîne l'injustice, la violence, la guerre et la destruction du monde.

 

Cependant dans le chaos où nous vivons, il est encore possible d’établir une vie respirable, où les différences et les divergences entre personnes, entre nations, ne conduisent pas au mépris, au rejet ou à la destruction mutuelle, mais plutôt au respect, à l’accueil, à la non-violence.

C’est l’avènement de Dieu dans notre monde qui nous fait porter ce rêve, exactement comme la prophétie d’Esaïe dans notre premier texte : avoir une vision de l’avenir qui oriente le présent.

Le prophète Esaïe présente, dans ce passage, la vision d’une maison qui rassemble tous les peuples dans une paix harmonieuse initiée, non par les humains, mais par Dieu. On y voit les gens venir en pèlerinage vers le lieu où Dieu se manifeste dans sa gloire et sa justice. Le mont Sion pour Esaïe, c’est le lieu d’où sort la parole. C’est le lieu où Dieu se manifeste dans sa justice. « La maison de l’Eternel sera fondée au sommet des montagnes … elle s’élèvera au-dessus des collines  et toutes les nations y afflueront ». Esaïe 2 : 1

On assiste à un bouleversement mondial dont la conséquence sera l’affluence des nations vers la maison de l’Eternel. Cette montagne, de par ce qu’elle est, sera le lieu des lieux, celui de la présence et de la rencontre avec le Seigneur vers lequel toutes les nations seront attirées. Le monde aspire à la paix et à la justice universelles. Il est en quête de lumière, d’une parole sûre.

C’est à la maison du Dieu de Jacob que les foules trouveront lumière pour la route et force pour persévérer. On n’ira plus au temple pour y offrir des sacrifices mais se mettre à l’écoute de la Loi que le Seigneur enseignera pour le suivre dans ses voies. C’est la Parole du Seigneur qui sera la lumière sur la route. Telle est la nouveauté, tel est l’avenir qu’Esaïe entrevoit pour le peuple.

Le prophète Esaïe va plus loin…

Le chemin de vie proposé à Israël, et par lui, à tous les peuples, ne se fera plus à coup de guerre et de violence. La guerre n’apporte que destruction et renvoie le monde au chaos.

Les armes doivent être converties «  en socs de charrue et les lances en faucilles », dit le prophète. C’est un projet de paix que Dieu a pour son peuple et toutes les nations :

« … Aucune nation ne prendra plus des armes contre une autre et l’on apprendra plus à faire la guerre.», poursuit Esaïe.

Désormais, les humains seront capables de retrouver le chemin de la paix, englués qu’ils étaient dans les guerres, les combats, les affrontements, comme seule issue aux différends entre les peuples.

 

La paix n’est plus seulement une utopie, un objectif à atteindre mais une réalité ! Elle est rendue possible. Ce qui importe c’est de rendre le monde fertile et habitable pour tous : « ils briseront leurs épées pour en faire des socs de charrue… ».

 

Tel est le projet de Dieu pour les humains, frères et sœurs. Voilà une parole bouleversante qui nous provoque, qui pousse à une métamorphose, à un revirement total.

Le Prophète annonce la fondation d'un monde nouveau, la fondation d'une nouvelle Jérusalem, lieu de rencontre pour tous les peuples de la terre, lieu où Dieu lui-même demeure.

Le Dieu d’Israël veut nous instruire de ses voies pour que nous marchions comme lui sur des chemins d’amour et de non-violence. Le prophète ne considère plus le temple d’abord comme le lieu du culte et du sacrifice, mais comme la source d’où sortiront la Parole et la Loi du Seigneur.

Accomplir le culte sans se laisser changer le cœur par la Parole, ne sert de rien. Le jugement du Seigneur n’est pas condamnation, il est source d’une paix universelle. Dieu ne détruit pas les armes des peuples étrangers. Ils le feront eux-mêmes. Instruits par la parole du Dieu de paix, ils ne se fieront plus aux armes pour s’imposer les uns aux autres.

 

Frères et sœurs, c’est cette vision de paix qu’il nous faut accueillir comme le vrai rêve de l’Avent, croire qu’il est celui de Dieu, qu’il est en voie de réalisation et que nous sommes engagés personnellement. La fin catastrophique du monde ne se fera donc pas sur une décision de Dieu. Si l’Ecriture semble dire le contraire, c’est pour mieux nous inciter à veiller à la manière dont nous construisons l’avenir afin que les humains ne détruisent pas la création, et le reprochent ensuite à Dieu. C’est l’humain qui est dangereux pour l’avenir et pas Dieu.

Quand Jésus nous demande de veiller, c’est qu’il fait appel à notre esprit de responsabilité. Il nous en fait un impératif absolu pour construire l’avenir.

Nous sommes responsables de la tournure que prennent les événements et nous ne devons pas attribuer à Dieu la responsabilité de notre manque de vigilance.

 

« Restez donc vigilants… » !

Frères et sœurs, Jésus nous exhorte à la vigilance, car la vigilance est la manifestation de l’espérance, de cette attente vive, mobilisatrice ; de cette assurance. C’est le point de lumière sur notre route…

Sans espérance, nous ne sommes que les contemporains de Noé : nous mangeons, buvons, nous nous marions et marions nos enfants. Nous menons notre vie de façon banale. Sans espérance comme eux, nous menons une vie ordinaire, sans savoir qu’un changement radical va survenir. Sans espérance, pas d’attente, pas de veille.

Nous cédons, alors facilement, à la négligence spirituelle ; nous nous laissons happer par le quotidien ; par la vie tranquille dans une indifférence confortable. Nous glissons dans l’égoïsme et dans l’individualisme.

Sans vigilance, nous voici à vivre une vie sans profondeur, probablement chargés de toutes sortes d’activités, mais éclairés par aucune espérance.

 

Vous savez, les contemporains de Noé se contentaient de profiter de l’apparente stabilité de la société. Or, selon le récit biblique, ils vivaient dans un monde d’une grande violence et cette violence était insupportable au Seigneur tant elle était contraire à son projet de vie. Les contemporains de Noé avaient besoin d’artisans de paix, or ils en étaient inconscients et profitaient des ressources du monde, au jour le jour. Aucune vigilance ne les rendait attentifs.

 

Être vigilant, c’est être activement porteur de la vision de Dieu pour ce monde ; de la porter pour qu’elle fructifie afin de la lui rendre à son retour.

 

Frères et sœurs, la vigilance dont parle Jésus n’est pas celle qui consiste à se mettre en état d’alerte permanent comme si nous étions continuellement menacés par un risque imminent. Cette vigilance là, est passive et attentiste. En matière de fin des temps, cela ne changera rien.

Un tel état d’esprit consiste seulement à maintenir l’angoisse.

Au lieu d’attendre que l’événement se produise et d’être prêt au moment où il se produira, il s’agit d’agir pour que l’événement ne se produise pas. C’est une dynamique constructive de l’avenir qui organise à l’avance les temps qui viennent pour qu’ils soient plus heureux et que les catastrophes redoutées ne se produisent pas.

C’est cette vigilance que Jésus préconise. C’est une veille active, engagée.

 

En fait, ce texte de Matthieu souligne fortement notre incapacité à prévoir l’avenir, une incapacité que je qualifie d’heureuse, une incapacité dont seul, le Père, le maître de l’histoire, est exempt.

Heureux sommes-nous, nous qui ne savons pas l’heure (ni le jour, ni le mois, ni l’année) car notre incapacité nous pousse, nous force à une attente vraie, permanente et non à une médiocre attente calculée !

Jésus nous dit :« Vous le savez bien, si le maître de la maison savait à quelle l’heure de la nuit le voleur doit venir, il resterait éveillé et ne laisserait pas percer les murs de sa maison. C’est pourquoi tenez-vous prêts, car le Fils de l’homme viendra à l’heure où vous n’y penserez pas » Versets 43, 44

Veiller, c'est faire attention, écouter, scruter, discerner, s'occuper de, nourrir, protéger, aller vers, tendre la main... . Nous veillons parce que nous aimons Dieu! Nous voulons vivre pour son projet et être artisans de son projet. Nous veillons parce que nous voulons grandir vers plus de lumière, de paix, d'amour, une vie qui peut s'épanouir, fructifier en Dieu.

 

Frères et sœurs, chaque fois que par nos gestes (mêmes modestes soient-ils) des hommes et des femmes sont libres, ici et ailleurs, chaque fois que des enfants peuvent grandir dans la paix, ici et ailleurs, chaque fois que des femmes et des hommes se parlent en vérité, ici et ailleurs, c’est le Fils de l’homme qui vient, c’est le règne de Dieu qui est déjà là.”

 

Pendant cette période de l’Avent, que le Seigneur ne nous laisse pas nous assoupir, ne nous laisse pas nous endormir.

Réveille-nous, Seigneur, réveille notre vie par ta vie. Réveille en nous, Seigneur, le premier amour. Cet amour qui fait de ton absence une souffrance, qui fait de ta promesse une espérance. Viens, Seigneur viens !

Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Luc 21, 5-19 Prédication du dimanche 13 novembre 2016

14 Novembre 2016, 17:38pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

 

Texte biblique : Luc 21 : 5-19

 

Chers frères et sœurs,

Quand nous lisons l’Evangile, nous aimons bien entendre une bonne nouvelle car c’est bien ce que cela signifie le mot « évangile ».

Mais les paroles de l'Évangile que nous venons d'entendre sont loin d’être une bonne nouvelle.

C’est un texte peu réjouissant en première lecture qui nous parle de catastrophes, de persécutions et de fin du monde. Ces paroles de Jésus rapportées par Luc ne sont pas pour nous rassurer : tremblements de terre, épidémies, faits terrifiants ... « On portera la main sur vous ..., on vous jettera en prison ... Vous serez livrés même par vos parents  ... Vous serez détestés de tous .. ».

La scène de l’évangile de ce dimanche apparaît à un moment tardif du ministère de Jésus.

Les disciples se tenaient avec lui sur le lieu le plus sacré de Jérusalem et fixaient le majestueux temple de Jérusalem, le cœur de la religion et de la foi juives, le chef-d’œuvre d’Hérode pour apaiser les Juifs.

Ce qui avait commencé comme une admiration devant la beauté architecturale est devenu une vision prophétique de ce qu’il en coûterait d’être disciples en Son Nom.

Jésus annonce d’abord la ruine du Temple : « Des jours vont venir où il n’en restera pas pierre sur pierre. Tout sera détruit. » D’où la question des disciples, qui porte, elle aussi, sur ce désastre du Temple : « Maître, quand donc cela arrivera-t-il ? Et quel sera le signe que cela doit avoir lieu ? » Et Jésus de répondre, non pas en dévoilant un signe précis, mais en donnant une consigne valable en tout temps d’épreuve : « Prenez garde de ne pas vous laisser abuser » (par de faux messies) qui diront : « le moment est arrivé ». Puis Luc, presque sans transition, ouvre jusque au fond, la perspective en reprenant une parole de Jésus qui concerne la fin des temps : « Il y aura de grands tremblements de terre et des faits terrifiants venant du ciel, et de grands signes ».

Jésus parle des catastrophes à venir, dont la persécution, le rejet et la trahison des disciples.

Il parle aussi de ceux et celles qui viendraient en son nom pour offrir des solutions éphémères aux grands dilemmes de son époque et de la nôtre. Jésus n’est certainement pas étranger aux forces horribles qui demeurent à l’œuvre de nos jours.

 

Nous sommes tous à la recherche d’une assurance qui sans cesse nous manque. Tous les jours, et sans attendre la fin des temps, nous entendons parler de guerres et de soulèvements et nous sommes effrayés.

On voit les nations les unes contre les autres, groupes contre groupes (religieux, sociaux, ethniques..). Il y a toujours un coin du monde où les hommes sont victimes de grands tremblements de terre, d’épidémies et de famines.

 

La vie sur cette terre est profondément marquée par l’insécurité qui fait naître la peur ; mais cette peur est une bien mauvaise conseillère : elle engendre des réflexes de méfiance et trop souvent provoque tensions, violences ou guerres.

Devant cette fragilité de notre condition humaine nous éprouvons le besoin de trouver une stabilité, une assise solide.

Tous les faux prophètes (ceux que nous pouvons appeler des populistes dans notre langage d’aujourd’hui) utilisent cette soif de sécurité propre à l’humanité pour s’imposer : « C’est moi, disent-ils, qui vais vous fournir l’assurance dont vous manquez. ». Ces faux prophètes attirent des foules autour d’eux : ils prétendent apporter la paix alors que pour la plupart d’eux, c’est pour asseoir leur propre pouvoir. Tous les vendeurs de rêves (religieux, civils ou politiques) agissent ainsi. « Ne marchez pas derrière eux » dit Jésus à ses disciples.

Ceux qui clament que le temps (kairos, le moment opportun) est proche, ne comprennent pas que le calcul du temps (chronos, le temps du calendrier) ne nous permet pas de connaître l’accomplissement du temps de Dieu (kairos). Les faux prophètes peuvent aussi en venir à dire : « Le moment est tout proche ».Ils savent fort bien manier l’argument de l’imminence de la fin du monde.

 

Pourtant, frères et sœurs, c’est bien de la peur et de l’angoisse que Jésus veut délivrer les hommes et les femmes dans ce discours qui annonce la fin des temps. « Quand vous entendrez parler de guerres et de soulèvements, ne vous effrayez pas : il faut que cela arrive d’abord mais ce ne sera pas tout de suite la fin » dit Jésus.

Jésus veut apprendre à ses disciples à dépasser la peur dans ce monde marqué par les conflits et les guerres. Il veut leur donner cette assurance que cherche l’humanité entière. « Il faut passer par bien des épreuves, dit Jésus, il vous faudra de la patience…ce ne sera pas tout de suite la fin. ».

 

Jésus est le contraire d’un faux prophète : il ne donne pas de faux espoirs, au contraire il prévient que ce temps de guerres et de soulèvements dont on a tellement hâte de sortir risque d’être plus long qu’on ne le pensait. Jésus invite donc ses disciples à la patience, bien plus à la persévérance.

Jésus annonce à ses disciples qu’ils auront à subir une persécution terrible : « On vous livrera aux synagogues, on vous jettera en prison, on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs…vous serez livrés même par vos parents, vos frères, votre famille et vos amis…. Vous serez détestés de tous, à cause de mon Nom. »

 

Jésus annonce que l’avenir sera rude. Il ne rassure pas faussement. Mais il donne l’assurance que cette épreuve est normale.

 

Frères et sœurs, cette assurance est indispensable pour ne pas sombrer ; car lorsqu’on demeure totalement seul, empêtré dans toutes sortes de difficultés, entouré d’ennemis qui s’entendent contre vous, on croit réellement devenir fou. « Ne vous affolez pas », dit Jésus qui prévient, amortit ainsi le coup.

 

Dans cet atmosphère délétère, où l’horizon semble obscur, on a du mal à trouver une note d’espérance. On peut même se demander comment le monde peut être sauvé, et en quoi Jésus a joué ou joue un rôle pour que les choses changent.

Chers frères et sœurs, quand nous n’arrivons pas à trouver les bonnes réponses par nos propres raisonnements, nous savons que nous sommes sur la bonne voie.

Il nous faut chercher dans les Évangiles eux-mêmes les réponses qu’ils donnent à notre propre recherche. Écoutez alors cette voix qui nous vient de Jésus lui-même quand il nous rappelle qu’il a fait toute chose nouvelle. Il nous rappelle que le monde n’est pas destiné à être aspiré dans un tourbillon qui tenterait de le ramener dans le chaos primitif. Au contraire, le monde est traversé par une idée force selon laquelle il est possible à l’être humain d’inverser le cours destructeur de l’histoire. C’est cette force qui habitait Jésus et qu’il a mise en évidence.

Elle l’a habité toute sa vie. Elle lui venait de Dieu et a orienté tous ses choix. Elle a été suffisamment forte pour lui permettre aux heures les plus sombres de son aventure de croire que les pulsions de vie étaient capables de l’emporter sur les instincts de mort les plus violents. Même sur la croix, et après une longue agonie, la vie a triomphé pour ouvrir devant lui une perspective d’éternité.

 

Frères et sœurs, dans les moments les plus dramatiques de notre histoire, ce n’est pas notre désir de survie qui doit être la force qui nous anime, mais la vision selon laquelle le monde est entraîné par Dieu dans un mouvement où la vie est destinée à prendre le dessus, si nous savons être persévérants. L’Esprit de Dieu qui repose sur nous, nous maintient toujours dans la perspective selon laquelle l’avenir est habité par la certitude de la présence de Dieu dans l’évolution du monde. Nous, nous avons le temps du jour pour le servir et l’aimer, nous avons l’espace de notre cœur pour y accueillir la parole de Jésus, et l’espace du monde à prendre dans la prière, avec tous les témoins porteurs de son message de paix.

 

Trop souvent nous avons tendance à ne retenir de ce texte que ses passages apocalyptiques…

Alors, frères et sœurs,  si vous le voulez bien, allons un peu plus loin.

A partir du verset 14 de notre passage, Jésus dit ceci : «Mettez-vous donc dans l’esprit que vous n’avez pas à vous soucier de votre défense. Moi-même, je vous donnerai  un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront opposer ni résistance ni contradiction »

Ah oui ! « MOI-MÊME »…dit Jésus. … Jésus sera à nos côtés…« Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. »

 

Alors ca veut dire qu’en fait on n’a pas grand-chose à craindre.« C’est par votre persévérance que vous obtiendrez la vie. »

 

Ce texte nous appelle maintenant à la persévérance dans la foi. Sans trop nous laisser abattre par ce qui pourra arriver à notre monde demain, Jésus nous invite à poursuivre notre chemin quotidien dans la foi. Le message d’amour du Christ nous invite à témoigner chaque jour d’avantage de notre foi en Dieu.

C’est cette persévérance qui nous permettra de rester confiants et d’aborder le futur avec sérénité…

C’est encore cette persévérance qui fera de nous les témoins de Dieu dont nos frères et sœurs, séduits par tous les vendeurs de catastrophes et d’apocalypse, ont tant besoin dans leurs vies.

 

Alors, sachons, avancer pas à pas, frères et sœurs, avec persévérance, à la suite du Christ. Chaque jour, laissons le Christ, nous « inspirer ce langage de sagesse » qui nous permettra d’être pour nos frères et sœurs, de vrais témoins de son amour, qui nous permettra à tous et toutes de voir l’avenir au-delà de l’apocalypse.

La terreur, qu’elle soit cosmique ou personnelle, est maîtrisée par l’assurance que Jésus connaît les siens, même chacun des cheveux sur leurs têtes. Il s’est rendu à la croix pour que cette assurance soit digne de foi.

Je ne parle pas d’une persévérance aveugle ou stoïque mais bien la confiance en sa promesse que la grâce, sa grâce suffira, une grâce qui œuvre en tout pour la libération de chacun et de chacune.

Quand tout semble sur le point de disparaître, l’Evangile nous apprend que la vie doit prendre toujours le dessus car en Dieu, au-delà de la vie il y a encore la vie.

Telle est l’espérance en Jésus le Christ et cela personne ne peut nous l’arracher. Amen !

 

Charles KLAGBA

 

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Luc 20, 27-38 -Prédication du dimanche 6 novembre 2016

11 Novembre 2016, 20:19pm

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

                        

Luc 20, 27 à 38

 

Introduction :

« Une question sur la résurrection », c’est le titre donné à ce passage dans la Nouvelle Bible Segond. Oui, si on veut… mais ce matin avant d’aborder le thème de la résurrection, il me semble quand même que dans la question des sadducéens, une autre est sous-jacente et pas des moindre : la femme, à qui appartient-elle ? Cela pourrait faire l’objet de votre méditation dans la semaine, qui sait ? Nous, nous resterons sur le thème de la résurrection. Ici, les Sadducéens, aux synapses suralimentées de raisonnements franchement tordus, particulièrement dans leurs rares confrontations verbales avec Jésus, décident de prendre un chemin de traverse qui rallonge quelque peu la discussion sur la résurrection mais qui voudrait éviter les creux et les bosses de la route ordinaire d’une discussion à bâtons rompus trop abrupte qui finit toujours à l’avantage de Jésus. Alors ce matin, nous parlerons d’eux, et aussi, évidemment, de la réponse de Jésus, qui me conduira à risquer quelques mots sur ce qui, pour tout chrétien, toute chrétienne, est un des fondements centraux de notre foi. Paul le dit : « s’il n’y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus ne s’est pas réveillé. Et si le Christ ne s’est pas réveillé, alors notre proclamation est inutile, et votre foi aussi est inutile (…) si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espérance dans le Christ, nous sommes les plus pitoyables de tous»(1).

 

1) contexte, Sadducéens :

Parlons d’abord du contexte de cette histoire à dormir debout. Luc la place juste après l’épisode de la question sur le denier à payer à César, jetée en pâture à la discussion par les scribes et les grands prêtres ; ils n’avaient qu’une idée en tête : mettre la main sur Jésus pour en finir avec lui et ils lui avaient envoyé des espions qui en ont été pour leur frais, si j’ose le dire ainsi. Mais cela ne leur a pas servi de leçon ! Nous retrouvons dans notre péricope ceux qui copinaient abondamment avec eux : les Sadducéens. C’est la classe aristocratique, celle des prêtres et aussi celle qui collabore avec les romains.[2] « Ils ne connaissaient que l’autorité du Pentateuque, [c'est-à-dire les cinq premiers livres de la Bible], mais surtout ils ne croyaient pas à une vie future. Ils pensaient que la foi juive devait essentiellement se vivre sur cette terre, quitte à collaborer, dans des limites raisonnables avec les autorités civiles. Il fallait faire avec, leur seul avenir réel étant dans les fils qu’ils pouvaient avoir »(3).

On comprend donc aisément pourquoi ils vont s’emberlificoter dans une histoire rocambolesque mais qui touche, pour eux, à l’essentiel : la survie par la descendance. Et quelle histoire ! Basée sur la loi du lévirat[4], elle pose l’obligation pour un homme d’épouser la femme de son frère, si ce dernier meurt sans enfant. Celui qui naitra ne sera pas son fils, mais celui de son frère décédé. L’histoire de Ruth illustre avec saveur cette obligation faite à tous les hommes juifs. Mais là, l’histoire des sadducéens, c’est du gratiné de chez gratiné !

Nous pourrions relever au passage que la femme n’a pas son mot à dire. Et d’autre part, bien sûr, la question n’est en rien une question de salle de garde, de sexualité débridée, mais celle du statut juridique de la femme et de la nécessité d’une descendance. Et malgré la délirante application qu’ils en font, ils soulèvent   une vraie question : « celle de la plausibilité de la résurrection, de son comment et ses modalités[5] ». Et je me dis que certains jours, ces questions là me tarabustent aussi mais pas pour les mêmes raisons évidemment : pourrais-je parler avec mon papa mort à 32 ans, quand j’avais 4 ans ? comment sera-t-il ? serais-je plus vieille que lui ? bref, des trucs à dormir debout dont chacun a le secret pour faire le tour d’une résurrection dont nous ne savons absolument rien. « Les quatre Evangiles parlent de la résurrection, mais aucun ne la décrit, aucun ne montrent Jésus en train de se réveiller des morts, de se débarrasser des bandelettes qui l’enferment, de rouler la pierre et d’attendre ses disciples. Les Evangiles ne décrivent pas la résurrection. Ils l’annoncent[6] ».

 

2) la réponse de Jésus :

Et c’est bien ce que fait Jésus dans sa réponse. Comme a son habitude, il refuse d’entrer dans la polémique de l’absurde qui voudrait ridiculiser une croyance très populaire dans le petit peuple juif. « Elle jouait le rôle d’espérance compensatoire face à la dureté du présent ». Un pasteur traduit un mot du texte parallèle de Marc 12, 24 qui en dit long sur ce que Jésus pouvait penser de telles calembredaines : « vous planétez » c'est-à-dire vous déraillez complètement, ce que la NBS traduit sagement par « vous vous égarez ». Puis, Jésus déroule sa réponse.

- d’une part, si dans ce monde-ci, on se marie et on a des enfants, une descendance pour accéder à la promesse eschatologique, dans le monde où l’on est jugé digne d’accéder ainsi qu’à la résurrection, on ne se marie pas et donc la question des enfants ne se pose plus. Pour les sadducéens, l’éternité c’était la descendance qui la tricotait, génération après génération. Jésus remet en question ici cette conception d’une vie toute terrienne et, scandale, de l’utilité d’avoir une descendance ! « La vie éternelle n’est pas une question d’engendrement [7]».

- Jésus affirme aussi une espérance : « ils ne peuvent pas mourir » puis ils leur assènent un scoop dont il a le secret : « ils sont semblables à des anges ». C’est comment un ange ? Nous n’allons pas discuter de leur sexe, bien sûr. Ce que nous savons d’eux ne touche pas à leur nature mais à leur fonction : ce sont des messagers. A la résurrection, serons-nous des messagers ? Wait and see….

Notons que dans le texte grec, les verbes sont à l’indicatif et donc que les propos de Jésus sur la résurrection sont une affirmation qu’elle a déjà ouvert une brèche sur la terre, dans la vie de l’aujourd'hui de ses auditeurs. « Ils sont fils de Dieu, étant fils de la résurrection » dit-il. Il est vrai que des opinions divergentes s’entrechoquent parmi nous ou entre institutions religieuses sur ce point. En fait, comme le dit un commentateur, et il faudra bien que nous l’acceptions : « la résurrection n’est rien d’autre que la mort de Jésus vu avec les yeux de Dieu ». ………

Et « Dieu n’est pas le Dieu des morts mais des vivants [8]».

- voilà une parole en forme d’affirmation mais aussi de promesse qui fait éclater toutes nos conceptions, nos peurs, nos rites face à la mort. Quel que soit le « doudou » sécurisant que nous ayons confectionné pour faire face à ce qui ressemble à une porte fermée que nous appelons la mort : objets transitionnels, rituels, croyances, et l’homme est inventif dans ce domaine, nous voilà déplacés du monde des morts dans celui des vivants.

 

3 ) vivants :

Oui, nous l’affirmons : « Dieu est le Dieu des vivants. Car pour lui tous sont vivants ». C’est la réponse que Jésus choisit de donner, déplaçant ainsi la controverse sur un terrain que les Sadducéens ne peuvent contester : une parole de Moïse dans le livre de l’Exode. Je cite la pasteure Anne Petit qui fait ce commentaire: « Il nous faut faire à présent un petit détour par le raisonnement rabbinique que tient Jésus et qui nous est étranger : le séjour des morts est le lieu où, pour tous les Juifs de l’époque, Dieu n’est pas présent. Donc si le Seigneur se présente comme étant le Dieu de chacun des pères, c’est que pour Dieu, ces pères sont vivants. Sinon, il dirait « j’étais le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». Donc, Abraham, Isaac et Jacob vivent pour Dieu. Et la résurrection existe bien.[9] »

Voilà pour nous une parole de vie. Peu importe les modalités de la résurrection, le comment, le pourquoi ou le quand. Le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob, le Dieu de Jésus vient s’impliquer dans la vie des vivants, dans notre vie à nous, ici et maintenant. A chacun de nous il offre un regard aimant, un chemin de liberté, une pluie de grâce, la vie qu’il veut vivre « un » avec nous comme il est « un » avec son Fils. Et nous pouvons dire avec Syméon le nouveau théologien : « je sais que je ne mourrai pas parce que je sens la vie tout entière qui jaillit au-dedans de moi[10] ». Et Antoine Nouis écrit : « Si nous demeurons toujours en quête du Christ, en d’autres termes, si le Dieu de l’Evangile est notre Dieu, nous découvrons que notre vie est dépassée, dans toutes ses dimensions par ce qu’on appelle la grâce. De même que notre histoire est précédée par le désir de Dieu, notre vie s’achèvera dans l’amour de Dieu. C’est à partir de cette relation que nous pouvons appréhender la résurrection, non dans le domaine du savoir mais de la confiance en un Dieu qui déborde les limites de notre histoire[11] ».

 

Conclusion  : c’est pourquoi, même si nous ne sommes pas dans le temps liturgique de Pâques, il m’a semblé évident de conclure non point avec des paroles de savoir mais puisque nous sommes des vivants, avec ce qui est un don de la grâce infinie du Dieu des vivants. Contemplons le Christ ressuscité.

O Christ, tu es le chemin, tu es la vérité, tu es la vie

O Christ, tu es en nous, et nous en toi et dans le Père.

O Christ, le messie attendu, l’agneau de Dieu, le prince de la paix,

O Christ, tu es en nous et nous en toi et dans le Père.

O Christ, le Fils de Dieu, le Fils de l’homme, notre frère,

O Christ, tu es dans le plus petit de nos frères.

O Christ, l’homme de douleur, le méconnu, le crucifié,

O Christ, tu es en nous, et nous en toi et dans le Père.

O Christ, le ressuscité, le glorifié, le vivant,

O Christ, tu es en nous, et nous en toi, et dans le Père.

O Christ, tu es le Sauveur, tu es mon Sauveur, tu es le Sauveur du monde.

Maranatha, viens Seigneur Jésus, viens! Amen!

 

Joëlle Alméras

 

 

[1] 1 Corinthiens 15, 13 - 19

[2] http://www.interbible.org/interBible/ecritures/mots/2011/mots_110923.html

[3] Alphone Maillot

[4] Deutéronome 25, 5 - 10

[5] Antoine Nouis « l’aujourd'hui de l’Evangile » p.356

[6] Idem p. 357/358

[7] Cjaude Julien interbible

[8] Luc 20,38

[9] erfjvvc.org/AnnePetit/.../Luc_20_la_femme_aux_sept_maris.doc

 

[10] Antoine Nouis « l’aujourd'hui de l’Evangile «  p.361

[11] Idem p.360

[12] Liturgie de Pomeyrol p. 53

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Zachée - LC 19, 1-10 - Prédication du 30 octobre 2016

2 Novembre 2016, 08:51am

Publié par egliseprotestanteunienarbonne@gmail.com

Prédication de Jean-Pierre Pairou de Carcassonne.

LUC  19, 1 à 10

 

Texte connu , « sympathique », aimé des écoles bibliques, Mais convient-il à ce jour de célébration de la Réformation ? Ne serait-il pas plus «  sérieux «  de prendre un texte plus classique ( Ephésiens, Romains,.. ) plus proche des thèmes propres à la Réforme ?  En réalité ce texte contient en filigrane ces thèmes réformateurs.

Jésus est en route vers Jérusalem, il entre dans Jéricho et y guérit un aveugle. Un homme vient vers lui, ne souhaitant rien solliciter, il vient en badaud. Il est riche, collecteur d’impôts c’est-à-dire collaborateur de l’occupant romain et pour cette raison «  mal vu » . il est de plus de petite taille et donc rejeté. Pour cette raison, il grimpe à un arbre pour voir Jésus.

Un certain nombre de thème se dégagent de cette anecdote :

Thème du « voir » :

Jésus vient de guérir un aveugle . Faisant un mauvais jeu de mots, on pourrait dire que Zachée est « mal vu ». Considéré comme un profiteur, un pécheur.  «  il est allé loger chez un pêcheur » dit-on de Jésus. Importance du regard, souvent accompagné de jugement dans la vie quotidienne. Importance de l’apparence que nous nous donnons et qui dit ce que nous voulons être  «  au monde » En même temps nous sommes prompts, comme la foule, à juger en fonction du paraitre de l’autre. Zachée est doublement regardé et considéré comme riche et nain. Dans le même ordre d’idée, il veut voir. Voir cette «  célébrité » dont il a entendu parler. Attitude que nous connaissons tous, vouloir faire entre son histoire personnelle dans l’Histoire en assistant à l’évènement. Désir qui peut conduire à des comportements un peu ridicules : Zachée grimpe à l’arbre.

 La vue semble être privilégiée et nous pensons souvent que notre foi aurait été plus grande si nous avions vu  et pourtant…

Jésus lui aussi voit «  Il leva les yeux », mais immédiatement il passe de l’ordre du voir à celui du dire et faire. « Descends vite, il faut que je demeure chez toi ». La relation à Jésus ne passe pas par le voir.. Le désir de voir conduit à l’impasse. « La Foi vient de ce que l’on entend » dit Paul.

Et le protestantisme a bien intégré ce fait avec ses temples dans lesquels il n’y a rien à voir (ou si peu)  et où le « Tout est à entendre » détermine souvent la place symbolique de la chaire.

Thème de  « l’invitation »

L’invitation induit la relation. Mais là, le thème est pris à l’envers : c’est Jésus qui s’invite et non qui est invité. Zachée devient l’hôte.  Le double sens du mot  en français est intéressant à cet égard et met en évidence Le caractère de rencontre, de communion de la commensalité.  (La Bible contient plus de repas que de prières et le banquet eschatologique représente l’avènement du Royaume.) Le repas partagé nous humanise, nous fait «  oublier que nous avons des dents ( F. Quéré ) ».

Ce qui est important ici, c’est que c’est Jésus qui s’invite. Ceci illustre l’idée d’un Christianisme non religieux. Dans toute religion, c’est l’homme qui, par des prières, des sacrifices, des rites cherche à se concilier son dieu . Dans le christianisme, c’est Dieu qui cherche l’homme par amour. Ainsi le

 

Christianisme s’est-il parfois perverti en devenant du pur « religieux » dans le sens d’une recherche des « bonnes grâces divines »  par des moyens humains, loin du message initial de la Grâce gratuite.

Celle-ci peut se retrouver dans l’expérience des vraies rencontres humaines dans l’Esprit. Rencontrer vraiment l’autre, c’est rencontrer l’image de Dieu qu’il est.

Laissons entrer Jésus dans nos vies, loin des rites et au-delà du désir de « voir ».

 Thème du Salut :

« Le salut est venu sur cette maison ». Certaine ambiguïté à première vue marquée par la « conversion » de Zachée toute centrée sur les « œuvres ». Ce serait parce que Zachée fait le bien que «  le salut est entré ». Nous serions dans un salut par les œuvres. En réalité, si Jésus ne s’était pas invité chez Zachée, celui-ci, spectateur sur son arbre n’aurait rien changé à sa vie.. Le texte semble faire croire que Zachée cherche Jésus , en réalité, c’est l’inverse et nous sommes là dans le thème du « salut par grâce ». Dieu nous cherche, par son amour inconditionnel, illustré par l’invitation de Jésus, il sauve par sa grâce que nous n’avons qu’à recevoir dans la foi.

Dieu nous cherche tous, il est dans le quotidien, dans la rencontre avec nos frères. Il n’est pas besoin de grimper aux arbres, ni de regarder en l’air pour le trouver, ni de codifier des rites pour le rencontrer.

 Il est au cœur de nos vies, à nous de le reconnaitre et de l’accueillir.

Jean-Pierre Pairou

30/10/16

 

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